HRP :

Certains des évènements décris ici, ne pourront pas être utilisés RP par vos personnages, sauf si l'un des gardiens vous en parle.
En effet, ce rituel est propre à la race des géants, et plus particulièrement à son Conseil, le jugement propre de ce dernier permettra à telle ou telle information de filtrer.

Merci de votre compréhension.
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L’enquête à Zagnadar, suivie des explosions et de l’apparition de spectres avaient forcé olympiens et géants à suivre une nouvelle piste. Il y avait quelque chose de malsain, quelque chose d’effrayant dans cette affaire. Plus le groupe s’était enfoncé dans les entrailles des montagnes de Zagnadar, plus celui-ci avait été contraint d’affronter des créatures toutes plus féroces et hostiles les unes que les autres. Le mythe des Xorns avait été finalement balayé par la dure réalité : ces créatures existaient bien, mais elles ne se nourrissaient pas uniquement de minerais en tous genres…

Au fur et à mesure que les courageux aventuriers s’enfonçaient dans les galeries xornes, ils sentaient que l’environnement changeait. De plus en plus froid et morne, des mouvements furtifs autour non loin de leurs positions successives rendaient l’atmosphère de ces lieux pesante. Mais ce n’était rien comparé au spectacle qui allait s’offrir à eux. Les landes enflammées présentaient une végétation grisâtre, un sol fait de poussières et de cendres. Les reliefs étaient déchirés et se découpaient sur une voute qui ressemblait à un ciel d’orage. Curieusement, seule la lave était toujours aussi rougeoyante. Mais la chiche lumière qu’elle diffusait ne faisait qu’accentuer le sentiment des vivants de ne pas être à leur place en ces lieux. Le doute n’était plus permis, ils marchaient dans le royaume des morts.

Les combats continuèrent jusqu’à ce que le groupe d’impériaux mette en déroute l’armée de squelette qui tentait de démanteler l’arche de flamme, une construction pyramidale de plus de 100 mètres de haut renfermant un cercueil de cristal ou était installé le squelette d’un géant.

Que pouvait représenter ce bâtiment?
Pourquoi cette armée essayait-elle de le démolir?
Cela protégeait il Zagnadar d’une quelconque invasion?

Autant de questions sans réponses que le gardien de la terre se posait.

Le groupe d’impériaux était dans une impasse. Le corps de ce géant enfermé dans ce cercueil était un mystère qu’il fallait résoudre au plus vite. La vision d’Erkeos avait éveillé chez Rorschach des soupçons, mais comment savoir si ceux-ci se trouveraient avérés ou non.

Il fallait trouver un moyen d’obtenir des informations. Des réponses oui, mais des réponses sûres, qui permettraient d’éclaircir un peu les nombreuses zones d’ombres qui planaient sur cette affaire.

Le Gardien avait fait diligenter des ouvrages au cœur des enfers. Dans ces ouvrages, il apprit l’existence d’un rituel qui n’avait pas été réalisé chez les géants depuis des décennies. Il s’agissait du rituel de Mémnose. C’était un rituel unique dans le sens ou seuls les géants pouvaient le réaliser. Il fit part au groupe qui inspectait l’arche de flamme de sa découverte et qu’il allait devoir remonter à la surface, à Zagnadar, afin de tenter ce rituel et peut être d’obtenir des renseignements primordiaux dans cette histoire. Il s’adressa à eux en ces termes :

Les amis, je pense avoir trouvé une solution pour obtenir des informations qui nous permettraient de savoir quelle attitude adopter face à tout ceci.
Un Rituel que seuls les géants peuvent réaliser peut nous apporter ces réponses.

Il s’agit du Rituel de Mémnose.

Il va permettre au Conseil de Zagnadar d’accéder à la mémoire de nos ancêtres. Mais pour se faire, il doit être mené au pied de l’autel consacré, au cœur de la cité géante.

Nous trouverons ainsi peut être des indices sur qui est ce géant, pourquoi il est la et qui a fabriqué cette pyramide.
Fenrir et Vrugar vont devoir me suivre.

Les autres, il faudrait que vous restiez la et protégiez la zone, Aspic nous a prévenu que nous étions surveillés.

Je fais aussi vite que possible.
Je reviendrai dès que le rituel sera terminé.

