Legends of Olympia : La Ballade des Mémoires - Le corbeau et l'elfe
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Le corbeau et l'elfe
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Dernière réponse le 21/11/2011 à 18:21

el Par Amhand  le 30/12/2010 à 16:00

Prologue

Certaines histoires sont transmises de générations en générations et seront contées jusqu’à la fin des âges, d’autres peuplent les ouvrages des les plus grandes bibliothèques d’Olympia. Certaines sont écrites pour être lues, d’autres pour simplement soulager leurs auteurs. Celle-ci se place en toute modestie dans la catégorie de celles qui n’ont que l’importance que l’on veut bien lui accorder. Beaucoup d’entres vous refermeront ces pages à la fin même de cette phrase tant les mots de l’auteur sont dénués de sens et bien mal appropriés.

L’histoire commence donc. Notez qu’il est bien précisé histoire et non Histoire, car l’on dit bien souvent que l’Histoire bégaye, et nul ici ne souhaiterait se retrouver avec un tas de lignes revisité par un quelconque auteur mégalo ajoutant sa petite touche personnelle à un évènement qu’il n’a de toute façon pas vécu. Vous suivez ? Bien…

Il y a quelques temps de cela, dans l’immense forêt qui entoure la cité elfique vivait un peuple vouant un culte sans failles à des êtres appelés totems. Parmi cerfs, loups, faucons et autres animaux de la forêt, l’on pouvait trouver un clan un peu plus en retrait, celui des corbeaux. Connu pour sa sagesse et son habileté au maniement de la magie, la réputation de ces derniers souffrait cependant du malheureux rôle qui leur été assigné, l’annonce de présages. Qui rêverait en effet d’entendre de la bouche d’un inconnu qu’un terrible accident de liane causera la mort de son tendre époux à la prochaine saison? Fort heureusement, les Corbeaux ne s’adonnaient jamais à ce genre de présages et réservaient leurs facultés à de bien plus grandes causes. Si bien qu’il ne faisait jamais bon de les voir se rassembler ni convoquer les intendants des autres clans.

Depuis la période de bataille entre les deux empires, le clan de l’oiseau à plumes noirs se fait plus discret. Le rapprochement des différents peuples forestiers avait plongé les sages Corbeaux dans un mutisme profond et paradoxalement lourd de sens. La méfiance cultivée depuis des années envers les nobles de Na’helli se faisait aujourd’hui plus que jamais sentir.

Amhand était l’un d’entre eux et bien qu’il soit en accord avec la prudence de son clan, cela ne l’empêchait pas pour autant de circuler depuis peu dans les ruelles de Na’helli. Au milieu de nobles et sauvages vaquait donc cet elfe des lunes à ses diverses occupations. Le rôle d’Edoniel Corbeau n’était pas aisé, et la route menant à la voie d’Ashka était longue et parsemée d’embûches. Amhand le savait, mais c’est déterminé et plein de volonté qu’il tentait à présent seul de suivre la voie de ses ancêtres. Plongé tantôt dans les ouvrages poussiéreux relatant l’histoire de son clan, tantôt à l’université de magie pour apprendre les moindres spécificités des malédictions, il ne chômait pas et ne passait que très peu de temps à dormir. Tant d’acharnement à l’ouvrage et si peu de sommeil lui avait forgé un visage dur, creusé par les cernes et les rides que peu appréciait à regarder. Rapidement, l’elfe des lunes troqua ses vêtements contre tissus et manteaux noirs masquant ainsi son dos courbé et ses cheveux grisonnants. S’il était bien loin des connaissances et de la sagesse des chamans, il en avait pour autant toute l’allure. La raison à ce profond changement n’était autre que son Finye et la croyance profonde qu’il avait en son totem. C’est pourquoi le plus clair de son temps, Amhand le passait au milieu de la nature à la recherche du moindre signe pouvant le guider. Pour le moment, ces signes étaient pour lui fort incompréhensibles du fait de sa jeunesse, mais les cauchemars annonciateurs rongeaient déjà ses nuits.

