A l'aventure compagnon ! Je suis parti vers l'horizon. | |
Topic visité 6055 fois Dernière réponse le 06/08/2009 à 19:24 |
![]() |
Une odeur âcre de cendres emplissait l'air frais et vivifiant du matin. Les quelques grands feux qui jalonnaient le campement mouraient lentement pendant que chacun prenait conscience de ceux qui l'entouraient. Suspicieux, tous sursautaient à chaque pigne de pin qui explosait dans les braseros ou chaque mouvement que les ombres d'une aube naissante rendaient menaçant.
Olympiens, Géants, Nains, Elfes et Hommes-sauvages se réveillaient côte à côte après leur enrôlement volontaire dans les armées d'Arès... moment unique et irréel où chacun porte la main sur le ridicule bâton et les quelques morceaux de tissu rapiécés pendant que le regard prend conscience du nombre d'adversaires... 10, 20, 50....100. Atsarias, dos aux braises encore chaudes, arracha un bout d'étoffe, l'enroula autour d'un bout de bois et alluma la torche ainsi confectionnée. Il était de partir à la recherche de ses compagnons d'infortune et de les trouver vite, avant que les plus belliqueux des bestiaux du coin ne recouvrent complètement leurs esprits. Déjà, quelques hommes-sauvages montraint les crocs. Atsarias rêvait d'une vie nouvelle, d'un grand destin, de faire quelque chose de ses dix doigts et de ses aptitudes. Il n'était pas un farouche guerrier, ni un thaumaturge érudit... par contre il savait cuisiner. Eclairant les visages bouffis de sommeil à la recherche de ses amis, il se remémorait les paroles de son maître : "Tu vois petit, dans la vie, l'important, c'est la bonne bouffe. Et pour bien manger, il te faut les bons ingrédients. Mais attention tidiou, la confiance est une denrée rare, alors ma barbaque et mes p'tits oignons, j'préfère aller les chasser moi-même. Té, j'te présente "Couic", c'est mon ustensile de travail, un bon coup entre les deux yeux et c'est bombance ce soir. Petit détail, à jeûn, j'suis d'humeur exécrable alors amène les croissants si tu veux m'causer." Son entraînement avait été des plus intensifs et des plus poussés. Chaque matin que Zeus faisait, il courrait acheter les croissants de son mentor, puis nettoyait la salle de banquet et les cuisines pour que le maître puisse oeuvrer. Dix ans de ce régime, et il savait courir et récurer à la perfection. Il était maintenant temps de voir le monde et, un matin où les croissants encore chauds lui brûlaient les mains, il tomba sur deux affichettes. L'une parlait d'une jeune compagnie de mercenaires qui recrutait : amour, gloire et opulence... un vaste programme pour peu qu'on veuille affronter les foudres d'Arès et de sa guerre éternelle. L'autre, haute en couleur vantait la bravoure de ceux qui allaient affronter les tests de l'Arène et s'oindre de la reconnaissance des Dieux. Bon, d'abord, je trouve des compagnons, et ensuite la bravoure et le bain de reconnaissance. Et là, pour la première fois depuis dix longues années, le maître n'eut pas ses croissants... et pour la première fois depuis ces mêmes dix longues années, Atsarias les mangea. Un four, fe ferai cuifinier et fe ferai foi-même mes croiffants |
![]() |
HRP: Très bon début! Ecriture souple, amusante, ça glisse et ce n'est pas "lourd". Du bon vocabulaire, rien de trop pédant, c'est facile à lire mais c'est écrit correctement.
Bonus l'histoire semble drôle^^ à voir ce que ça donne par la suite. |
![]() |
hrp : c'est vrai que c'est sympas à lire !! on veut une suite ![]() |
![]() |
Arborant un sourire radieux et la bouche encore pleine, Atsarias essuya ses lèvres sur son tablier de marmiton défraîchi, le roula en boule et contempla hésitant sa seule et unique possession. Puis, avisant un recoin d’ombre où s’accumulent les immondices qui attendent le bon vouloir des cochons et autres prédateurs urbains, il dit d’une voix forte à tous les courants d’air qui peuplaient la rue à cette heure matinale : Je le tire ou je le pointe ? Jambe levée et bras en arrière, d’un grand mouvement libérateur digne d’un sport qui n’existait pas sur Olympia, il lança le tablier… et détala quand vociférant le tas de déchets se redressa et lui rebalança le tablier en pleine poire.