Tenez bon, nous arrivons à un tournant de cette affaire.


Les 4 gardiens en route pour la place centrale de Zagnadar, Hardaway dans une de ses périodes de lucidité, tout était réunis pour que le rituel soit mené le plus rapidement possible.

Comme l’avait expliqué lui-même l’Oracle, il s’agissait d’une cérémonie sans artifices, simple à mener mais qui demandait une concentration ainsi qu’une résistance physique et mentale importante. Il avait également mis en garde les gardiens : toutes les vérités ne sont pas bonnes à entendre. Il se pourrait que certaines informations ne soient pas bonnes à répéter au peuple, et qu’ils se devraient alors de les encaisser et de les taire à tout jamais.

Hardaway commençait à s’impatienter en voyant que certains manquaient à l’appel. Il avait déjà préparé quelques bougies pour éclairer l’autel. Cet autel était en fait un bloc de granit sombre de forme parallélépipédique sur lequel étaient inscrit les noms des Oracles, des Gardiens et des grandes figures de Zagnadar depuis sa fondation. Ses faces avant et arrières étaient parfaitement lisses, tandis que ses cotés étaient à l’état brut de la matière. Les noms avaient été soigneusement ciselés dans la Roche.

C’était à la mémoire de l’ensemble de ces géants que le conseil allait accéder.

Les derniers noms que l’ont pouvait voir inscrits étaient ceux du conseil actuel :

Rorschach Karnage ; Fenrir Tirak ; Vrugar ; Jaron
Après de nombreux jours de tergiversations, le gardien de l’air se présenta enfin et le Rituel de Mémnose pouvait enfin commencer. Les Rocs établirent un cordon de sécurité et évacuèrent la place centrale de Zagnadar pour laisser l’Oracle et les Gardiens réaliser ce rituel tranquillement.

Hardaway leur expliqua le principe : se concentrer au maximum et tous viser la même époque afin de lancer les visions. Pour commencer l’Oracle demanda à Rorschach de choisir une période assez proche de la leur et de visualiser les noms des membres du Conseil de cette époque.

Le Gardien de la Terre, respira longuement et annonça au groupe qu’il avait choisi un évènement qu’il avait vécu de loin étant trop jeune pour participer, mais qu’Hardaway avait lui mené d’une main de maitre : La fameuse fête de Zagnadar qui avait rassemblé dans la cité géante l’ensemble du monde connu, ou presque.

Ror se concentra alors sur les noms des gardiens de l’époque, ainsi que sur la date de l’évènement : Mormus gardien de la terre, Belgarath Endhor gardien du feu, Bayo gardien de l’air, Hrimthurs gardien de l’eau et Hardaway, il y a 32ans de cela.

Les 3 autres gardiens présents et l’Oracle se concentrèrent à leur tour sur ce fait historique. Après quelques minutes, les premières formes apparurent autour d’eux. Des images spectrales à l’effigie du Conseil de l’époque rejouaient devant leurs yeux ébahis une réunion qui traitait de cette fête.

L’Oracle lança aux gardiens :

La ville est enfin reconstruite, on pourrait organiser une fête pour en mettre plein les yeux à tout Olympia, et leur montrer notre nouvelle prospérité.

Mormus fut le premier à répondre : j’trouvions que ch’est une chouette idée, ils vont vouèrent c’que ch’est qu’une belle ville

Bayo lui, était un peu plus perplexe et s’inquiétait de l’organisation et de la sécurité lors cet évènement.

Oracle, avec les récents conflits, il va falloir gérer la sécurité de chacun, ca sera pas quelque chose de simple. On pourrait aussi en profiter pour entériner un pacte avec les nains ? ajouta-t-il.

Hrimturs et Belgarath se mirent d’accord pour s’occuper de la sureté des participant avec les Rocs.

Avec Belgarath et les Rocs, on fera le service de sécurité, à la moindre incartade on n’hésitera pas à intervenir de façon musclée. Pour ce qui est du traité que t’évoques, il faut voir avec Esdeliath, c’est lui le diplomate.

Cette phrase mit fin au premier Flash. Hardaway était amusé de revivre cette scène, les gardiens eux étaient assez chamboulés de voir leurs prédécesseurs discuter devant leurs yeux, au point de pouvoir quasiment les toucher.

