Fiançailles | |
Topic visité 603 fois Dernière réponse le 30/04/2012 à 20:25 |
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Elen avait retrouvé tous ses esprits bien plus vite qu’escompté. Dès le lendemain, il avait assisté Evonis dans la reconstruction du clan, la remise en confiance et sans oublier, bien entendu, le bannissement de certaines brebis galeuses qui avaient été trop promptes à le suivre dans sa démence. Il avait aussi copieusement demandé le pardon d’Aileen, d’Evonis, du Grand Pontife et de tous ceux qui avaient pu ou auraient pu souffrir de la situation.
Et il s’était bien plus encore excusé auprès de Isa, mais pas pour les mêmes raisons. Ces fichus Nains l’avaient empêché de mener à bien un projet auquel il tenait. Et ensuite, lorsqu’ils avaient fait escale à la Tanière quelques jours encore, il avait souvent cherché à s’éclipser, à la faveur de la nuit. Cependant, Isa semblait avoir décrété que ses promenades nocturnes en solitaire appartenaient au passé. Elle avait tenu à l’accompagner, malgré les averses froides. Cela ne le dérangeait pas, bien au contraire, qu’elle partageât ces instants avec lui. Le Loup courait, la nuit. Cela l’aidait à réfléchir. Pour elle, il avait retenu ses foulées et il avait effectué plus d’arrêts, à l’abri de grands arbres. Ils avaient passé de nombreuses heures auprès de feux de bois qui crépitaient, blottis l’un contre l’autre, se réchauffant mutuellement. Comme lors de chacune de ses balades nocturnes, il chantait et jouait de la musique grâce à la flûte de Kowü, seule rescapée de sa période d’esclavage. Cela dit, entre chanter et jouer seul et le faire pour elle, il n’hésitait pas une seule seconde : il préférait qu’elle fût là pour entendre les musiques anciennes empreintes de nostalgie de temps à jamais révolus et les chants en Loup Ancien, dont elle commençait à saisir le sens. Le seul inconvénient de la situation, aussi mineur fut-il face au bonheur de partager chaque instant de sa vie avec elle, était que son projet avançait lentement. Il attendait qu’elle soit endormie, bercée par les histoires qu’il lui narrait - anciennes épopées, amour tragiques ou ballades chevaleresques. Puis il s’éloignait quelques temps, à la recherche de certains matériaux qui lui étaient nécessaires. Il n’osait pas aller bien loin de peur qu’elle ne s’éveille et le cherche : il était facile de se perdre avec ce brouillard dense. Une fois qu’il eut tout rassemblé, il prétexta le temps trop mauvais pour qu’ils continuent leurs escapades nocturnes. A la forge, il fit sécher lentement les essences de bois précieux qu’il avait récoltées, à une distance raisonnable des fourneaux. Il avait collé ensemble les matériaux et, ayant discrètement pris certaines mesures sur Isa, il avait tourné le bois jusqu’à obtenir la forme et la taille voulue. Cela lui avait pris plus de temps qu’il ne l’avait escompté et valu une belle frayeur lorsqu’elle avait manqué de le surprendre en plein travail. Mais rien, pas même ces brumes envahissantes, ne l’avait détourné de son objectif. Il avait terminé dans le délai qu’il s’était fixé, très satisfait du résultat. Si bien que la veille, ils s’étaient offerts une nouvelle fugue, bien emmitouflés et le jour tant attendu se présenta : celui où la jeune femme exécutait son rituel. Le précédent c’était fait sans témoin et sans fioriture. Les Loups comme de nombreux Elfes étant partis vers l’ouest de la Forêt des Cendres pour s’opposer à l’attaque des Nains enfin sortis de Fernliae. Les Paladins et les LEDA avaient suivi pour tâcher de faire respecter les ordres du Grand Pontife à quelques Olympiens un peu trop portés sur l’envie de massacre malgré le traité toujours en cours. Isa était arrivée épuisée aux premiers campements au sud ouest de la forêt, là où l’on avait signalé quelques rôdeurs de la Cité Blanche, faute de n’avoir pas dormi les cinq jours qui avaient suivi l’explosion despotique du Chaman. Quant à Elen, il s’était donné pour mission de faire un repérage des forces naines, voire géantes, au nord ouest, presque jusqu’au abord de la ceinture de lave. Alors elle comptait bien prendre sa revanche cette fois et s’offrir une journée aussi mémorable que celle qu’elle avait passée avec le Loup, il y avait déjà de cela deux saisons. Le Chaman vint frapper à la porte de la chambre, peu après que les Titans se furent levés. Il portait des vêtements qu’il avait fait confectionner pour la journée, et pour remplacer la partie de sa garde robe détruite par ses divers combats, dont celui face à Xeis. Au moins, se disait-il, il serait un minimum présentable devant sa belle. - Isa ? Tu es réveillée ? Le rythme particulier des journées passées à la Tanière avait finalement été intégré par l’Olympienne. De façon naturelle, elle arrivait maintenant à se lever assez tôt, même sans les repères de luminosité habituels. Aussi était-elle prête et la relecture de toutes ses pages du soir était déjà sérieusement entamée, pour ne pas perdre de temps. La journée réserverait sans doute des activités plus agréables avant la petite cérémonie sous les étoiles. - Entre Elen ! Elle posa ses feuilles pour aller l’accueillir à la porte, pas plus verrouillée que d’habitude. Il la fit pivoter sur ses gonds et afficha un sourire radieux lorsqu’il put enfin contempler Isa. Ils étaient encore revenus tard de leur promenade nocturne, mais elle affichait toujours cette fraîcheur et cette joie qui irradiaient et se transféraient à lui. - Bonjour, douce Olympienne... Tu as bien dormi ? - Bonjour Grand Chaman. Fit-elle, un rien mutine.Tu en doutes ? Avec les expéditions où tu m'entraînes toutes les nuits, je dors comme une masse oui ! Qu’est-ce qui t’amène de si bon matin ? Et si élégant ? Elle en parut plus heureuse que dérangée car elle enlaça avec tendresse l’Elfe devant elle. Il l’entoura immédiatement de ses bras, l’étreignant à son tour. - Je ne sais pas... Répondit-il, sur un ton évasif. Je comptais laisser de côté le travail et passer la journée avec toi, si tu le veux bien... - Il y aurait eu des représailles s’il en avait été autrement. Répondit-elle le plus sérieusement du monde. - Sans nul doute. De quelle nature, en revanche ? Ça je l’ignore... - Dis plutôt que tu ne veux surtout pas savoir ! Rassure-toi, je comprendrai... Elle appuya ses mots d’un regard faussement conspirateur. - Euh... Répondit-il avec un petit sourire qui pouvait signifier qu’elle se trompait. A peu près certaine qu’Elen avait déjà une bonne idée de ce qu’ils feraient durant la journée, elle préférer néanmoins garder la surprise et profiter de l’impatience qu’elle suscitait, comme ce picotement acidulé qu’on craint en mangeant une orange mais dont l’absence gâcherait tout. Elen, EdL
Chaman du clan du Loup au conseil des Lunes Responsable de l'Éclat des Lunes ♥ |
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En guise de prélude à ses plans, et aussi parce qu’elle lui avait manquée durant le court intervalle de temps qui les avaient séparés durant leur sommeil respectif, il l’embrassa d’abord tendrement, profitant de manière éhontée de leur proximité actuelle. Ayant pleinement conscience des activités matinales habituelles de la demoiselle, il devait d’abord prendre la précaution de ne pas l’avoir immodérément interrompue.
