-Aïe … J’ai les cheveux qui me poussent à l’intérieur du crâne…
-Hihi, bien dormi Mid ? Te souviens-tu de ce qui s’est passé hier soir ?

J’ouvrais doucement les yeux pour deviner à coté de moi la jolie blonde assise dans le lit qui me regardait m’éveiller avec un large sourire.

-Non… J’ai un trou, c’est la première fois que ça m’arrive… En plus de 2 siècles… Il s’est passé quoi ?
-Oh, rien de bien important, tu as été pris à ton propre jeu.
-Mon propre jeu ? Je ne vois pas trop.
-Un concours de boisson et tu as perdu.
-Euf… Je ne vois pas trop qui a bien pu me mettre une murge…
-Moi, pourquoi ?
-Toi ?! C’est une plaisanterie ?!
-Non, tu triches en profitant de ton métabolisme surentraîné pour dissiper l’alcool plus rapidement tout en traînant sur les verres. Alors j’ai triché aussi.
-Hum… Tu m’as fait boire…
-De l’éthanol, très efficace. Ca ne sent presque rien pour un alcool quasiment à 100°, 3 verres et tu étais sous la table, sans rien voir venir, moi évidement j’étais au martini sans vodka, le barman était de mèche.
-Grrr je me vengerai un de ces jours… On avait parié quoi ?
-Je ne te le dirai pas ! Pas tout de suite en tout cas.

L’humaine prenait un malin plaisir à me narguer en me présentant sa langue, d’autant que mon état ne me permettait pas la moindre possibilité de vengeance mesquine. Elle se leva finalement pour aller finir de s’habiller, sans prendre la peine de se cacher pour chercher sans doute à me torturer un peu plus ou me forcer à poser des questions.

- Hum … T’as dormi dans le même lit que moi ?
-Oui, il y avait bien longtemps qu’on n’avait pas passé la nuit ensemble non ? En plus quand tu es ivre, tu ne ronfles pas et tu ne vomis pas, par contre tu es très bavard !
-Bavard ?!! J’ai parlé de quelque chose pendant la nuit ?
-Oui, d’une femme, mais ce n’était pas moi.
-Pas toi ? Comment peux-tu dire ça ?
-Je ne suis pas rousse Mid et je ne l’ai jamais été. A moins que ça ne soit un de tes fantasmes inavouables de me voir comme ça !

Elle se remit à rire avec son petit sourire moqueur que je connaissais maintenant si bien, me mettant un peu plus mal à l’aise, je me demandais bien ce que j’avais pu lui dire, qui était la femme de mes rêves et surtout ce qu’on avait fait cette nuit.

- Allez ne fais pas cette tête, tu es en congés aujourd’hui, va donc prendre une douche, je te laisse utiliser ma salle de bain, je suis dans un bon jour tu vois ! Et si tu veux que je vienne te frotter le dos n’hésite pas !
-Keuf keuf, non ça va aller merci, je vais réussir à me débrouiller tout seul… Mais euh merci pour la proposition !
-Pas étonnant que tes hommes pensent que tu es de l’autre coté de la barrière avec des attitudes pareilles, on dirait un curé. Heureusement la nuit tu es moins timide.

Ces quelques mots confirmaient bien ce que je refusais de m’avouer et le clin d’œil qu’elle lança finit son travail en me faisant rougir jusqu’aux oreilles, ce qu’elle recherchait visiblement depuis un bon moment.

-Je peux savoir pourquoi tu as fait ça ? C’était prémédité non ?
-Absolument !
-T’as pas un copain en ce moment que tu viennes casser ma réputation ?!
-Ta réputation de coincé et de frustré tu veux dire ? Si tu trouves que c’est bien pour un maréchal, désolée de l’avoir brisée. Et non, je n’aurais pas fait ça si j’étais encore avec quelqu’un Mid, ça me blesse que tu puisses penser ça.
-Excuse-moi…


Je me levai enfin du lit pour aller l’enlacer en guise d’excuse et la serrer fort contre moi. Elle se retourna et ses lèvres vinrent aussitôt trouver les miennes. Le contact dura moins d’une seconde que je m'écartai doucement.