Rorschach décida pour leur second essai d’allé un petit peu plus loin dans le temps et de revoir un moment qui serait certainement émouvant pour le guide géant : son investiture au poste d’oracle, il y a 37ans maintenant.

Les formes spectrales réapparurent. Le Conseil pouvait reconnaître Hardaway, dans la force de l’âge, un peu en retrait par rapport à Manra, dont les traits tirés montraient une certaines fatigue et lassitude. Il faisait face au Conseil : Baldrik gardien du Feu, Hakon gardien de la terre, Gervin gardien de l’eau, et Dankrad gardien de l’air.

Manra prit la parole :

Gardiens, cela fait maintenant plusieurs années que le jeune Hardaway me suit et que je le forme à prendre ma relève. Je le pense maintenant prêt. Je suis personnellement éreinté, j’ai beaucoup donné pour notre peuple, aujourd’hui je ne me sens plus la force de continuer. Les éléments m’ont guidé durant tout ce temps, ils ont besoin de l’entrain de la jeunesse pour faire avancer notre peuple, et ils m’ont montré qu’Hardaway était destiné à de grandes choses. Acceptez-le et aidez-le dans sa tâche. Je vous fais confiance pour ca. Pour ma part, j’ai une dernière chose à réaliser dans ma vie. Je vais partir à l’Est, peut être avec quelques soldats, pour essayer de retrouver les érudits qui ont été expulsés pendant la période d’obscurantisme qui a frappé Zagnadar il y a presque un millénaire maintenant. Ce sera mon dernier voyage.

Hardaway s’avança, les 4 gardiens s’agenouillèrent devant le nouvel Oracle.

Ils s’écrièrent alors plein d’enthousiasme : VIVE HARDAWAY, LONGUE VIE A L’ORACLE ! QU’IL SACHE GUIDER LE PEUPLE SELON LA VOLONTE DES ELEMENTS!

Ainsi se termina le second flash. Hardaway était ému d’avoir vécu de nouveau ce grand moment de sa vie. Les gardiens virent le chemin qu’avait parcouru leur Oracle depuis cette époque. Mais il ne fallait pas se démobiliser et passer au flash suivant.

Ils firent ce coup ci un bon de 35 années supplémentaires pour atterrir à une période obscure. Celle de l’esclavagisme que les Olympiens infligeaient aux géants.

Brand gardien du feu, Veland gardien de la terre, Didrik gardien de l’eau, Frode gardien de l’air, menés par l’Oracle Nondorf formaient le Conseil de la cité Géante. La scène commença en plein milieu de la nuit. Les gardiens étaient encapuchonnés. L’oracle, lui, avait le visage découvert. Son regard était étonnement noir, presque maléfique. Cette entrevue paraissait clandestine.

Nondorf s’exprima le premier.

Les géants du village de Minar ont une nouvelle fois refusé de payer le tribut qu’ils nous doivent pour qu’on les protège. La famille qui gère ce village doit être déportée…

Frode ajouta :

Il faut faire ca vite et bien. Leur attitude a tendance à se répandre sur les autres villages alentours. Les gens disent qu'on ne sert pas les éléments. On doit réagir. Et comme vous vous en doutez, on peut pas les faire tuer depuis leur dernière prise de position contre nous.

Je connais un sergent olympien qui pourrait organiser une rafle sur Minar. Il nous débarrasse de nos brebis galeuses et s’enrichit dans le même temps. Le deal me parait acceptable. Seulement, pour justifier cette rafle, il lui faut une excuse. Expliqua Didrik.

Des marchands Olympiens passent régulièrement près du village. Je peux m’occuper de la mise en scène de leur assassinat et faire passer les Endhor pour les meurtriers ricana Veland, dont la voix d’outre tombe faisait froid dans le dos.

Laissez moi les massacrer, je le ferais avec plaisir s’empressa de dire Brand, laissant paraître malgré sa large capuche une lueur sadique dans les yeux.

On est donc d’accord. On doit préserver nos intérêts propres coute que coute, vous m’entendez ! COUTE QUE COUTE ! S’énerva Nondorf.

