Maladie | |
Topic visité 420 fois Dernière réponse le 30/07/2011 à 02:24 |
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Disparue.
Je n'ai plus cette petite voix dans ma tête. Je n'ai plus cette petite voix dans ma tête. Celle qui me disait quoi faire, celle qui résonnait dans mon crâne parfois et qui me faisait prendre conscience de ce que je faisais. Je n'ai plus ce petit rien qui me rappelait à la réalité lorsque je m'en évadai. Non, je n’ai plus tout cela, cette maladie l'a tué. A moins qu’elle soit morte quelques temps avant, cette petite partie de moi. Clouée au lit pendant des jours, je toussais sans arrêt. Mes poumons me brûlaient. A chaque inspiration, je me tordais de douleur. D’un geste fébrile je me souviens remonter vers moi ces draps humides pour me protéger de je ne savais quoi, de la chaleur ou du froid, du vent, du bruit ou du silence. Je grelotais à tout moment de la journée. Les terribles maux qui m'accablaient m'accordaient parfois un moment de répit, avant de me maudire de plus belle. Aujourd'hui encore, la maladie a laissé des marques. Je crois que ces cernes profondes et creusées ne s'effaceront jamais. Elles resteront et m'accompagneront jusqu’à la fin. De jour en jour le travail, les dossiers s'accumulaient, et même si, inlassablement, je les traitais toujours plus venaient. Cela n’en finissait pas. Les médecins m’ont diagnostiqué un mal étrange. Ils m'expliquèrent qu’il avait du être apporté sur nos terres par ces étrangers. Pendant des heures, j’ai marmonné contre le destin, contre leur venue. Oiseaux de mauvais augures, ces rebelles qui apportaient avec eux leur mal. Pourtant petit à petit je me suis remise. Maintenant, tout est bien. Mon esprit est clair. Plus aucun frisson ne vient troubler mes pensées. Tout est simple. Je me tiens aussi droite que possible. La maladie a achevé cette petite partie de moi qui résonnait dans mon crâne parfois. Et libérée, je me sens enfin à ma place. Je ne suis plus gênée par ces « Madame la Juge ». Pas non plus gênée par ces vouvoiements. Je l’ai remarqué. Plus personne ne me tutoie, et ceux qui le feraient encore ne sont pas là. Je n’ai pas le temps pour ça. Je regarde au dehors. Les gouttes s’écrasent avec force et fracas sur le sol. Leur mélodie me vrille les tympans. Je les ignore. Quelques fois, je ressens encore quelque moment de faiblesse. Je fais quelques pas. Suffisamment pour rejoindre mon fauteuil et mon bureau. J’expire longuement. Je me sens bien. On frappe. _ Entrez. _ Madame ? _ Oui. _ Les résultats ont été donnés. Raksha est le nouveau conseiller. Je le congédie. J’ai à penser. Appuyée sur le dossier, je souffle un instant. Un léger malaise. Mon ventre m’inflige une sévère douleur et je grimace. Commençons au début. Je convoque un des Sentinelles. Mes mots me semblent dur et pourtant, je les entends témoigner de ma justesse. _ J’ai reçu des rapports désagréables. La loi doit être respectée à la lettre. Les bannis n’ont aucun droit de séjour sur notre territoire. Vous la connaissez comme moi. _ Que voulez vous dire ? Je plonge mes yeux dans les siens. Cela m’effraie. Que sont devenus les Sentinelles. Cette question me colle à la bouche, mais elle ne sort pas. _ Le banni Miskayris doit être exécuté. Immédiatement. _ Ah… _ Partez maintenant. _ Oui Madame. Il tourne les talons et referme la porte derrière lui. Il n’y a plus cette petite voix qui me dit de ne pas m’énerver, alors je me laisse aller. Mais toujours dans cette enveloppe dignité qui me maintient droite. Depuis qu’Eladar est à leur tête, plus rien ne va. Je le connais pourtant. C’est une bonne personne. Un bon combattant, un ami. Mais le constat se fait devant mes yeux. Je ne voulais pas l’admettre, pourtant je ne peux m’y refuser. Depuis que les nobles ont abandonné cette faction, celle-ci périt. Je soupire. Ces elfes là ne sont pas fait pour diriger, voilà tout. Un instant je pense à Aileen. Je pense à nos voyages. A l’époque, nous étions insouciantes. Nous avions même voyagé avec Piz, ce drôle de lutin ! Cela me semble si loin maintenant. Comme si une éternité avait passé depuis. Avec regret, je me remémore tout cela. J’ai grandi depuis. Je crois. Le poids des responsabilités, je le connais un peu mieux. Vous savez, il y a tant et tant de choses qui me regardent maintenant ? Je veux dire… Tant de chose que je pense porter à bout de bras. Et quand j’y repense, combien de temps depuis la dernière fois où j’ai entrevu un visage familier ? Longtemps… Non. Pas tant que ça. Ambre était là l’autre jour, avec le chien. Mais cela n’empêche