Cassé de sa journée passée à réciter la bénédiction fraîchement apprise, Amhand se posa une fois de plus à l’endroit où les siens se retrouvaient autrefois. Après avoir posé ses affaires contre la souche recouverte de mousse qui ornait les lieux, il s’allongea, s’enroula dans son manteau et ferma les yeux. Sans qu’il n’en comprenne une fois de plus la raison, sa nuit ne fût parsemée que de corbeaux et d’horreur…



el Par Amhand  le 31/12/2010 à 10:32

Chapitre I : Ab oculis

L’astre du jour se levait à peine que déjà les premiers rayons perçaient l’épais feuillage pour réveiller la forêt assoupie. Sur les feuilles des arbres perlaient mille et une gouttes de rosée, dans les branchages les oisillons criaient famine tandis que leurs mères s’activaient à la recherche d’insectes, et au beau milieu de la clairière dormait toujours l’elfe des lunes. Parmi les branchages, un écureuil bien peu habile courrait gaiement à la recherche d’un quelconque met pouvant satisfaire son appétit. Après quelques tours et détours, son regard vînt à se poser sur une noisette desséchée. S’empressant maladroitement de l’attraper, il ne pût éviter la chute de son petit déjeuner. Dans un élan de courage et tiraillé par la faim, il tenta dans un dernier espoir de la rattraper en plongeant dans le vide…

Amhand ouvrit les yeux après une nuit moins mouvementée qu’à l’accoutumé. Encore allongé près de la souche, il profita du calme environnant pour s’étirer. Depuis quelques temps maintenant, son dos le faisait souffrir et bien que ces quelques exercices n’avaient guère d’effet, l’elfe s’y tenait rigoureusement. Après ces instants d’effort, Amhand ferma les yeux une dernière fois et pris une profonde respiration…

La noisette était la, tout près, plongeant vers le sol à une allure folle. Il la rattraperait, il le fallait, pensait l’écureuil affamé en passant à une position plus verticale. Tous deux prenaient de la vitesse tandis que l’impact approchait à grands pas. Puis, dans son interminable descente, l’animal vit en dessus de lui un corps bouger, s’étirer. Qu’est-ce donc que cette masse noire qui bouge ? On dirait que c’est vivant ce truc là ?!

Le choc fût inévitable.

« Poc » fît la noisette sur le front d’Amhand et « Vrlaaan » fît l’écureuil qui suivit…


Qu’est-ce que … ?!

Le rongeur, posé sur le sombre manteau ne prît guère le temps de penser à autre chose qu’à s’enfuir, laissant à l’elfe son maigre repas.

Voila une journée qui commence bien ! bougonna Amhand.

Prudemment, il leva les yeux au ciel, vérifiant ainsi qu’aucune autre créature n’avait décidé de choir sur sa carcasse fatiguée. Il se redressa ensuite difficilement, prenant appui sur le bout de bois biscornu lui servant de canne. Il jeta un coup d’œil rapide aux alentours. La journée devrait être belle se dit-il. A peine eût-il pensé ces mots qu’une nuée de corbeau vînt assombrir le paysage, masquant le moindre rayon de soleil et plongeant l’elfe des lunes dans la pénombre la plus totale. Amhand n’aurait pu les compter tant leur nombre était important. L’elfe ne pouvait plus distinguer qu’un épais voile noir tout autour de lui. Prît d’angoisse, il chercha à s’en libérer, mais qu’importe où il se déplaçait, les corbeaux le suivait et tout n’était qu’obscurité. Son rythme cardiaque augmenta rapidement si bien que la sueur commença à apparaître sur son front. L’air commença à manquer et l’elfe suffoqua avant de tomber brutalement sur le sol.

Au beau milieu de la clairière et en plein milieu de la nuit se réveilla un elfe des lunes bien angoissé, au regard livide et transpirant la peur. Ce n’était qu’un simple cauchemar de plus, certes, mais en ouvrant les yeux, Amhand en avait pour la première fois compris la signification. Ce soir là, la lune éclairait la forêt de sa douce lumière, mais l’elfe n’arrivait pas à discerner la moindre forme convenablement. Le contour de chaque objet, la moindre ligne était devenue floue.

Le Corbeau en avait décidé ainsi, il lui faudrait voir … en se passant de ses yeux.



geant Par Vrugar  le 01/01/2011 à 14:50

HRP : J'aime ! En plus le rythme laisse espérer la suite rapidement !



el Par Amhand  le 04/01/2011 à 12:23

Chapitre 2 : Lustitia

Voila plusieurs heures à présent qu’Amhand gisait là au beau milieu de la clairière. Sur ses joues coulaient inlassablement des larmes. Bien que le fait d’avoir reçu un signe de son totem réchauffait son cœur, l’idée de ne pouvoir jouir à nouveau de l’usage de ses yeux l’effrayait au plus haut point. Qui pourrait lui en vouloir ? Olympia est peuplé de merveilles qu’il est si agréable de contempler et Na’helli regorge d’elfes dont la beauté n’a d’égale que les plus belles fleurs de la forêt. Comment se passer d’un magnifique couché d’astre à la tombé de la nuit ? D’un ciel noir gorgé d’étoiles brillantes une soirée de l’Engourdissement ? L’elfe des lunes n’arrivait pas à se faire une raison tant la tâche semblait ardue à ses yeux.