C’est sur cette phrase que cette scène inimaginable se termina. Le Conseil était sous le choc. Mais ils étaient prévenus. Tout ce qu’ils verraient ne serait pas forcément tout beau, tout rose. La dure réalité les frappa de plein fouet. Hardaway accusait le coup, lui qui avait été victime de l’esclavage. Aucun des 5 géants ne pouvait comprendre un tel comportement. Il fallait malgré tout continuer à aller de l’avant pour obtenir des réponses extrêmement importantes pour leurs affaires courantes.

Rorschach essaya de recadrer tout le monde, d’évacuer cette scène de leur esprit en recentrant ses compagnons sur leur véritable objectif : découvrir qui est le géant enfouit sous Zagnadar dans une prison de cristal.

Le gardien de la terre se concentra d’avantage, et tenta de projeter le groupe beaucoup plus loin. Près de 250ans en arrière. L’oracle de l’époque s’appelait Ewald. Le sage était-il surnommé. ASGEIR, gardien du feu, GEROLT gardien de l’eau, HASTEIN gardien de la terre et enfin ARNKETIL gardien de l’air constituaient ce Conseil de Zagnadar.

La scène se forma moins rapidement que les autres. Les spectres étaient difficilement reconnaissables et leurs paroles étaient incompréhensibles, presque imperceptibles. Durant de longues minutes, Rorschach et ses compagnons ne parvenaient pas a comprendre ce qu’il se passait. A force d’efforts et de concentration toujours plus intense, le groupe réussit enfin à comprendre les échanges.

Les anciens gardiens parlaient d’une nouvelle cité qui avait été fondée par un Dieu et peuplée de hors la loi et de renégats.

Asgeir le sanguin voulait apparemment écraser ces parias pendant que cela était encore possible. Gerolt lui, de son coté, soutenu par Hastein, considérait qu’il fallait commencer par protéger la population géante de ces raclures avant d’envisager de les bouter loin de la région. Arnketil, dans sa neutralité légendaire, souligna que déjà quelques géants avaient quitté Zagnadar pour rejoindre cette troupe. Ewald rappela à ses gardiens que chaque être vivant avait le droit à une seconde chance. Qu’importe les actes passés, seuls comptent les actes présents. C’est pourquoi il expliqua qu’entamer une communication cordiale avec la cité des Hors la loi était quelque chose qui serait forcément bénéfique pour la suite. Il fallait prendre la température avant d’envisager quelque action que ce soit. Chacun des gardiens comprit qu’une nouvelle fois, emmenés par la fougue de leur élément, ils n’avaient pas pris assez de recul et n’avaient pas fais preuve de la raison et de l’empathie que leur Oracle essayait de leur insuffler. Ils conclurent donc ensemble de l’attitude pacifique qu’ils prendraient face à cette ville voisine.
Le groupe maitrisait maintenant assez les aller retours dans la mémoire de leurs ancêtres pour tenter de trouver les informations qu’ils recherchaient activement. Ils soufflèrent plusieurs heures afin de reprendre des forces, de se ravitailler et de faire le vide dans leur esprit. La concentration qu'ils allaient devoir fournir serait véritablement intense.

Rorschach les lança enfin sur les traces de Torkar, 860 ans plus tôt…

Tels des mirages, les silhouettes se succédaient autour des Gardiens et de l'Oracle en pleine Memnose. Des bribes de conversation surgissaient puis s'estompaient. Le temps défilait vite, à reculons, en de multiples pauses qui permettaient à Rorschach de se situer dans cet étrange voyage. Ils reconnaissaient les visages et les voix de ceux qu'ils avaient entendus plus tôt et ne s'attardaient pas. Encore quelques sauts dans l'Histoire des Géants et ils rejoindraient ces poignées de minutes du passé qui seraient peut-être cruciales pour leur avenir…

Ils y étaient.

Torkar se tenait debout près de la stèle. Il paraissait jeune au milieu des Gardiens qui l'entouraient, assis en tailleur sur des nattes de shola. Certains avaient des chopes à portée de main, d'autres quelques racines qu'ils mâchonnaient distraitement.

- Bien. Qui est pour ? Demanda l'Oracle d'une voix assurée, vraisemblablement à propos d'une question qui devait figurer à l'ordre du jour du Conseil de Zagnadar.

Trois mains se levèrent. Torkar hocha la tête, l'air satisfait. Le sujet était clos et les Gardiens vidèrent leurs chopes puis firent mine de se lever, croyant être libérés.

- Un moment, mes frères, fit-il en les retenant d'un geste.