- Tu es prête ? Je peux repasser plus tard, sinon, tu sais ? - Hum... Il me faudrait encore un petit quart d’heure, puis je suis toute à toi ! - Je te laisse, alors ? - Tu peux rester si tu n’as pas peur de t’ennuyer ! - Alors je reste... Je vais te regarder faire... - Je me dépêche. Viens t'asseoir si tu veux ! Elle quitta Elen pour récupérer ses parchemins et s'asseoir en tailleur sur le lit. Les pages s’éparpillaient autour d’elle, pêle-mêle entre son journal quotidien et toutes les informations qu’elle avait glanées durant plus de quarante jours. Il s’installa tout près d’elle, évitant de lorgner sur les pages par politesse, observant plutôt le panel d’émotions qu’affichait l’Olympienne en relisant ses notes. Il essayait de deviner à quel moment correspondait tel sourire, qu’est-ce qui la poussait à froncer les sourcils. Bref, il l’admirait de tout son saoul, silencieusement. - Il semble que j’ai progressé en survie par tout temps, grâce à nos escapades. La première page y faisant référence rapporte que ça a été un cauchemar de te suivre en pleine nuit sur à peine quelques centaines de toises, même si tu allais lentement. Et dans la dernière, je ne parle même plus de chute ni d’égratignures ! Fit-elle en riant. - Bah, la forêt en cette saison, on dit que c’est vivifiant... Donc forcément, tu ne peux que te renforcer ! Mais ne t’endurcis pas trop, hein ? J’aime te voir douce et fragile... Expliqua-t-il en la couvant du regard. De toute façon, quand les neiges arriveront, on arrêtera ce genre de balades. Ce ne serait pas bon pour toi, je pense... - Oh tu ne veux pas que je prenne une allure de bûcheronne ? Moi qui croyais... Rétorqua-t-elle, l’air innocent. Brrr, peut-être pas tout de suite, non. On gardera ça pour l’année prochaine, lorsque je serai devenue aussi résistante que toi ! - Surtout que pendant la saison froide, le Peuple Frère rôde. Et je ne sais pas si c’est la neige ou la faim... Mais ils sont bien moins amicaux... Fit-il, semblant se remémorer un lointain souvenir. Elle grimaça à l’idée de se faire croquer par une meute affamée. Inutile d’aller provoquer des drames, la Forteresse était bien assez confortable pour que l’on accepte d’y rester quelques dizaines de jours sans sortir. - Tu en as déjà vu attaquer des Elfes ? - Ça arrive. Mais très rarement. Et souvent ce sont des loups dégénérés. Ou des solitaires. Non, les meutes sont moins amicales, mais ils n’iraient pas jusqu’à tuer. Disons qu’elles sont plus promptes à défendre leur territoire. Tu sais, avec le manque de gibier... Il l’observa un instant, peu certain de l‘avoir rassurée. Les loups avaient de tous temps eu mauvaise réputation auprès de la Noblesse de Na’Helli. Et il ne doutait pas un instant que les Olympien citadins possédassent des légendes analogues. Pourtant, en forêt, les Elfes des lunes savaient que croiser un loup était d’une rareté exceptionnelle. Et que seuls les malades ou les bannis osaient se montrer, en dernier recours bien souvent. - Tu n’as quand même pas peur des loups ? Tu as bien vu au nord ? Ils ne m’ont rien fait ! Et pourtant, s’ils m’avaient étripé après que... Enfin je l’aurai compris... - Et bien... Disons que face à une meute, ou même un seul individu qui a l’air décidé, je resterais plus que prudente. Ce sont des prédateurs, comme nous. Des fois les raisons pour passer à l’attaque ne sont pas difficiles à trouver... Mais ça ne me viendrait pas à l’idée d’aller les déranger sciemment. - Crois-moi, Isa, un Elfe ou un Olympien, c’est bien plus dangereux qu’un loup. C’est d’eux dont il faut le plus se méfier. Et puis, je suis là pour te protéger ! Ajouta-t-il, bombant le torse, avec bien moins d’ampleur que Evonis. Elle rit avant de remettre le nez dans ses lectures. De temps à autre, elle relevait la tête et souriait au Loup avec un petit air énigmatique. Les dernières pages ne prirent guère de temps et elle rangea tout ce qui devrait être brûlé dans sa besace. Ses notes à vocation plus encyclopédique rejoindraient, elles, une pile qui grandissait contre un des murs de sa chambre. - Voilà ! - Bien ! Alors suis-moi ! Annonça-t-il en se relevant. Il lui tendit les deux mains. Elle obtempéra, pressée de profiter de la compagnie du Loup. Il l’attira contre lui. - J’ai remarqué que ta garde-robe avait été sévèrement amoindrie. Alors il faut qu’on corrige ça ! Et je te dois au moins une tenue complète, souviens-toi ! Qu’en penses-tu ? - Ohh !! On va faire des emplettes à Na’helli ? L’instinct citadin ne fut pas long à revenir dès qu’Elen fit mention d’habillage. Il était vrai que l’une de ses plus jolies robes avait fini au feu après le combat contre Xeis et il ne lui restait que quelques tuniques trop peu épaisses pour l’Engourdissement qui serait bientôt là. Sans compter ses bottines qui avaient fait leur temps... - Oh euh... Pas exactement... Nous avons d’excellents artisans chez nous, tu sais ? Il te suffit de choisir un modèle, quelques mesures, et tout sera prêt pour ce soir, les retouches éventuelles