A sa tristesse vînt ensuite se mêler un sentiment d’injustice. « Pourquoi moi ? Qu’ai-je fait pour mériter cela ? » sont tant autant de pensées qui ont traversé son esprit tout ce temps durant. Certes, Amhand aurait du être fier, il le savait, mais il ne se sentait pas capable d’assumer une telle tâche. Prît un instant par la folie, l’elfe se releva brusquement, ouvrit les bras vers le ciel et hurla :


Que veux tu de moi Corbeau ? Qu’ai-je donc fait pour mériter un tel châtiment ?

Sa voix résonnait dans toute la forêt, mais Amhand ne décolérait pas…

Co … Comment vais-je apprendre dans les livres sans voir ? Hein ? Explique moi ! Comment vais-je devenir digne d’être un membre de ton clan ? Je … Je ne suis pas PRET !

Les genoux d’Amhand plièrent sous le poids de son chagrin et l’elfe se mît à quatre pattes, cherchant tout autour de lui sa besace. Quand il la trouva enfin, il se hâta d’en sortir le fin miroir qui s’y trouvait. Il ne savait vraiment s’il voulait voir le visage qu’il allait y découvrir. Plus le temps passait et plus les formes autour de lui devenaient de simples tâches difformes et fades. Ce qu’il voyait autour de lui était à présent noirâtre et sans la moindre saveur. Il lui fallait voir une dernière fois ce visage que jamais il ne pourrait à nouveau contempler. Lentement il tourna le miroir dans sa direction et posa son regard sur l’objet à la recherche de son propre reflet. Il ne réussit à discerner véritablement son visage, mais il pu constater que ses yeux s’étaient garnis d’un fin voile blanc…

L’astre était à présent bien haut dans le ciel en cette journée et les rayons de lumière aveuglaient de plus en plus l’elfe des lunes. Après la danse macabre des formes indiscernables venait maintenant celle de l’épais rideau blanc. La colère s’estompait, mais la souffrance grandissait en lui et c’est donc le bras cachant ses yeux qu’Amhand tentait maladroitement de rassembler ses quelques affaires. Soudain, dans les branchages alentours, un croassement se fît entendre. Les oreilles d’Amhand se dressèrent, à l’affût du moindre indice de la provenance de ce bruit animal. Après le cri de l’oiseau aux plumes noirs, c’est un battement d’ailes que l’elfe pu discerner, l’oiseau approchait. Amhand tourna sur lui-même, dans un sens puis dans l’autre.


Où es-tu ? dit-il d’une voix désespérée.

L’oiseau vînt se poser sur son épaule, lentement. Tandis qu’Amhand, d’un geste peu assuré tenta de caresser l’animal, celui-ci croassa. De son sombre bec, il déposa un bande de tissu dans la paume de l’elfe et s’enfuit.

Amhand avait une fois de plus compris la signification de l’évènement, et après avoir respiré profondément, banda ses yeux pour se plonger à jamais dans l’obscurité la plus totale…



el Par Amhand  le 20/11/2011 à 21:59

Chapitre 3 : Nox obscura

« - AMHAAAAND ! »

Le cri soudain arracha l’Elfe des Lunes de son sommeil. Depuis plusieurs lunes, la même voix stridente venait perturber les nuits d’un être à bout. Si les nuits ne lui laissaient ainsi pas le moindre répit, les journées passées à tituber dans les profondeurs de la Forêt des Cendres n’en apportaient guère plus. La disparition subite d’un compagnon devenu indispensable transformait chaque lever de l’astre d’Olympia en nouvelle épreuve. L’expérience mystique vécue lors du passage des tourmentes avait apporté un peu de lueur dans l’esprit du Corbeau et avait éclairé son chemin. Cependant, si l’épais brouillard se trouvait à présent accompagné de quelques formes colorées, jamais la lueur n’avait été si intense que lors de l’apparition de son totem. Jour après jour, Amhand apprenait à reconnaître chaque élément composant la forêt de son clan. Petit à petit les fleurs se transformèrent en longs filaments roses, l’herbe et la mousse ornant le sol en un doux tapis luisant. De temps à autre, lorsqu’un oiseau fendait le ciel, le Corbeau discernait une minuscule boule jaune naviguant avec grâce…

D’un geste rageur, il enfonça sa tête dans la besace qui lui servait d'oreiller. Ramenant, tel un enfant, ses genoux près de son torse, il ferma les yeux plus profondément encore jusqu’à sentir ses tempes marteler son crâne d’une mécanique précise et destructrice.