Ils se réinstallèrent avec un certain étonnement devant la mine assombrie de l'Oracle.

- Qu'y a-t-il, des nouvelles de nos gars ? Tenta le Gardien de l'Eau dont plusieurs amis étaient partis récemment en expédition.
- Non, pas de nouvelles… Autre chose. Que vous devrez garder pour vous.

L'Oracle dévisagea longuement les quatre Gardiens de son regard perçant. Les autres soulevèrent les épaules ou émirent des grognements. Cela suffisait pour qu'il ait leur parole.

- Quand j'ai voulu sortir notre peuple de son isolement, je savais que ça ne se ferait pas tout seul. Vous vous souvenez de l'opposition et des combats qui ont suivi…

Tous avaient participé, de près ou de loin à ces événements. L'un des Gardiens envoya une bourrade amicale à son voisin l'air de dire "Oué c'était la grande époque, tu te souviens ?!" Torkar prit une longue inspiration.

- Avant ça j'avais conclu un pacte avec Hadès. Je cherchais un moyen d'éradiquer ceux qui nous gardaient dans l'obscurantisme et nous faisaient chaque jour un peu plus régresser. Les passer tous au fil de la lame était le plus simple mais pas le plus efficace. Je m'en savais capable, aucun n'était plus fort que moi. Mais je ne voulais pas qu'ils puissent revenir et traficoter des rébellions dans notre dos.
Alors j'ai prié Hadès, lui promettant de beaux combats et de nombreuses âmes à lier en son domaine. Je dois dire que ça m'a quand même surpris qu'il réponde… Il s'est engagé à ne pas les libérer une fois qu'elles l'auraient rejoint. En échange, j'ai dû lui jurer de le servir sans réserve le jour où il ferait appel à moi…

Il leur laissa quelques secondes pour assimiler son monologue, avant de lâcher brutalement :

- Ce jour est arrivé, je dois partir.

Incrédules, les Gardiens chuchotèrent entre eux et l'un sourit même à cette bonne blague que leur servait leur Oracle.

- Rundan, fit-il au Gardien de l'Air, lorsque j'aurais franchi les cols, tu seras le nouvel Oracle. Tu es le plus ancien du Conseil, j'ai confiance.

L'intéressé n'en croyait pas ses oreilles et les questions s'enchaînèrent, à peine articulées. La colère montait dans sa voix comme pour mieux combattre les idées bizarres de l'Oracle.

- Mais… Tu vas où ? Pour quoi faire ? C'est quoi cette histoire ? Depuis quand on traite avec les Dieux ?
- C'est comme ça, c'est tout, faudra t'y faire. Coupa froidement Torkar. Et vite.
- Tu… Tu reviens quand ? Risqua le Gardien de l'Eau qui préférait envisager quelque chose de moins catégorique qu'un adieu.
- Je reviens pas. Il m'a dit que je serais un Vivant parmi les Morts et que j'allais porter le monde pour… Pour un bout de temps. J'ai pas bien compris mais il avait pas l'air de vouloir répondre à cinquante questions, si tu vois ce que je veux dire… J'ai dit "d'accord" et voilà.

Le silence s'était fait autour de la Stèle, lourd de questions et de doutes. Ni l'Oracle ni les Gardiens n'étaient du genre à geindre mais le coup était quand même rude, même pour eux.

- Bon bref… Je pars cette nuit. Je brûlerai ma cahute, débrouillez-vous pour que ça explique ma "mort". Personne ne doit savoir. Maintenant fichez le camp, j'ai besoin de parler aux Ancêtres une dernière fois.

Les Gardiens se levèrent et il y eut quelques accolades. On voyait sur leurs visages qu'ils se sentaient dépourvus. Parler aurait signifié accepter. Aussi préférèrent-ils s'éloigner en silence, pour réfléchir, comme si les dés n'étaient pas encore jetés.

Torkar les regarda un moment, la mâchoire serrée, tandis qu'ils lui tournaient le dos et retournaient à leurs affaires. Puis il pivota face à la Stèle et y posa ses deux mains à plat, sentant les gravures des noms de ceux qui avaient fait la grandeur de Zagnadar. Baissant la tête, il pria longtemps pour apaiser son âme avant de l'offrir au Seigneur des Enfers.