-Tu me trouves donc repoussante maintenant ? Ca n’a pas toujours été le cas pourtant !?
-C’est juste que… Tu sais que je t’aime vraiment beaucoup, mais, mais on n'est vraiment pas fait pour être ensemble, je croyais qu’on était d’accord la dessus.
-On l’est toujours Mid, mais là c’est autre chose, c’est être un peu ensemble, et je dois avouer que tu me fais peur…
-Je te fais peur ?!!
-Oui, je sens qu’un mal te ronge, tu sais que je sens ces choses-là, et je vois tes problèmes avec les femmes, au début ça se passe bien puis hop, tu disparais. Je ne t’ai pas revu avec une fille depuis qu’on est sorti ensemble et tes rêves montrent que ça te court sur le système.
-C’est faux, j’ai eu une aventure avec… Zut je ne sais plus comment elle s’appelle…

Elle m’interrompit d’un doigt sur la bouche alors que ses pupilles se vrillaient dans les miennes.

-Erika, oui, il y a maintenant plus de 8 décennies, Mid, et vous n’êtes pas allés bien loin d’après ce qu’elle m’en a dit. Tu n’as pas montré d’intérêt à une femme de mémoire d’homme, pourtant je te sens seul, terriblement seul. Qu’est-ce qui ne va pas ?

J’étais bien incapable de répondre, je savais qu’elle avait raison, mais j’étais incapable de me l’expliquer moi-même. Pourquoi se préoccupait elle de ça maintenant ? Je me contentais de profiter de son étreinte si réconfortante et de son épaule pour laisser échapper mes larmes, elle à qui je les montrais de temps à autre.

Rigolo

Bien sympatique Mid. Surtout avec les couleurs pour le dialogues c'est mieux (moi j'ai la flemme de le faire pour le peu de personne qui doivent y lire).

Le videocom se mit à sonner, je sortais juste de la douche, quelques bruits de pas et le son caractéristique indiquant que la communication était acceptée.

- Bonjour Maréchale, comment allez-vous ?

Je reconnaîtrais cette voix entre mille, un de ces trou de balle hypocrite qui m’indispose. Un problème insolvable car ancré dans le fondement même de l’espèce humaine. C’est à cause des gens comme lui que j’ai dû abandonner ma place de dirigeant de l’organisation terrienne de l’air nouveau. Emeline pensait qu’en fusionnant avec les organisations qui nous donnait tant de difficultés on réglerait bon nombre de problèmes. Je suis persuadé qu’elle se trompait, et je le pense encore. Je lui ai pourtant laissé ma place pour qu’elle fonde la confrérie du futur avec ceux qui étaient nos ennemis. Vaugen… Il cherchait le pouvoir, tout en se permettant de draguer la maréchale, celle qu’il voulait renverser.

- Bonjour Vaugen, je vais bien merci, que me vaut cette surprise ?
- J’ai appris que vous aviez pris quelques vacances et comme vous n’avez plus trop d’obligations, je pensais qu’on pourrait vous inviter à dîner, qu’en pensez-vous ?
- Pourquoi pas en effet, il faudra que je trouve un soir où je n’ai rien prévu. En tout cas si vous m’emmenez dans un restaurant aussi réputé que la dernière fois, je trouverai bien un moment pour vous accompagner.

Je sortai de la salle de bain pour jeter un œil au visiocom, voir Emmy sourire comme elle faisait me mettait déjà les nerfs en pelote. Je passais rapidement dans le dos d’Emmy que l’effet cherché se manifesta aussitôt.

- Bien alors que diriez-vous … Oh, vous êtes accompagnée ! Qui est-ce ?

Elle avait beau retenir sa colère, son pincement de lèvres ne pouvait pas m’échapper, elle avait bien compris ce qui venait de se passer et elle allait devoir jouer de tous ses charmes et ses talents de diplomate pour éviter que la situation ne dégénère, ce que j’espérais de tout cœur.

- Oh, oui, c’est un ami, il est passé boire hier soir et n’était pas en état de rentrer chez lui
- Vos amis se baladent kiki au vent chez vous ?!
- Je crois que vous avez mal vu Vaugen, il porte un slip, pas très élégant, mais un tout de même.
- Emmy, je vous assure qu’il …
- Allons ! Je pense être plus à même de parler de ce qui se passe chez moi que vous qui regardez dans un visiocom non ? Vous étiez en train de m’inviter à dîner, je pense que c’est un sujet plus intéressant.
- Oui vous avez raison, que diriez-vous de ce soir ?
- Je ne serai pas disponible avant 3 jours, donc ce soir ce n’est pas possible
- Oh je vois, votre amis reste un peu alors

C’en était trop, je ne pouvais plus tenir tranquille et me plaçai derrière Emmy, la prenant par la taille et lui glissant un baiser dans le cou. Elle vira immédiatement pivoine et le temps qu’elle se reprenne me laissait largement le temps de m’occuper du cancrelat indésirable.