Sa course effrénée l’amena devant le débit de boissons local, l’antre de tous les vices, la taverne d’Emett Rekanterre le brasseur. La réputation de son boui-boui n’était plus à faire, sa clientèle n’était constitué que de poivrots et d’aventuriers, ce qui était la même chose la plupart du temps, le tout juste éclairé par quelques bougies rachitiques qui éclairaient le comptoir crasseux. Prenant son courage à deux mains, il passa son tablier dans le dos comme une cape pour faire bonne impression auprès de ses futurs compagnons d’armes (merci la pénombre), poussa les portes de la gargote, déglutit péniblement en sentant les remugles chargés d’alcool bon marché, de vomi et d’urines et se dirigea vers la seule table occupée. Un géant assoupi contre le mur faisait tomber le plâtre du plafond à chacun de ses ronflements, un nain s’amusait à couper les mouches en deux avec une minuscule hache ponctuant chaque victoire par l’éclusage de sa chope, et quatre olympiens, deux hommes et deux dames conversaient aimablement devant des biscuits et des tasses qui visiblement ne venaient pas de la même planète que les gobelets crasseux du tenancier. Atsarias se retint de saluer la bande d’un grand « Salut la compagnie, j’suis votre nouveau meilleur ami ! et pensa aux ténébreux olympiens, héros des chansons et récits que colportaient les troubadours. Il inspira profondément, fit voler son tablier-cape d’un geste ample et prenant appui sur un pilier s’adressa à la tablée : Mesdames… , messieurs…, autres… (aïe, comment on parle à un nain et un géant, c’est mal barré, j’sens le regard vitreux du p’tit teigneux qui fait des aller-retours entre sa hache et mes guiboles) Permettez-moi de m’introduire (ben voyons, maintenant c’est les donzelles qui me regardent avec des yeux ronds comme les soucoupes de leur service à thé ) Sire Atsarias de … (vite trouve quelque chose) … Croissant… (NOOOON !!! crétin).. tès. Sire Atsarias de Croissantès, je suis ravi de faire votre connaissance. (là, souris pour les dames… pas autant tu leur fais peur maintenant) Puis-je m’asseoir ? |
![]() |
Quatre paires d’yeux ambrés et une paire d’yeux avinés dardèrent sur Atsarias un regard pénétrant. Enfin, seuls huit yeux étaient pénétrants, les 2 derniers en étaient encore au stade de savoir si son interlocuteur appartenait au monde réel ou à celui des éléphants roses (c’est qu’ça peut être sournois comme bestiole).
Alors que l’air vicié du bouge sordide s’épaississait et que les fumées grasses des grillades du patron s’enroulaient autour des tasses crasseuses (mon dieu, mais quel animal peut puer autant en rôtissant, un troll constipé ?), le mâle dominant de la bande prit la parole : Que diantre ce pétrousquin nous veut-il ? Mes mies, je requiers votre assentiment de séant mettre au ban ce troublion. De votre verbe je suis l’indéfectible laquais, un mot et j’éconduis ce camouflet et le soustrais de ce plaisant estaminet. (Merdouille, j’ai oublié mon dictionnaire encyclopédique en treize volumes du noble olympien dans ma mansarde au dessus des cuisines du maître. J’savais bien que j’aurais dû lui voler une brouette pour l’emporter avec moi. J’aurais pu traduire sa phrase en moins d’une heure. Réfléchis ! T’as reconnu quels mots ? Mie, c’est le pain, ça je sais. Séant, c’est le mot des aristocrates pour le cul. Laquais, ça doit s’adresser au nain. Mouflet, c’est un gosse, y a peut-être quelque chose de caché sous la table. Minet, ça doit être son compagnon enfariné…. Il a traduit aux autres que je voulais m’asseoir ? Bon, ça m’avance pas. Réfléchis ! Dis quelque chose ! Oui ou non, t’as une chance sur deux) Oui ? Atsarias aurait bien chipé la hachette du nain pour taillader dans l’air lourd qui pesait de plus en plus sur ses épaules. Enfin, une personne autour de cette tablée dit une chose compréhensible. Le nain pointa sa chope environ dans sa direction à deux ou trois mètres près et beugla : Toi ! Dégage ! puis au géant assoupi Toi !... euh, continue ! et enfin en direction des olympiens Toi ! Ta gueule, ça m’file un mal de crâne farmi.. farani… terrible chaque fois qu’t’ouvre ton bec. Le nain ayant martelé chacune de ses syllabes d’un coup de hachette sur la table, faisant voler échardes et poussières autour de lui, Atsarias jugea bon de s’éclipser. Trois pas à reculons, une majestueuse volte-face, quatre dignes enjambées, et l’air matinal des ruelles l’enveloppa de sa fraîche douceur. Bondiou qu’c’est dur la vie d’apprenti aventurier. |
![]() |
HRP : excellent ^^. Enchanteresses sont les aventures de ce p'tit cuisinier ![]() |
![]() |
Atsarias passa sa première journée de liberté à flâner dans les rues de Lardanium, tout en évitant consciencieusement les quartiers des artisans et tous les gens qui pouvaient le reconnaître. Il détournait le regard à chaque fois qu’il croisait un garde ou un paladin, se voyant déjà devant les tribunaux couvert d’opprobre pour désertion.