La vision se termina sur la prière de Torkar, un moment extrêmement émouvant pour Rorschach. Il sentit son coeur se déchirer en pensant au don de soi de cet Oracle, de ce frère qu'il n'avait jamais connu mais qui s'était sacrifié pour lui et la multitude des autres géants. Il sentit son coeur se déchirer en repensant à cette dépouille qu'il observait il n'y a encore que quelques jour, complètement indifférent. Il sentit enfin son coeur se déchirer en revoyant les images de la réunion clandestine du Conseil dirigé par Nondorf.

Le gardien se rendit compte que son peuple était capable du meilleur comme du pire. Il comprit également que la noblesse d'âme pouvait côtoyer l'abjecte noirceur . Il regardait les autres membres du conseil, les yeux humides. Rorschach se demanda alors s'il serait capable d'un sacrifice aussi important que celui de Torkar. Il se demanda si pour sauver les siens, il pourrait offrir son âme et ne jamais connaitre le repos éternel.
Il regarda de nouveaux les membres du conseil, puis les géants qui déambulaient près de la place centrale.
Il sentit alors une chaleur monter en lui.
Bien sur qu'il en serait capable! Rorschach aimait son peuple plus que la vie elle même. Il comprenait tout a fait le geste de Torkar et le respectait totalement.
Le géant se mit alors à sourire. Ses collègues le fixèrent alors, incrédules.

L'Oracle et les Gardiens restèrent un long moment assis, écoutant les prières de Torkar en une communion à travers les âges. Ils ne pouvaient plus rien pour lui mais ils n'avaient pas le cœur à renvoyer son sacrifice dans l'oubli. Puis les mots ne furent plus que des sons distants, la silhouette devint floue et disparut, soufflée par le présent qui reprenait ses droits.

- C'était donc ça…

Hardaway l'avait à peine murmuré, subjugué par la vision qu'avait offerte la Stèle des Ancètres. Il avait attendu qu'elle se termine avec l'horrible sensation, lorsque l'image de Torkar s'était dissipée, qu'un frère venait de lui être arraché. Il mit plusieurs minutes à rassembler ses pensées, prolongeant la concentration nécessaire au rituel proche d'une transe. Lui aussi allait devoir s'expliquer. Le temps des secrets était terminé.

- C'est ce que les Moires ont dit, fit-il en soupirant.

Mais les Gardiens ne pouvaient comprendre ses paroles. Aussi reprit-il depuis le début.

- Ca a commencé dans cette grotte, celle où les Elfes ont trouvé Marcus, mort. Il avait été contaminé par… Une chose… Une force… Qui avait besoin de cette statuette pour s'ancrer parmi les vivants. Marcus en a profité longtemps, séduit par les avantages que cela lui procurait. Plus de puissance, sa longévité exceptionnelle, une certaine capacité d'anticipation… Quand il a enfin compris qu'il se faisait berner, il a cherché à s'en débarrasser une fois pour toutes. Après s'être enfermé dans la caverne, il s'est laissé mourir pour emmener la statuette avec lui dans les Enfers où il errerait sans doute pour toujours. Mais les Elfes sont arrivés à ce moment précis et la lui ont prise. Il s'est retrouvé devant Hadès les mains vides. Pour avoir succombé à la manipulation d'une force ennemie à l'Ordre Divin, Hadès l'a châtié. Son tourment se poursuivra pour l'éternité...

Hardaway releva la tête. Un instant perdu dans ses souvenirs, il en avait presque oublié la présence des Gardiens.

- Oué… Vous vous demandez sûrement d'où je tiens tout ça… Elle me l'a raconté, et ce qu'Elle ne m'a pas dit, Hadès l'a complété.

Il reprit son récit, il y avait encore beaucoup à dire.