- Bonjour Vaugen, ça roule ?
- Grand maréchal Heinsval, je ne vous permets pas de m’appeler par mon prénom Midnight !
- Dans ce cas commencez par m’appeler Grand maréchal Knight, commandant des colonies marsiennes.
- Ces titres sont usurpés ! Vous n’avez plus qu’un titre d’honneur et ce n’est même pas votre vrai nom, je n’ai pas à me plier à vos exigences ! Vous me devez le respect, je suis votre supérieur !
- Alors dans l’ordre, ça ne vous dérange pas d’oublier les titres de la maréchale qui est votre supérieur et de l’appeler par un surnom. Ensuite je n’ai qu’un supérieur et ce n’est pas vous. Ah et Vaugen, jamais vous ne la sauterez, ça ne sert a rien d’espérer.

Je lui lançai un petit sourire assassin avant de couper la communication et contracter tous mes muscles. Nul doute que la colère que j’allais subir de la part de ma chère et tendre chef serait explosive.
Je me tournai doucement vers elle pour découvrir son visage rayonnant, ce qui n’était pas bon signe. Elle s’appuya doucement contre mon torse et me serra contre elle, sans que cela ne puisse vaincre ma crispation, puis elle m’embrassa tendrement.

- Oughtch …

Une seconde d’inattention avait suffi et son genou était venu trouver le bas de mon ventre, elle n’avait pas frappé fort, à cet endroit c’était inutile, et elle ne voulait vraisemblablement pas m’empêcher de procréer.

- Alors ça ! C’était vraiment puéril Mid ! C’est à cause de ce genre d’attitude qu’on ne pourrait pas construire quelque chose tous les deux. Tu es vraiment insupportable, la prochaine fois je te passe des menottes de force et je t’attache au lit !
- Je savais bien que tu avais des tendances dominatrices.

Je m’asseyai sur le lit pour faire passer la douleur et elle vint se mettre à coté de moi, un petit sourire en coin.

- Ce n’est pas drôle.
- Pourquoi ce sourire alors ? Ne me dis pas que tu es déçue de ne pas pouvoir manger avec l’autre… Si tu veux aller dans un bon resto, je t’invite tous les soirs.
- Mid … Que tu veuilles me protéger, ça me touche toujours, mais des fois tu ferais bien de t’abstenir. Si j’accepte de dîner avec Heinsval c’est parce qu’il parle trop. A vouloir me conquérir il me met toujours au courant de toutes ses petites histoires. Il se prépare quelque chose en ce moment et c’était l’occasion de savoir quoi.
- Je n’avais pas vu ça sous cet angle… C’est juste que voir l’autre hypocrite te faire la cour… Je ne supporte pas ça, il ne devrait même pas t’adresser la parole !
- Il faudrait que tu ranges tes principes, tu es trop rigide, prends du recul. Maintenant, il va falloir trouver un autre moyen de mettre à jour ce qu’il mijote et tu m’es redevable.
- Ca sous-entend que je reprends officiellement du service ?
- Je vais faire annuler ta suspension, fais attention cette fois.

La salle du conseil, endroit mythique, c’est là que se font et se défont les carrières, c’est ici que sont nommés les maréchaux, c’est aussi ici qu’on les congédie.
Je regardais les sept fauteuils sur l’estrade, j’avais siégé quelques temps dans l’un d’entre eux, celui du maréchal de la défense solaire juste à droite de celui de la maréchale suprême, Emmy.

Il n’y avait encore personne dans la salle, elle m’avait mis la pression, j’avais eu peur d’arriver en retard, moralité, une demi-heure d’avance. Ca me ressemble bien ça, excès de zèle pour bien faire.
Je m’asseyais sur l’un des nombreux sièges face à l’estrade, laissant la première rangée aux martyrs de l’ordre du jour, une fois à cette place ça m’a suffit.
Une personne s’assit à coté de moi alors que j’étais encore perdu dans mes rêves.