rien, je me sens si seule, avec pour toute compagnie ces piles de parchemins. Plus aucune lettre ne me parvient à mon nom, à mon intention, à moi, Syi Az’lissüe. Toutes, elles commencent gravement par ces mots durs: Juge Syi. Ne suis-je donc qu’une fonction ? Qu’un titre qu’on attribue à un elfe pour qu’il l’incarne jusqu’à s’oublier lui-même ? Je jette un regard sur les grosses gouttes qui martèlent le pavé, dehors. La saison des pluies s’éternisent. Chaque jour je souhaite le retour du printemps. Et je souhaite aussi pouvoir revoir ce Prince Olympien, sa noblesse m’inspire, et me tenant droite, fière, je pense à lui. Je le sais pourtant. Si je ne prends pas garde, si je laisse les choses se faire, alors je perdrai tout. Non, je n’ai pas de voile pour me cacher la vérité. Les tensions existent. On conteste mon autorité, il me faudra être irréprochable dorénavant. Et pourtant, les temps qui arrivent semblent bien sombre. Fernliae a un nouveau Conseil et nos rapports ne vont pas tarder à se désagréger. Ce qui arrive à l’Empire va nous saisir aussi. Mais qu’importe. Je refuse de me cantonner à ma simple fonction. Je ne suis pas un simple statut social et nul doute que j’ai un rôle à jouer, car ne se souvient-on pas de ceux qui ont agi ? Ce sera peut-être pour la première fois la gloire, pour moi et les miens. Mon père est venu me voir l’autre jour, et nul doute qu’il était honoré de ma réussite. Ne pas décevoir, c’est ce qui me motive, je le sens. Les vagues maintenant sont hautes. De leurs remous elles semblent ébranler le cœur même d’Olympia. Les éléments, me dit-on sont en furie. La terre s’ouvre sans explication, preuve que des temps difficiles approchent. C’est pour moi un présage certain. Et je le sens chaque jour, ces atteintes à notre dignité. Qui sont-ils pour venir fouler nos terres ces géants barbares ? Qui sont-ils donc à part la plaie de nos peuples, ces guerriers à la petite taille, plèbe indigne de notre regard ? Et quand des yeux je regarde ce qui m’entoure, je vois cette barbarie, cette saleté, tout autour de moi. Il faudra les dresser, éduquer et condamner ces offenses. Chaque atteinte contre la noblesse, je le prends désormais pour moi, contre mon nom. Je suis Syi Az’lissüe. Je le sais, les choses changent, et je suis prête. Les pensées bouillent au fond de mon crâne et aussitôt sorties je les oublie. Pourtant je sens qu’elles m’ont marquées. C’est ce que désormais j’appelle mes folies passagères, mes moments. Seulement quelques secondes se sont passées. D’un geste vif j’écarte quelques feuilles. Il me faut maintenant répondre à cette lettre de la plus haute importance. _ Adressez mes félicitations aux élus du peuple sauvage. J’ai la voix dure, et un étrange accent lorsque je prononce sauvage. Avec un touche de regret je me dis que je n’ai plus cette petite voix qui m’aurai simplement fait remarquer : « Tu as vu ce que tu deviens ? ». Non. Elle est morte il a y quelques temps, partie dans la douleur. Je me replonge dans mes travaux. _ A votre service, Dame Az’lissüe. |
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Y'a pas à dire, je préfère la Syi insouciante qui voyagait avec le drôle de Lutin ![]() Mis à part ça, un texte troublant de justesse. Je n'ai pas envie de dire que ce texte est beau, car le pessimisme qui s'en dégage m'interdit un tel mot. Mais je le trouve très réussi. Il m'a marqué. Non, vraiment un texte de qualité. Edit : trouvé le mot que je cherchais => poignant |
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Euh ouai, pareil que Piz.
Tu relances le projet Noble à toi toute seule du coup, Madame Az'Lissüe |
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Zut. Je t'ai plus sous la main pour te mettre des torgnoles, c'est dommage, parce que tu les mérites ! Ca se fait pas d'écrire comme ça !!! Pareil que Piz'. Aileen, Elfe des lunes du Clan du Cerf
Intendante bien malgré elle ! ♥ |
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Merci à tous ! Je vais certainement faire une suite un jour, quand j'aurai un peu de matière.
En attendant, concernant ce "projet noble", je dois pas être celui qui en a fait le plus (Isil si tu m'entends !) |
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(oh moi, je ne suis qu'une ombre ^^' )
En tout cas, c'est intriguant ! Alors creuse toi les méninges pour nous pondre la suite !! |
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Vive la noblesse. La noblesse vaincra! (qu'elle soit olympienne ou elfique ^^).
J'ai hâte de voir les résultats que ce regain de noblesse pourra donner. |