en plus ! - Grands Dieux ! Et tu m’avais caché ça ? Fit-elle, les yeux écarquillés. Voilà donc ton secret pour avoir autant de tenues sans jamais mettre les pieds en ville ! Ses yeux s’étrécirent comme si elle le soupçonnait d’avoir cherché à la tenir éloignée de ce lieu de tentation si longtemps. - Ben... Je t’avoue que je n’y ai pas pensé. J’ai envoyé les vêtements de Rôde à repriser, mais je n’ai pas songé à t’en parler. Il l’entraîna dans son sillage, vers l’étage du dessous. L’Olympienne semblait s’être acclimatée à la pénombre de la Tanière bien plus vite qu’un Elfe ne l’aurait fait. Elle ne semblait pas plus gênée qu’un Loup qui vivrait en ces lieux depuis toujours. Il la mena à un atelier où des Louves et des Loups cousaient de mains de maître les atours que portaient les habitants de la Tanière, selon la mode louve la plupart du temps, mais aussi selon celle des Nobles parfois et plus rarement même, la mode olympienne. Du temps où l’ambassade fonctionnait, il s’agissait que les émissaires Loups soient vêtus de manière à rendre l’entrevue la plus confortable possible pour l’hôte. Dans la pièce, sur des mannequins de bois finement taillés, étaient présentées diverses tenues masculines ou féminines. Il y avait aussi plusieurs épais volumes représentant des créations non confectionnées. Un mur avait été recouvert par divers échantillons de tissus, dévoilant tout le panel de couleurs et de matières disponibles. Isa découvrait cela comme si elle venait de pénétrer dans la salle au trésor de Salminar en personne. Tout lui faisait envie, elle se voyait déjà tout porter, comme ces princesses qui allaient de bal en bal, toujours resplendissantes. Il y avait aussi des vêtements plus pratiques, pour le quotidien en forêt de la Meute. Et elle manquait de ce genre de vêtements. Elle mit un temps infini à se décider, touchant les étoffes, associant les couleurs et les dentelles. C’était une occasion si rare qu’elle en profita pleinement. - Ça te plait Elen ? Tu ne dors pas au moins ? Fit-elle au bout d’un moment en se retournant vers le Loup pour lui montrer l’ébauche de deux magnifiques robes : L’une bleu profond rehaussé de quelques pans plus clairs et l’autre rouge sombre et blanche. |
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Le Chaman avait observé, curieux, vers quelles couleurs l’Olympienne se dirigeait plus volontiers, et quels types de robes semblaient lui faire le plus envie. Il jeta un oeil par dessus l’épaule de la jeune femme, observant d’un air critique l’objet du désir d’Isa. Il n’avait jamais été doué pour transposer les gens dans une tenue imaginaire. Et à cela s’ajoutait qu’il avait le sentiment que l’Olympienne serait magnifique, même en guenilles. Il ferma un instant les yeux, visualisant de son mieux, puis :
- Je crois que cela t’irait à ravir. - Tu dis ça pour me faire plaisir. - Non, non... Mais ce qui me plairait plus, ce serait de te voir dedans, pour de bon. - Ah pour ça, il va falloir être patient ! Elle alla un peu plus vite pour fixer les assortiments de hauts en toile et de pantalons pour des tenues plus décontractées. Elle n’en avait quasiment jamais porté mais sa vie à la Tanière lui demandait quelques adaptations et il était temps de s’y mettre. Une couturière prit ses mesures et l’avertit que confectionner les robes serait un peu plus long qu’ajuster les autres vêtements. Isa la remercia mille fois, plus que satisfaite de ce qu’elle allait porter. Le Chaman l’observait avec un ravissement certain. Elle serait resplendissante dans les tenues qu’elle s’était choisies. Et il avait hâte la voir les porter. Après tout, les Nobles n’avaient pas le monopole de l’élégance ! Ici aussi, on savait s’habiller. - Tu es sûre d’avoir choisi tout ce qu’il te fallait ? Pas de regrets ? Demanda le Loup, pour s’assurer qu’elle ne se forçait pas à un seuil qu’elle jugeait raisonnable par simple réserve. - Aucun ! Et puis je pourrai toujours revenir aux beaux jours pour compléter ! Qu’Elen se rassure, son calvaire à attendre qu’elle termine de choisir était loin d’être fini ! Il lui adressa un sourire, prenant sa main dans la sienne, pour l’entraîner loin de cette pièce où il se forçait parfois à venir pour se faire confectionner diverse tenues protocolaires stupides et inutiles. Il avait souvent l’impression de se déguiser. La tenue de Chaman lui convenait bien mieux ! - Que dirais-tu d’aller nous dégourdir les jambes ? - S’il ne pleut pas à seaux... - Dans la salle de bal ? Je ne crois pas... La taquina-t-il. - Aahhh ! Tu sais danser ?? - Il faut bien ! Les Nobles sont tellement casse-pieds qu’ici on ne leur laisse pas le loisir de nous critiquer. On fait tout aussi bien qu’eux... Sauf le vin. - Hum... Alors tu ne te moqueras pas, moi je n’ai pas vraiment appris. J’ai seulement vu faire, une ou deux fois. - Les danses, ici, sont... Différentes, tu sais ? On pratique celles de Lardanium ou Na’Helli à l’occasion. Mais notre spécialité, c’est la danse louve ! C’est très simple, tu verras ! - D’un autre côté, au moins on ne risque pas de boire la tasse si on s’y prend mal. Fit-elle en allusion à son apprentissage récent de la nage. - Ah ça ! Et en plus tu dépasses de loin les Louves en grâce et en délicatesse. Tu vas apprendre très très vite ! - Rhoo ce n’est pas gentil pour tes compatriotes ça ! A quelles occasions organisez-vous des bals ? - Pour la Fête de Luwö, les fêtes du Partage, pour la commémoration de Nikhün et plus généralement quand il y a un évènement heureux dans le clan : une naissance, un mariage, des retrouvailles. Leurs pas les avaient menés vers une salle d’où provenait une entraînante mélodie. Mais le plus souvent, sans raison particulière... Ajouta-t-il, poussant d’une main l’une des portes à double battant, l’invitant à passer. Étonnée d’entendre de la musique, Isa rentra vite pour découvrir qui jouait aussi tôt. Etait-ce un orchestre qui répétait ? Dans la salle, une vingtaine de Louves et de Loups dansaient joyeusement, de bon matin. Vives farandoles puis couples tournoyant l’espace d’un instant avant d’échanger de partenaire avec le duo voisin, en passant par la formation de grands cercles, les danseurs ne se ménageaient pas tandis que les musiciens, au luth, à la harpe, au piano, au violon, à la cornemuse louve, à la flûte, au tambourin et aux percussions donnaient le meilleur d’eux-mêmes. Certains autres attendaient patiemment, installés sur des bancs, le prochain morceau pour se joindre à la troupe. - On ne va pas les déranger ? Isa se demandait ce que faisaient là tous ces gens... - Penses-tu ! Ils s’occupent ici parce qu’il pleut ! Et en règle générale, cette salle renferme toujours au moins un danseur et un musicien. Tu comprends, pour éviter certains travaux... Fit-il avec un clin d’oeil, tandis qu’il la conviait à s’installer sur un banc, en attendant. - On devrait venir plus souvent, ils ont l’air de se régaler ! Dit-elle en prenant place. Elle passa son bras à celui d’Elen et s’appuya contre lui alors qu’elle observait avec envie les danseurs. - Tu te laisses guider par ton partenaire et par le groupe. Et tu fais à peu près comme tu l’entends... Lui fit-il, en guise de recommandations. En effet, si certains danseurs semblaient exécuter une complexe chorégraphie, les pas et les gestes d’autres danseurs manquaient de précision. Loin de s’en offusquer, tous affichaient un sourire ravi. Il y avait là des Elfes de tout âge, de l’enfant trottinant tant bien que mal sur ses courtes jambes aux adultes de quelques siècles... - Tu es prête ? C’est pour bientôt ! Elle hocha la tête avec un grand sourire, prête à rejoindre la troupe. La musique s’arrêta, Elen la guida auprès du reste des danseurs. Les musiciens émirent les premières notes. Presque immédiatement, Elen s’empara de la main de sa voisine, une gamine louve à l’aube de l’adolescence, tandis que le voisin d’Isa, un des gardes qui l’avait aidée à la bibliothèque, prit de celle de l’Olympienne. Et tout débuta pas un grand oval de danseurs, tantôt tournant, tantôt se déformant, certains s’approchant du centre et d’autres s’en éloignant. Puis des couples se formèrent, et par un hasard tout à fait fortuit, Elen et Isa se retrouvèrent à tournoyer, leurs bras reliés. Il ne la quittait pas des yeux, un sourire étincelant rien que pour elle. Malheureusement pour eux, vint le temps de changer de partenaire. Isa se contenta au tout début de suivre les mouvements du groupe et l’agencement général. Ses pieds restaient libres de faire ce qu’ils voulaient, du moment qu’ils la dirigeaient au bon endroit avec les bonnes personnes. Puis le rythme et l’exemple des autres danseurs les mirent bientôt au diapason, surtout que ce n’était pas bien compliqué. Lorsqu’elle retrouva Elen, elle s’amusait comme une petite folle et eut hâte de le rejoindre une fois que la danse les eut de nouveau séparés. Elle passa son tour, par contre, lorsque une petite partie des danseurs se regroupa pour finir sur l’une des chorégraphies les plus complexes. A l’instar de l’Olympienne, les enfants et ceux qui n’étaient pas rodés à cet exercice plus technique firent un grand cercle autour de ceux qui allaient se produire et battirent la cadence en frappant vigoureusement des mains. La musique devint plus martiale et les danseurs sautillèrent sur place, leurs pieds réalisant un manège aussi précis que rapide. La salle résonna des talons qui battaient le sol avec force et les sourires des spectateurs s’élargissaient au fur et à mesure qu’ils se laissaient impressionner et porter par l’excellence de la prouesse des danseurs. Elen, EdL
Chaman du clan du Loup au conseil des Lunes Responsable de l'Éclat des Lunes ♥ |
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Lorsque le morceau s’acheva, Elen rejoignit Isa, l’air ravi, paré pour une autre danse si l’Olympienne le voulait bien. Il l’étreignit et l’embrassa tendrement, sous les regards surpris de certains et avenants d’autres, ceux qui avaient un niveau Bakany entre autres. Luwö avait-il été bavard ?