-Tu reviens mettre de l’ambiance Mid ? J’espère qu’Emmy ne fait pas d’erreur en te donnant l’occasion de déclencher une quatrième guerre mondiale.
-Kitaï, ça faisait bien longtemps, j’aurai espéré un accueil plus chaleureux qu’avec des sarcasmes.

Cet homme est celui qui m’a presque tout appris, c’est aussi lui qui s’est occupé d’apprendre à Emmy tout ce que j’ai été bien incapable de lui montrer, il a toujours été meilleur pédagogue que moi.

-Ton retour me fait plaisir, mais j’ai une certaine appréhension, doit-on te considérer comme un allié ou un ennemi ? Je ne suis pas aussi enthousiaste qu’Emmy, tu es une bombe à retardement dont la minuterie est déréglée et je n’aime pas trop jouer avec la chance tu le sais bien.
-Je t’arrête tout de suite, j’étais venu juste voir une amie et elle m’a demandé de l’aide là où vous semblez bien désemparés.
-Je ne nie pas qu’il y ait des problèmes, et Emmy a fait appel à toi parce qu’elle a toute confiance …
- … Et toi non ? Ce que tu veux me dire c’est qu’elle a fait une erreur en me demandant de revenir ici faire le ménage dans votre équipe de bras cassés parce que vous êtes maintenant incapables de le faire avec toute votre bureaucratie démocratique vérolée.

Il me fit signe de baisser d’un ton, la salle commençait à se remplir, beaucoup de nouvelles têtes et quelques anciens qui me regardaient comme une bête de foire. Le statut de maréchal réduisait considérablement l’espérance de vie des intéressés.

-Ce que je veux dire c’est que je te connais bien Mid, tu arrangeras tout oui, mais il y a de fortes chances que ça soit avec pertes et fracas, je n’ai pas envie que tu détruises tout ce qu’on a fait, le bon et le mauvais, parce qu’il y a plus de bon que de mauvais dans ce qu’on a fait, même si tu en doutes. Tu auras mon soutien parce que tu as le sien, mais je ne te fais absolument pas confiance sur ce coup là, il faudra faire tes preuves et pas uniquement devant les quatre autres.
-Sympa ...

Il s’éloigna pour aller rejoindre sa place sur l’estrade, Emmy entrait tout juste et m’adressa un petit sourire amical dans lequel je sentais pourtant une pointe d’angoisse dans son attitude, je les rendais tous nerveux, c’était un fait.

Hihi, sont vraiment agréables les dialogues
Mais avec tout ça on ne sait toujours pas le vrai nom de Midnight... Grrr...


Edit by Mid: C'est 300€ pour avoir le vrai nom de Mid

.....
Ah c'est pas son vraie nom, on en apprend tout les jours.

La salle s’était remplie, l’hémorragie de personnel gradé que la confrérie subissait depuis quelques années prenait toute sa dimension avec les 21 sièges libres sur 50 normalement occupés par des maréchaux et grands maréchaux. J’étais quasiment caché de l’estrade et je ne faisais rien pour que cela change. Je préférais observer les dirigeants, se préoccuper de l’ordre du jour, tous ? Non sûrement pas, deux d’entre eux étaient bien plus occupés à me chercher du regard, scrutant la foule avec le même air intelligent que des vaches regardant passer un train.

Complètement à droite, le grand maréchal de l’économie et des dépenses, Armani Vajioli, on dit que les ritals ont toujours été doués pour les comptes et le commerce, sûrement un large héritage de la mafia. Malgré quelques détournements mineurs d’argent pour arrondir son salaire pourtant déjà fort conséquent, il ne cherche jamais d’histoire et même s'il aime rouler des mécaniques il sait très vite redevenir réaliste devant une situation périlleuse.

Un cran sur sa gauche, le premier des deux bovinassés, le grand maréchal du développement et de la recherche, monsieur magouille et compagnie, j’ai nommé Frantz Bigdrul. D’une intelligence au moins aussi démesurée que sa malhonnêteté et son hypocrisie, le genre de types que je ne peux même pas voir en photo. C’est lui qui a réussi à me faire virer huit ans plutôt en manoeuvrant habillement entre l’esprit de conciliation d’Emmy et mon sang bouillant. Nul doute qu’il tenterait de réveiller le volcan qui sommeille en moi, mais j’ai encore la chair de poule d’avoir couché dans un congélateur.