Ce soir-là, Atsarias dormit à la belle étoile. Cela faisait belle lurette qu’il n’avait partagé sa couche avec les courants d’air, le froid et les criquets. Emmitouflé dans ses quelques oripeaux, il contemplait le croissant de la lune, sa glaciale compagne de toujours. Tidiou ! Dans quel pétrin j’suis pas allé m’fourrer. J’avais un toit sous lequel je pouvais garer mes miches au chaud, un boulot pas folichon parce qu’fallait marcher à la baguette mais j’faisais mon beurre, presqu’un avenir j’arrivais même à m’empâter et à prendre de la brioche. Mais non, Môssieur n’était pas heureux. Môssieur voulait de l’aventure, Môssieur voulait se prendre pour un dur à cuire et croyait connaître toutes les ficelles du métier. Alors, on fait moins l’malin à s’geler le derche dans l’caniveau ? L’aventure, c’est toujours extra ? À l’approche du petit matin, le sommeil pourtant si proche le fuyait toujours et le froid se faisait plus vif. Déjà les premières lueurs de l’aube teintaient le ciel d’un bleu grisâtre estompant la lumière des astres nocturnes. La grisaille devant lui s’assombrit soudain, mais la fatigue l’emportant si la curiosité, il ne releva pas sa tête dodelinante… Un énorme éclair métallique fendit l’air à quelques centimètres de son visage, suivi d’un choc sourd et d’une pluie de plâtre et de gravillons, une hache venait de se planter dans le mur à quelques pouces de son oreille droite. La peur au ventre, le cœur en train de prendre ses petites jambes pour sortir de sa cage thoracique, Atsarias se retrouva immédiatement sur ses deux jambes. Il entendit alors une voix grave et familière : Tu vois, j’t’lavais bien dit, il dort pas. Devant lui, se tenait deux des aventuriers rencontrés la veille, le nain fier de lui et l’olympien à la cape blanche. Moui, je vous le concède avec grâce, voisin, ce pétrousquin ne faisoit que feindre l’indifférence afin d’endormir notre vigilante prudence. Votre entrée en scène bien que grossière n’en est pas moins franche et je suis sûr que notre allocutaire est tout ouï dorénavant. Cher ragotin, je vous serais gré de nourrir la causerie avec notre rustique cousin, tantôt il m’avait semblé un tantinet nigaud. Le nain fronçait les sourcils, montre d’une grande concentration pour extraire la substantifique moelle de tout ce cancan pédant, puis avisa un Atsarias blanc comme un linge et au bord de l’apoplexie. ’Lut. L’autre a réfléchi et moi j’ai dessoûlé un chouia. On r’cherche justement quelqu’un dans ton genre pour nous filer un coup d’main, c’est pile-poil dans tes cordes. Donc, dès qu’t’as fini ta causette avec le tas d’ordures sur l’quel tu roupillais et qu’tu t’es rpoudré le nez pour pas faire fuir les dames, on pourra s’y mettre. On t’attendra à la porte nord, de l’autre côté des douves. Son musculeux bras couvert de poils s’abattit vers Atsarias qui se fit tapisserie et termina sa course sur le manche de sa hache qu’il arracha sans effort. Fais pas attendre les dames, ça m’ennuierait presque de revenir te chercher. Atsarias regarda interloqué ses deux nouveaux amis se diriger tranquillement vers les quartiers nord de la ville. Son cœur hypertrophié par sa frayeur récente était maintenant plein d’entrain et de chaleur. Quand même, l’Aventure, c’est pas d’la tarte. |