L’oiseau noir n’avait pas donné de nouvelles depuis l’évènement qui avait failli lui coûter la vie. Ni lui, ni les siens. Ses compagnons d’aventure, les cerfs, les faucons et les loups semblaient avoir fort à faire. Les affaires internes des Forestiers lui étaient inconnues depuis bien longtemps.

Pourquoi un tel besoin de solitude ? Jamais, l’Elfe des Lunes n’avait cherché à comprendre.

La nuit, claire et parsemée d’étoiles invisibles, était silencieuse. La pluie qui avait martelé la cime des arbres toute la journée s’était calmée. Basculant sur le dos, il expira profondément et passa ses mains sa tête.


« - Les choses ne peuvent plus durer ainsi… »

A nouveau, l’elfe s’endormit, ses yeux se fermèrent et les pastels s’estompèrent.

« - AMHAAAAND ! »



el Par Amhand  le 21/11/2011 à 18:21

Là où les corbeaux se rejoignent pour mourir…

« Un, je suis un nain,

Deux, je suis hideux,

Trois, personne n’me voit,

Quatre … Blurblurbblrr »

Après une dure nuit, la toilette matinale offrait l’once de repos tout être avait besoin pour démarrer sa journée. Le niveau du ruisseau dans lequel l’elfe plongeait ses mains avait fort monté depuis quelques jours, et si les longues journées de pluie y étaient certainement pour quelque chose, Amhand se plut à noter l’insignifiant détail.

« - Les gens ne réfléchissent plus, ils ne s’émerveillent plus de rien, commenta-t-il en haussant les épaules de dédain. Comme si tout était évident, est que chaque merveille de ce monde leur était due. »

Après cet interlude hautement philosophique, d’un geste mal assuré, il se dressa sur ses deux longues jambes et retourna en direction de la souche qui lui faisait office de compagnon depuis des semaines.

Le jour venait à peine de commencer, et la brume qui envahissait les lieux donnait aux bois une atmosphère inquiétante et lugubre. Mais quelle différence pour un aveugle ?

Les premiers êtres de la forêt sortaient de leurs nids, à la recherche, sans doute, d’un maigre festin pour satisfaire la faim qui les tiraillent. Hélas, les temps sont durs, et rien ne laissait penser que cette journée serait différente des précédentes. Amhand se contenta de quelques racines et de fruits séchés, trouvés dans le fond de sa besace, et dégusta le tout en silence. Si le silence est d’or, c’est bien d’un peu parole d’argent dont l’elfe des lunes aurait besoin. Ou un simple mot, qu’importe tant qu’un signe des siens ramenait son corps meurtri par la solitude à un semblant de vie.

Voilà longtemps que les corbeaux n’ont pas réapparu à la lumière du jour, ni même dans l’ombre de la nuit et, jour après jour, Amhand perdait de plus en plus espoir.

D’un geste mécanique et désabusé, il approcha ses mains l’une de l’autre, murmura quelques paroles anciennes et fit apparaitre une boule lumineuse. A quoi cela rimait-il ? Depuis des jours, des nuits, des semaines et des mois, il répétait sans cesses les mêmes incantations, en vain.


« - Un jour ils referont surface. Tu parles ! Quelles foutaises ! Les Corbeaux sont morts, MORTS. Que dites-vous de cela Elfe des Lunes ? Les mots vous choquent ? M O R T S, disparus, perdus, exilés, décédés, effacés, volatilisés,… »

La lueur commença à s’estomper au fur et à mesure que les mots sortaient de sa bouche et disparu. Dans un geste rempli de désespoir, il plongea la tête dans la paume de ses mains en sanglotant…

L’elfe des Lunes ne vit ni le ciel s’assombrir, ni n’entendit la nuée de corbeaux se poser brutalement à ses côtés. D’une mousse verdâtre, le sol de la minuscule clairière se transforma en sinistre marée noire…