Vient alors la vache numéro deux, le grand maréchal de la défense solaire, Vaugen Heinsval, est-ce vraiment la peine de faire son éloge ? On peut dire qu’on n'a pas été gâtés à la Confrérie, les deux seuls chleux qui sont grand maréchaux sont des pourritures finis, après on va sévir sur tous les soldats qui osent les appeler de façon péjorative commémorant les deux premières grandes guerres, mais quand on les voit, on n'a pas envie de les appeler autrement que « casque à boulons ». En plus ce fumier s’est bien choisi ma place et essaie de se mettre dans le lit d’Emmy, il a vraiment peur de rien.

Trônant au centre, la maréchale suprême Emeline de Valdaucourt, aussi maligne que gracieuse et délicate, j’ai toujours aimé sa façon de dire aux gens qu’ils sont cons sans même que ces derniers ne trouvent quoi y répondre. C’est d’ailleurs dommage qu’elle n’utilise pas ce don plus souvent, ça soulage tellement, et ça m’éviterait de le faire moins subtilement et plus régulièrement.

A sa gauche le grand maréchal du paranormal, Kitaï Ohura, un homme bien mystérieux qui n’en a jamais dit beaucoup sur lui, mais sa puissance et sa sagesse hors norme imposent le respect même aux plus méprisants. Quasiment tous les grands maréchaux sont venus tôt ou tard affûter leurs pouvoirs avec lui.

L’avant dernière figure Juan Lopez, grand maréchal de la diplomatie galactique, surnommé el confrero, parce qu’avec un nom comme ça on se retrouve avec les bureaux emplis d’une douzaine de mexicains quand on veut le convoquer. Il est arrivé peu avant mon départ et a gravi les échelons très rapidement, la création de poste dans le domaine diplomatique l’ayant sans doute bien aidé.

Enfin le grand maréchal de l’intelligence, Jushua Crusty ( ). Il passe son temps à cacher son nom de famille et on le comprend mais c’est vrai que ça fait plus classe de donner du « maréchal Joshua » que du « maréchal Crusty », on passe tout de suite moins pour un clown, surtout quand on s’occupe d’espionnage.
J’avais eu l’occasion de bosser un peu avec lui, il est simple et efficace, pas de ces gens à parler pour ne rien dire mais plutôt le mec qui vous met un coup de batte derrière le crâne si vous avez cru bon d’ignorer l’avertissement qu’il vient de vous donner.

-Maintenant que les problèmes quotidiens ont été abordés je voudrais soumettre au vote du conseil une décision d’une grande importance, c’est l’annulation d’un jugement qui a été prononcé contre l’un d’entre nous, l’obligeant à quitter la confrérie il y a quelques années.

Ces quelques mots venaient de me tirer de ma rêverie, c’est que pour une entrée en matière elle avait fait fort, je n’arrivais même pas à lire la signification des grimaces qu’on voyait sur certains visages en décomposition. Il m’a donc fallu me lever pour m’exposer aux regards noirs, si expressifs et terrifiants de ceux qui avaient presque eu ma peau.

-Je voudrais donc soumettre la possibilité de réintégrer le maréchal Midnightknight parmi nous.
-Maréchale ?! Malgré tout le respect que je vous dois, puis-je vous demander si vous êtes sérieuse ? Nous parlons tout de même d’un cas grave !

L’intervention de Vaugen ne manqua pas de faire pouffer de rire une bonne partie de l’assemblée et des siégeants, la discussion n’avait pas encore commencé qu’il crevait déjà le plafond du ridicule. Il n’avait pu s’empêcher de se lever sous l’impulsion de sa protestation et la maréchale le regardait froidement, présageant que le meilleur restait à venir. Enfin, le meilleur pour nous, mais pour son collègue, cela tournait déjà au cauchemar.