- Marcus mort, Elle m'a contaminé à mon tour. Pour que je reprenne cette statuette et le rôle que l'Elfe avait joué dans ses projets. Puis Elle s'est alliée à ceux qui avaient développé une haine particulière envers les mortels. Dont Kharok. Son savoir sur la nécromancie Lui a été immensément profitable et il est devenu le porteur de la statuette.
Je me suis retrouvé simple esclave, le gros-bras de service... Je n'étais rien de plus qu'un objet. J'ai lutté pourtant, de toute mes forces. C'était vain. Plus je me débattais plus elle m'ensorcelait… C'était sans fin… Ces chaînes… Cette voix… Alors avant qu'Elle ne me brise, j'ai plié. J'ai caché ma dernière étincelle de volonté profondément dans mon esprit. J'ai attendu, en pantin discipliné. J'ai guetté jusqu'à ce qu'ils commettent une erreur...
Lorsque vous avez assiégé son laboratoire dans les glaces, Kharok a eu peur et m'a confié son trésor. Il pensait que si l'un de nous avait le plus de chance de survivre et de s'enfuir en protégeant la relique, ce serait moi. Sauf que…

Un sourire fou fendit le visage d'Hardaway.

- Je suis sorti vous affronter. Pour réussir là où Marcus avait échoué. Je L'ai prise de court. Elle a tenté de m'empêcher de me battre. Pour que vous me capturiez, ce qui serait un moindre mal pour Elle. Mais c'était ignorer les ressources de -=Feu=-. La rage qui m'a alors saisi était au-delà de tout. J'ai tué Morgoth, un de nos frères, puis j'ai tué ton p'tit Willow...

Rorschach ne lui en avait jamais reparlé. Hardaway ne s'était jamais excusé.

- C'était la clef pour que vous n'hésitiez plus. Notunato a exaucé mon vœu. -=Feu=- m'a consumé et cette fois personne n'a eu le temps de prendre la statuette. C'est Hadès qui l'a eue.

Hardaway fixait ses mains, son regard plein de dégoût. Les voyait-il enserrer la relique ? Les imaginait-il rougies du sang de ses victimes ? On n'aurait su le dire.

- Il a dit que j'avais été aussi faible que Marcus et aussi méprisable. Et que je méritais le même châtiment. Lui avoir ramené la statuette n'allait pas rendre mon sort plus enviable, j'avais juste eu plus de chance : il n'imaginerait rien de pire, voilà tout.

L'Oracle se souvenait de la scène, comme marquée au fer rouge dans sa mémoire. Hadès avait tellement raison. La culpabilité déchirante qu'il ressentait ne finirait qu'avec une juste punition. Pour tout le mal qu'il avait fait à son peuple, lui qui avait juré de le guider et le protéger.

- C'est là que trois vieilles chétives sont apparues. Elles ont dit "non" à Hadès… Ca m'en a bouché un coin. Elles ont parlé d'une histoire de fil et d'après elles Hadès commettrait une grave erreur en leur faisant couper le mien trop tôt. S'il me laissait rentrer, un jour je serais vivant parmi les morts, à porter le monde… Comme Torkar, j'ai pas compris grand-chose. Mais j'ai vu qu'Hadès était pas si contrarié que ça. Alors je me suis dit que c'était encore un coup fumeux. J'avais pas tort…

Son regard balaya la place centrale et s'arrêta sur la Stèle. Plus de quatre ans qu'il étouffait dans l'attente... Il était enfin fixé. Une délivrance en somme. Il s'en trouva bizarrement soulagé et ses épaules s'affaissèrent en un long soupir.

- Bon ben… Je vais pas vous faire un dessin.

Hardaway avait une dernière chose à régler avant de prendre la place de Torkar. Il se tourna vers le Gardien de la Terre :

- Rorschach… Je vous ai souvent laissé vous débrouiller. C'était pas facile pour vous et t'as dû voir que tout devient vite compliqué pour garder le cap et protéger nos valeurs, malgré les ego et les ambitions des uns et des autres. Tu t'en es bien sorti. Tu es honnête et franc. Ca fera peut-être pas de toi un grand de la politique, mais tu seras à coup sûr un bon Oracle.

Hardaway n'était pas très à l'aise avec les discours pompeux et sa patte personnelle revenait vite au galop. Aussi termina-t-il un peu moins solennellement :

- Bouarf… Pi tu verras, c'est pas toujours simple de jouer le garde-chiourmes mais deux claques par ci par là, ça remet toujours les idées en place. Faut essayer de voir plus loin que le bout de son nez mais tu commences à apprendre. Et puis les Ancêtres sont là. Les Eléments aussi. Ils ne te laisseront pas tomber.

Hardaway se leva. Il était temps d'aller dire adieu à sa sœur. L'avantage, c'est qu'il n'allait pas bien loin et qu'il pourrait voyager léger.