- Pas trop fatiguée ? - Non et toi ? Il te reste encore du souffle après ça ? Elle avait été très fière de la prestation d’Elen parmi les meilleurs danseurs Loups. - Bien sûr ! Tu va voir, la prochaine danse va te plaire... Je crois avoir une assez bonne idée de l’enchaînement d’aujourd’hui... En effet, lorsque les musiciens commencèrent à jouer, ce fut un air lent et entêtant, très éloigné du précédent qui ne sembla guère surprendre le Chaman. De nombreux danseurs se dirigèrent vers les bancs, tandis que ne restaient sur scène que des couples, enlacés, qui tournaient lentement sur eux-mêmes. Elen posa ses mains sur les hanches de l’Olympienne, plongeant son regard dans le sien. - Tu dois connaître... On a ramené ça de Lardanium... Murmura-t-il. - Oui j’ai déjà entendu ce genre d’airs dans les salons privés du Havre. Elle rougit légèrement et fixa Elen, aussi bien pour profiter de cet instant avec lui que pour esquiver le regard des spectateurs. Alors tu avais tout manigancé ? - Hum... Euh... Non, non... Nous avons simplement de la chance... Répondit-il avait honnêteté. Puis plus bas : Tu vois que tu sais danser ? Elle hocha la tête timidement et se rapprocha de lui. Le hasard faisait alors très bien les choses et les autres Loups semblèrent disparaître tandis que leur couple restait seul, enlacé et porté sur les notes d’une tendre mélodie. - Tu aimes ? A ses yeux qui scintillaient, le Chaman avait déjà sa réponse. Elle nicha sa tête dans le creux de l’épaule du Loup. - La place est confortable. Répondit-elle avec un petit soupir de bien-être. Ils dansèrent jusqu’à la fin du morceau tout en discutant à voix basse; puis le suivant encore jusqu’à ce que las, ils décident de quitter la salle de bal qui ne désemplissait pas. A chaque danseur qui partait, un autre venait prendre sa place. A croire que les Loups ne travaillaient jamais ! Ils remontèrent jusqu’aux cuisines, où Elen prépara de bons petits plats à sa douce, où les champignons dont la pousse avait été largement favorisée par l’humidité de la saison avaient une bonne place. Deux oeufs battus et de fines lanières de jambon cru terminaient l’assiette. Isa était affamée. Elen était venu tôt et elle, déjà accaparée par ses lectures, n’avait pas pensé ensuite à aller prendre un petit déjeuner. Elle savait depuis leurs longs voyages dans la Plaines Basileus jusqu’au grand nord qu’Elen était un bon cuisinier. Il se débrouillait pour accommoder dignement ce qu’ils trouvaient en chemin, et ce n’était pas toujours facile ! Là, avec des produits plus nobles, Isa ne pouvait que se régaler. - Ça t’apprendra à m'empêcher de déjeuner au saut du lit ! Lui lança-t-elle entre deux fourchetées. Quoique je pourrais bien m’y faire, si tu me prépares des choses aussi bonnes tous les midis ! - Bah... Ce n’est pas grand chose. Fit-il, grignotant seulement. Sa ration s’était réduite comme peau de chagrin lorsqu’elle tortilla un petit bout de jambon rescapé dans son assiette, l’air hésitante. Les regards des uns et des autres bien que rarement hostiles et plutôt même encourageants, la perturbaient pourtant. Non pas que le couple ait cherché à être discret depuis que le Chaman avait quitté Nil’nelia mais le flou artistique qui enveloppait leur relation naissante finissait par la préoccuper. Elle n’était pas du genre à ressasser ni à harceler qui que ce soit. Néanmoins, les jours de ses rituels, elle avait toujours eu pour habitude d’essayer de pousser sa vie dans la bonne direction, grâce à plus de réflexions et de discussions sur ses projets. C’était donc le bon moment pour aborder certains sujets avec le Loup, quitte à affronter quelques instants embarrassants... Elle se décida : - Elen... Ça risque de jaser de plus en plus pour... Pour nous. - Hum... Tu as raison... Il fronça les sourcils, prenant un air faussement pensif. Je ne vois qu’une seule parade. Il se leva, fit le tour de la table, glissa la main dans une poche pour récupérer une petit objet puis mit un genou en terre. Prenant une main de l’Olympienne dans les siennes, il plongea son regard droit dans l’éclat ambré des yeux de la jeune femme. - Ô Isa, douce parmi les douces, permets-moi de renouveler une fois encore ma demande : veux-tu à jamais lier ton destin au mien et me feras-tu l’honneur de me choisir pour époux ? Le manège d’Elen avait stupéfié Isa. Elle qui redoutait de se lancer dans une discussion gênée et laborieuse... Elle resta d’abord aussi figée qu’une oeuvre de Mick Elange puis son coeur se mit à battre la chamade, renseignant bien plus vite la jeune femme que son esprit sur les intentions du Loup. Elle le regarda intensément. Une nouvelle page de leur avenir n’était qu’à trois petites lettres d’eux et cela rendit ce moment exceptionnel. Toute versée dans les mystères des arcanes qu’elle était, elle n’avait vu plus pure démonstration de magie de toute sa vie. - Oui... Oui Elen... Et tu me combleras en me gardant auprès de toi. - Alors accepte cet anneau, qui nous liera tous les deux, devant Luwö comme devant les Loups... Il glissa doucement la bague à l’annulaire d’Isa, se délectant de voir l’anneau prendre place sur la main délicate de sa fiancée. - Il est d’une telle finesse ! C’est magnifique Elen. Merci ! Elle admira le travail que le Chaman avait réalisé, tournant sa main devant elle, aussi fière que ravie. Elle se leva pour tomber dans les bras du Loup, les siens se resserrant autour de son cou. Dans son élan, elle fit légèrement basculer Elen qui évita de justesse de se retrouver les quatre fers en l’air. Elle l’embrassa fougueusement avant de rire aux éclats, telle une gamine exubérante. Il rit avec elle, sa nervosité passée. Non pas qu’il s’attendit à ce qu’elle le rejette, après tout, ils s’étaient déjà promis un amour éternel à deux reprises. Mais demander à Isa de partager sa vie allait complètement changer leur existence à tous les deux. En mieux. Et il avait la certitude que rapidement d’autres évènements amélioreraient plus encore les choses... - Je t’aime, Isa... - Je t’aime aussi. Lui répondit-elle dans un souffle plein de tendresse. Puis elle continua au creux de son oreille, soudain beaucoup plus sérieuse : Elen... Fais de moi une Louve, avant de m’épouser. |
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Ce qu’elle venait de lui demander ne pouvait pas le rendre plus heureux. Cela le surprit un instant, mais cela emplit son coeur de joie. Bien sûr, il n’avait aucune idée de l’applicabilité du rituel d’apposition du Saïka sur une Olympienne. Mais Luwö semblait apprécier Isa. Il ne refuserait pas son entrée officielle dans le clan. Il en avait la certitude.