-Maréchal Heinsval, si j’avais voulu plaisanter à une assemblée, je l’aurait sûrement fait le premier avril avec un nez de clown. Veuillez maintenant vous rassoir je vous prie et ne plus m’interrompre tant que je n’ai pas fini.
Midnight a été destitué à cause d’une affaire de meurtres et une opération qui a mal tourné dont il avait la charge. On l’a donc accusé du meurtre de quatre maréchaux en utilisant la téléportation pour arriver à ces fins. L’enquête a conclu assez vite en sa culpabilité, étant le seul avec moi et Kitaï à posséder cette aptitude mais aussi le seul de nous trois avec un mobile. Cependant le temps nous a montré que nous étions bien naïfs et que bien d’autres téléporteurs ont ensuite été découverts, certains avec des mobiles bien meilleurs que Midnight pour ces quatre crimes. Mais ce qui me pousse à demander une révision de ce jugement c’est la suite. On a blâmé le maréchal de nombreuses fois pour son inconscience au combat, mais jamais pour de l’incompétence. Hors c’est bien son incompétence qui a mené deux escadrons à une mort certaine pour échouer lamentablement dans ses objectifs.
-A force de jouer avec le feu il a fini par se brûler… Oui je me tais …

Elle ne prit même pas la peine de relever la dernière remarque du bouffon de service, son soupir en disait de toute façon bien assez long. C’est le sourire sur les lèvres de Joshua qui m’intriguait plus, il avait sa tête des bons jours, ces moments où il a préparé une jolie surprise explosive et la savoure avec de l’avance dans son coin.

-Je vais laisser la parole au maréchal de l’intelligence pour poursuivre, il maîtrise mieux la suite du sujet
-C’est récemment en enquêtant sur un réseau de fabrique clandestine d’arme nucléaire que j’ai dû me rendre à nouveau sur les lieux de l’opération tragique, si je peux la nommer ainsi. Mes hommes et moi avons alors découvert une tour défense enfouie dans le sol, une tour du modèle GTDH824EXP. GTDH signifiant Gatling Tower Defense Hiden, le 8 représentant le nombre de canons parallèles, 24 le nombre de coups par seconde et EXP pour explosive. En d’autres termes, cet engin a été fabriqué chez nous, c’est le système de protection utilisé communément dans nos bunkers et spatioports. Je me suis donc intéressé à son numéro de série et cette tourelle a été déclarée « Détruite pour cause de défaut d’équilibrage ». A partir de ce point il n’est pas dur de prouver l’innocence de l’accusé dans cette affaire, quelqu’un de chez nous était de mèche pour faire échouer cette mission, et les compétences de Midnightknight ne peuvent donc pas être mises en question.
-Mais il a tout de même emmené à la mort une vingtaine d’hommes, ça ne peut pas être juste la faute d’une tour de défense tout de même !
-On peut supposer que si une personne de chez nous a fourni une ou plusieurs de ces tours, elle a aussi pu fournir des détails sur le déroulement de cette opération qui n’était pas classée des plus secrètes.
-Ce qui coïnciderait finalement avec mon rapport de l’époque, où j’insistais sur le fait que l’ennemi avait prévu de quoi ruiner toutes les procédures de mon plan d’attaque, jusqu'aux manœuvres de repli en cas d’urgence. Cela confirme bien qu’il y a un ou deux … ou plusieurs, traitres parmi vous et il est peut-être même dans cette salle
-Mama mia...
-Bé si y’avais pu mé douté dé ça ...
-Vous semblez bien au courant Midnight, avez-vous un nom ?
-Pas pour le moment non, mais si on me permet de revenir au sein de l’organisation, je me ferai un plaisir de débusquer les traîtres.

Vaugen allait protester quand son compère lui écrasa discrètement le pied pour qu’il fasse de même avec sa bouche. Un sourire de circonstance pour évacuer la tension qui venait de se créer quelques secondes, chacun s’était un peu plus découvert, la guerre froide qui rongeait la confrérie était sur le point de prendre fin, du moins c’est ce que je pensais.

-Dans ce cas je soutiens l’initiative de la maréchale et de Jushua, cette situation est intolérable et nous avons bien besoin d’hommes de valeurs dans nos rangs. Je suppose que personne ne s’opposera au retour de Midnight de toute façon.
-Et qu’en sera-t-il de mon poste ? Que l’on annule mon procès qui a été injuste est préjudiciable est une bonne chose, mais j’ai perdu mon poste, qui me tenait beaucoup à cœur, à la défense solaire. On s’est d’ailleurs empressé de me piquer le siège.

Ce devait être typiquement le genre de comportement que craignait Kitaï, son sourire s’effaça avec la même vélocité que l’incendie que je venais d’allumer, Emeline n’en menait pas large non plus d’ailleurs, seul les deux latinos semblaient savourer à sa juste valeur cette provocation.