- Je ferai de toi la plus heureuse et la plus magique des Louves. Elle se serra davantage contre son fiancé. Le chemin qu’ils empruntaient désormais ensemble l’effrayait un peu car inconnu et loin de tout ce dont elle avait l’habitude mais Elen serait toujours à ses côtés pour l’aider. Il l’étreignit avec vigueur l’espace d’un instant, puis il murmura pour plaisanter : - Maintenant que je suis officiellement tien, plus personne ne jasera... Elle rit à son tour et demanda avec un air feint d’innocence : - Et tu peux avoir des solutions aussi fantastiques pour tout ce que je pourrais dire ? - Tu le découvriras bien assez tôt ! Répondit-il, sur un ton analogue. - Hey ! Mais... Tu joues les cachottiers depuis l’aube alors !! Réalisa-t-elle soudain. Elle pinça le Chaman à la taille, pour se venger du secret qu’il avait bien gardé en la promenant dans toute la Forteresse, sa bague dans la poche. - Depuis plus longtemps encore... Fit-il, avant lui tirer la langue goguenard : la bague ne s’était pas faite en une nuit ! - Alors je t’ai coupé tes effets ? Maintenant tu vas être obligé de tout avouer ! - J’ai encore tout un tas de choses à te montrer aujourd’hui ! Et je compte bien t’en faire la surprise ! Elle prit un air offusqué mais elle était on ne peut plus ravie. - Bon bon, puisque tu ne veux rien me dire, je finis de manger. Elle se rassit à la table comme si elle boudait et se fit un devoir de nettoyer son assiette méticuleusement, ne pouvant dissimuler un petit sourire amusé. Il se releva à son tour, se réinstallant face à elle, absorbé par la jeune femme, désormais sa promise. - Il faudra que tu me dises si je dois préparer des choses... Et comment tout va se passer. Je sais que c’est beaucoup de travail à Lardanium, mais il faut dire que nous sommes des gens compliqués. - Ne t’inquiète pas. Tu auras droit à une fête, tu seras au centre de toute l’attention. Les Louves seront vertes de jalousie devant ta tenue. Juste quelques mots à connaître pour plaire à Luwö, voilà tout. Oh oui bien sûr... Etre l’attention de tout le monde n’était pas susceptible de l’inquiéter... Du tout ! Elle fit une petite moue dubitative. - Haaa mais c’est vrai !! Il faut une robe ! Ce n’était rien de moins que l’élément crucial de tout mariage, à la fois le symbole du moment tant rêvé et un vrai cauchemar à choisir. - Enfin... Nous aurons le temps de peaufiner tout ça ensemble ! Je ne voudrais pas que notre mariage ait lieu avec ce temps-là ! Et je dois te faire Louve ! - Oui, nous attendrons les beaux jours. Pour que tout soit parfait. - Oh, et il te faudra une Prima-Luwä. Et aussi des amis à toi pour être témoins de tes noces. Ce nom n’était pas étranger à la jeune femme. Il s’agissait d’une personne de confiance qui devait endosser un rôle à peu près équivalent à celui d’une marraine pour la future progéniture du couple. Isa n’en voyait qu’une parmi ses amies.. - Est-ce qu’Aileen te conviendrait ? A moins qu’il ne faille une Louve obligatoirement ? - Non, non ! Une non Louve convient parfaitement au rituel. C’est avant tout à nous de décider qui sera digne de nous remplacer en tant que parents, en cas de problème. Je pense qu’Aileen serait... Hum... Tout à fait adaptée à des enfants. Dit-il, sachant pertinemment que la Cerf était à cent lieux de songer à être mère, même si elle en avait l’étoffe. Isa rit aux mots du Loup. Il était vrai qu’Aileen paraissait encore bien jeune et insouciante à certains égards. Mais elle avait été d’une force et d’un courage incroyables quand il avait fallu qu’elles s’allient contre la malédiction de Xeis. Alors qu’elle aurait pu simplement fuir, elle était revenue pour sauver Elen et les clans avec lui. - Adaptée... C’est peut-être un peu présomptueux. Fit-elle avec un dernier rire. Mais elle sera là s’il le faut, c’est tout ce qui compte. - Elle est plus maternelle qu’il n’y parait, tu sais... - Ah ? Raconte ! - Tu l’as vue avec Evonis, ces derniers temps, non ? - Elle le rend chèvre ! Ils sont mignons tous les deux. Bon alors... La Prima Luwä c’est fait ? Elle ne dira pas non quand même ? - Aileen ne dit jamais non ! - Pas faux. Sauf lorsqu’on veut faire cuire son Lapinou. Quelle sale bête ! Et bien voilà, c’est réglé de mon côté ! Elle ne se faisait pas d’illusions : elle pourrait toujours inviter certaines personnes comme Rôde, les LEDA et sa grand-mère mais les chances pour qu’elles assistent au mariage étaient quasi nulles. - J’aimerais bien que tu invites Isandre... Avant le mariage. Pour qu’elle prenne la mesure de la situation, tu sais ? J’aimerais beaucoup lui parler... Il avait parlé sur un ton sans joie, dénotant avec tout le reste. Lorsqu’il songeait à la vieille femme, seules des pulsions vengeresses ou de terreur lui répondaient. Et cependant, il devrait avoir affaire avec la vieille acariâtre au moins une dernière fois. Il avait une requête très personnelle pour elle. Isa haussa un sourcil. La demande d’Elen l’interloquait. - Tu... Tu es sûr ? Tu sais... Elle ne voudra pas venir. Les quelques mots que j’ai échangés avec elle grâce au carnet ne m’incitent pas à croire que j’aurai sa bénédiction, alors... - Justement. Elle viendra pour tenter de te dissuader. Mais quand elle nous verra, elle devra se rendre à l’évidence : je t’aime et je t’aimerai toujours. Et je suis sûr qu’au fond, elle ne veut que ton bonheur. Elen, EdL
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Elen avait peut-être raison. Sa grand-mère l’aimait. D’une façon assez personnelle, certes...
Isa tenterait de la faire venir, puisque le Loup l’y incitait. Elle mesura par anticipation tous les efforts qu’il ferait pour recevoir Isandre à la Tanière, elle qui avait été sa tortionnaire et espéra que ça ne lui gâche pas le plaisir de ses propres noces... - D’accord, je lui dirai. C’est très généreux de ta part d’essayer de nous réunir. Une inquiétude sourde se développait insidieusement dans son esprit depuis qu’ils avaient parlé d’Aileen. Ce n’était pas l’Intendante qui en était la cause, évidemment. Mais ce à quoi ses responsabilités possibles se référaient. Des enfants... Leurs enfants... Les siens... L’appréhension fit jour dans son regard qui se voila lorsqu’elle releva la tête de nouveau vers Elen. Il était tellement agréable de se laisser porter par de doux rêves ! Mais la réalité, comme l’hostilité de sa grand-mère ou le fait qu’elle serait probablement considérée comme une traîtresse à l’Empire, lui réapparaissait clairement maintenant. Cependant, ses pires craintes la concernaient bien plus intimement que le jugement des autres. - Et si... S’ils étaient comme... Moi. Tu sais ? Dit-elle après un long silence que l’évocation d’Isandre avait provoqué. Elle eut presque envie que le Chaman ne comprenne pas à quoi elle faisait référence, comme s’il pouvait balayer le problème juste en l’ignorant, purement et simplement. Il sembla perplexe un instant. Il se concentra et se remémora ce dont ils avaient parlé plus tôt. S’inquiétait-elle de la transmissibilité de sa malédiction ? - N’imagine pas le pire... Je ne crois pas que cela fonctionne ainsi... La situation pourrait évoluer. Il vint se placer derrière elle, agenouillé, glissant ses mains autour d’elle, sa tête plaquée contre le bras de l’Olympienne. Et ainsi enlacée, elle put entendre : - Et quoi qu’il arrive, tu feras une merveilleuse mère... - Je ne sais pas... Mais toi tu seras là pour eux. Elen était si protecteur avec elle. Elle ne doutait pas un seul instant qu’il serait aussi attentionné avec leurs enfants. - Ne dis pas ces bêtises. Toi aussi tu seras là... Il se releva, la débarrassant de son assiette vide qu’il posa en vrac avec de la vaisselle sale. Puis il revint vers elle, lui adressant un sourire plein de tendresse. - Tu seras la plus parfaite des mamans... Et tu es déjà la plus parfaite des compagnes... Elle lui rendit son sourire, à demi-rassurée et se leva pour le rejoindre. Elle l’enlaça étroitement avec un rien de provocation : - Voyez-vous ça... Et en quoi suis-je parfaite encore ? La liste ne peut être déjà finie... Elle tendit vers lui son visage et ils s’embrassèrent. - Bon, bon... Pas parfaite... Mais à quelques pas seulement alors... Concéda-t-il, après leur baiser. - Hey ! Dis que ça ne te plait pas, tant que tu y es ! - Oh euh... C’est pas... Enfin tu sais bien... C’était pour te répondre... Enfin... Euh... S’empourpra-t-il. - Ah oui je vois, Monsieur n’assume pas ses avis. A moins qu’il ne faille tester davantage ? Pour être sûr ? Fit-elle sans pitié. - Euh... Non... Enfin... Nous... Tu... On devrait y aller, non ? Balbutia-t-il, pas certain d’avoir saisi ce qu’elle sous-entendait. Isa éclata de rire et colla un baiser sonore sur les lèvres d’Elen avant de le relâcher. - Je te suis ! Le teint pivoine, il lui tendit la main, fixant le sol. Pourquoi tout cela lui semblait si compliqué ? Il avait tellement peur de décevoir ses espérances. Avec le fardeau qu’elle portait, il n’avait droit qu’à une journée par saison pour lui laisser des souvenirs impérissables. Et il ne voulait pas la décevoir. Il la mena silencieusement vers le deuxième sous-sol, dans les quartiers Loups. Ils prirent la direction de la chambre du Chaman, mais ils poursuivirent le long du couloir, jusqu’à un cul de sac. Il se trouvait là une vasque au fond percé. Elle lui lança quelques coups d’oeil interrogatifs tandis qu’ils dépassaient les entrées de toutes les chambres. Elle avait reconnu celle d’Evonis où elle avait déjà toqué et elle réalisa qu’elle ne savait même pas laquelle était celle d’Elen. Mais peu importait puisqu’il ne s’arrêta devant aucune. - Qu’est-ce que c’est ? Elle reconnaissait bien l’objet mais son intérêt à cet endroit ne lui paraissait pas évident. Le Loup jeta un coup d’oeil furtif dans le couloir, puis il annonça, sur le ton de la confidence : - C’est un petit truc que j’ai découvert... Il glissa sa main dans le creux, sembla tâtonner, puis il y eut un cliquetis. Le pan de mur pivota, avec un bruit de frottement de pierre contre pierre, révélant un couloir sombre, dans lequel il l’invita à rentrer. - Oh ! Ce n’est pas plein de toiles d’araignées j’espère ! - Promis. Elle s’approcha puis entra dans le passage. - Où cela mène-t-il ? - Je ne sais pas très bien comment appeler l’endroit. Il actionna une barre métallique pour refermer le passage derrière eux, ce qui les plongea dans l’obscurité la plus totale. Une douce lueur émana au bout de quelques instants de l’épaule du Chaman. Parfois, les énergies déployées par un Saïka pouvaient s’avérer utiles. Il se saisit de sa main, puis il firent quelques pas en avant. - Et tu ne l’as montré à personne ? - Non. Tu es la première. Comme souvent... Dit-il, avec un sourire qu’elle ne put voir. |
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Il débouchèrent immédiatement au centre d’une pièce qui formait une demi sphère. Il cessa de puiser dans son énergie et, tandis que la lueur de son épaule s’évanouissait, d’autres apparaissaient sur les murs. Des centaines de petits points lumineux. Isa avait longuement étudié les constellations pour son rituel et elle n’eut aucun mal à les reconnaître.