-Je n’ai rien pris du tout, je n’ai fait qu’occuper le poste laissé vaquant par une personne aussi irresponsable qu’inefficace !
-Irresponsable ? Je croyais qu’on venait de me blanchir à l’instant. Quand à l’efficacité, tu as fait quoi pendant mon absence à part occuper mon siège ? Des bavures ? Ca ressemble à de l’incompétence.
-Incompétence… J’ai bien envie de te mettre une correction dans l’arène, voila ce que je te propose, on va combattre à l’arme blanche avec les règles communes dans l’arène d’évaluation, si tu gagnes, tu reprends ton poste, sinon tu bosses pour moi les dix prochaines années.
-Ca me va, même si je ne vois pas le rapport entre l’arène et la compétence à occuper ce poste …

J’ai peut-être fait une erreur de le traiter d’incapable, mais je ne regrette rien.

Ping paf ping paf pof
Le sac de frappe rempli de sciure volait avec aisance, heureusement qu’une chaîne le retenait au plafond de la salle d’entraînement et un élastique au sol sinon il aurait été percuter un mur depuis bien longtemps.

-Soixante kilos, petit joueur.
-C’était plus pour me défouler qu’autre chose, j’ai fini les évaluations, j’attends les résultats.
-C’était vraiment stupide Mid ce que t’as fait, t’aurais pas pu te tenir tranquille jusqu’au bout ?
-Je l’ai provoqué un petit coup pour qu’il sorte de ses gonds, c’était drôle, et puis je vais récupérer mon poste plus vite comme ça.
-Il va te tordre Mid, à l’arme blanche avec les règles communes ça signifie sans armure de glace, sans téléportation et sans Aménous Libert. On se bat avec les règles extrêmes nous, tu t’es fait avoir comme un bleu sur ce coup-là.
-La confiance règne …

Une feuille de rapport venait d’être affichée au panneau principal, le compte-rendu de la torture que j’avais subie toute la matinée, le classement des performances était encore à l’impression. Kitaï s’approcha un peu, curieux, et je le suivis pour commenter.

-Content de voir que tu ne t’es pas trop ramolli pendant tout ce temps, ça t’a même profité ce petit stage parmi les services secrets, le rapport du psy parle de quelqu’un de presque équilibré.
-On s’en fout du psy, tu lui dis ce qu’il veut entendre et il te met une bonne note. Par contre j’ai explosé le plafond en combat à l’arme blanche et en force brute, je vais en faire qu’une bouchée de Vaugen.
-C’est lui qui a le record de force Mid et t’as fait moins bien. Par contre c’est vrai que tu le bats à peut près partout ailleurs, mais connaissant sa façon de se battre et la tienne, tu ne vas pas tenir très longtemps.
-Tu plaisantes ? C’est pour me faire peur que tu dis ça ?
-C’était complètement stupide de provoquer Vaugen comme ça !
-C’est exactement ce que je lui disais.
-Oué c’est bon … Pas la peine d’en remettre une couche, de toute façon j’ai pas encore perdu, hein.

Pendant qu’Emmy jetait un œil sur mes résultats, la feuille de classement général était arrivée et ne me faisait pas de cadeau, j’étais classé 14ème au général toute compétences confondues, j’avais reculé de 9 places par rapport à avant mon départ, ça m’a fait un sacré choc.
Kitaï et Emmy occupaient toujours le haut du pavé, Lopez et Bigdrul à la 5 et 6 ème place, Vaugen à la 15ème, il allait être vert de rage, nul doute qu’il voudra me mettre une véritable rouste pour laver l’affront.

-C’est tout ! T’as prit des sacrées vacances dis donc !
-Grrr … Tu sais bien que je suis plus efficace en situation réelle qu’aux évaluations.
-Y a des limites tout de même, je ne sais pas si on va pouvoir t’envoyer en mission comme on l’avait prévu, avec un aussi mauvais rapport d’aptitude.

Elle avait toujours tendance à trop en attendre de moi, ça ne m’a donc pas spécialement choqué qu’elle soit mécontente, c’était comme ça depuis le jour où elle est passée devant moi à ce fichu classement général. D’un autre coté quand on regardait sa feuille, cela commençait à s’approcher sérieusement de l’excellence, nos machines toujours incapables de mesurer la quantité astronomique d’énergie qu’elle pouvait libérer en une attaque. Je ne pouvais pas m’empêcher de lui sourire, loin de me moquer d’elle, j’en étais très fier, même si elle ne l’a pas compris sur le moment et ça a encore aggravé mon cas.

Je pris congé de mes deux amis pour rejoindre une salle d’entraînement à l’arme blanche, Jushua m’y attendait, visiblement décidé à m’aider.
-Alors que comptes-tu faire ?
-Il va s’attendre à ce que je vienne avec une épée lourde, donc ce choix est déjà mauvais, en plus les épées à énergie sont interdites.
-Heureusement ! Vu comme vous vous portez dans le cœur, il y aurait au moins un mort si on les autorisait.
-Vous avez encore la paire de griffes de Scrame ?
-Je dois pouvoir les récupérer oui, tu comptes vraiment te battre avec ça ? Tu ne risques pas de te blesser ?
-C’est un peu comme se battre à main nue, il faut juste faire attention de ne pas s’entailler les hanches avec les lames de coude.
-C’est bien pour ça que je demande…
-J’ai deux jours pour les domestiquer non ?

Il haussa les sourcils d’un air sceptique avant de partir chercher ce que je lui avais demandé.

La dernière navette de Mars venait d'atterrir à la base terrienne du siège de la CdF, une autorisation spéciale avait été délivrée par Vaugen pour pouvoir assister au match.
La raison était surement qu'il voulait que ceux qui furent mes hommes viennent voir la déculottée qu'il espérait me mettre.

-Miiiiiiiiiiiiiiiiiid!
-Cheeeeeeeef!
- Oula du calme, et m'appelle pas chef comme ça, je pourrais avoir des problèmes.

C'était les 2 chefs d'escouades avec qui j'allais toujours en mission 8 ans plus tôt, ceux qui m'avaient par la force des choses accompagné dans cette mission tragique qui a valu ma destitution. S'ils ont survécu c'est bien parce qu'ils étaient restés en arrière pour suivre le déroulement de l'opé sur les moniteurs tactiques.

-Alors tu viens reprendre ton siège sur Mars? Tu vas lui mettre une volée au casque à boulon
-Faites attention chef il est pas très doué en combat mais il cogne sec, il a mis au tapis certains grands maréchaux en un seul coup
-Rahhhh, arrêtez de l'appeler casque a boulon on a plein d'Allemands ici et y a que 2 fruits pourris dans le tas! Pis je suis plus votre chef non plus!
-Pardon, c'est juste que je t'ai tellement entendu le dire …
-Pardon chef, mais vous allez bientôt redevenir notre chef de toute façon chef.
-…

Le temps de revenir dans l'arrière salle de l'arène pour me préparer au combat, enfiler les griffes de Scrame, 2 pièces d'excellente facture. Bien qu'elle ne soit pas particulièrement magique, cette paire de griffes prolongées par une longue lame dépassant des coudes, faite d'un alliage léger d'adamantium offrait une protection aux bras excellente et une liberté de mouvement des plus agréables. Malheureusement comme toute arme de ce type, la portée était un problème très épineux, n'offrant guerre plus d'allonge qu'à main nue, la rapidité était cruciale.

-Je te déconseille fortement toute armure à base de plate qui réduirait ta vitesse de déplacement et ta liberté de mouvement.
-Je comptais utiliser une maille ou un kevlar.
-Prends plutôt le kevlar alors, la maille ne te protégera pas s'il utilise une arme perçante ou contondante.
-Je le vois mal utiliser une lance…

Sur ces derniers mots je me mis en piste, avec mon kevlar et mes griffes, une foule s'était rassemblée dans les gradins autour de l'arène d'entrainement, séparée de nous par une épaisse vitre blindée qui ne laissait passer que le bruit atténué des hurlements de la foule.
Certains avaient fait des banderoles en mon honneur, c'était touchant. “Bon retour chez toi Mid“, “Fracasse le casque à boulon“ … Ahhhh, mes hommes… “Retourne chez toi assassin“, “on n'a pas besoin d'incompétents“, “mort au dictateur“.
C'était vraiment plaisant, parce que même si je me faisais insulter dans la plupart des banderoles et me faisait huer par une bonne partie de la foule, il n'y avait strictement aucun égard pour Vaugen, preuve de sa transparence à mon poste pendant ces 8 ans.

Bon et alors ? Tu te fais déboîter oui ?
La suite, la suite !

Eh du calme, j'ai plein de textes a ecrire moi en ce moment, c'est de l'esclavagisme a ce niveau deubord