- Ohh ! S’exclama-t-elle, surprise de trouver une telle chose si profondément sous terre.C’est... On a l’impression de flotter parmi les étoiles... Elle fit un tour sur elle-même puis s’approcha d’une paroi. Elle effleura les pierres, essayant de voir si elles avaient été gravées et comment ces lumières pouvaient apparaître. - Je n’ai jamais compris l’utilité de cette pièce. Mais... Comme tu as accepté de devenir mon étoile... Tu ne peux pas être à un meilleur endroit ! Elle rit doucement aux flatteries d’Elen. Mais il s’avérait que cette voûte céleste était vraiment magnifique. Elle observa avec attention la position des constellations : cela pouvait donner une indication sur la date de la conception de la voûte. Mais son regard s’agrandit soudain. - Grands Dieux Elen ! C’est... Comme aujourd’hui ! Elles bougent donc ?? Elle se retourna vers le Chaman qui hocha la tête. Comment cela se pouvait-il ? Quel puissant enchantement pouvait retranscrire la position exacte des nuées d’étoiles chaque jour depuis des éons ? - Je me dis qu’on pourrait l’étudier ensemble, toi et moi, pour le comprendre... Et peut-être qu’on trouvera quelque chose, pour toi... - Oh oui ! Fit-elle comme une enfant sur le point de partir à la chasse au trésor. Pour une fois qu’ils se creuseraient la tête pour autre chose qu’une malédiction ! Peu importait si cela lui serait utile, elle raffolait de ce genre de mystères. Il l’enlaça tendrement et profita de l’intimité de la situation pour l’embrasser. Il n’y avait qu’elle et lui, sous la voûte céleste enchantée. Nul autre. Elle répondit à ses baisers, blottie contre lui. Décidément Elen était doué pour débusquer l’inédit et lui faire plaisir en toute circonstance. - Dis Isa... Tout à l’heure... Quand tu as parlé des... Petits... Ça veut dire que tu... Enfin... Tu en veux ? - Oui... Murmura-t-elle.Oui, j’en ai toujours voulu. Mais... Ça me fait peur... Pour... Ce que je t’ai dit tout à l’heure. Et puis, on en avait parlé à la Rivière Vive... Dans le silence de la pièce, elle eut soudain l’impression que les battements de son coeur résonnaient jusque sur la paroi. L’anxiété soudaine lui fit mordiller ses lèvres. - Je sais... Mais c’est... Enfin ce seront les nôtres... Et je t’ai dit... Il hésita, ses mains se glissant sur les hanches de la jeune femme, s’agrippant à elle avec une certaine fermeté. - Oui, je sais bien... Toi aussi tu veux des enfants. Mais... cela m’effraie que notre famille puisse ne pas correspondre à tes attentes. Je suis déjà assez... Bizarre comme ça. - Tu n’es pas bizarre... Fit-il, l’attirant au plus près. Et mes attentes sont simples, tu sais... Son visage frôla celui de l’Olympienne et ses mains se glissèrent plus bas. Il murmura dans un souffle : Je veux une famille, à nous. La respiration de la jeune femme s’accéléra sensiblement au contact étroit de son fiancé. - Alors nous l’aurons. Lui promit-elle. L’angoisse s’envolait pour laisser place à quelque chose d’aussi puissant qu'envoûtant, qui naissait là où Elen l’étreignait et qui l’envahiraient totalement. Le souffle coupé un bref instant, Le Loup croisa le regard de l’Olympienne, dans lequel se reflétaient les étoiles magiques sur un lit de miel. Ses lèvres s’approchèrent de celles de la jeune femme, son coeur battant la chamade. Il l’embrassa timidement d’abord puis ses mains devenues possessives vinrent au creux de son dos et ses baisers se firent plus audacieux, un bref instant. Puis, toujours enlacé, il murmura : - Parfaite... Isa en resta muette, son regard rivé à celui d’Elen. Elle le découvrait fougueux alors qu’elle l’avait connu toujours si timide ! Il lui faudrait un peu de temps pour oser s’avouer que cela lui plaisait énormément. - Ah ! Monsieur a réussi à faire son choix ! Parvint-elle à dire une fois ses esprits retrouvés. Puis elle lui glissa avec un petit air entendu : Il faudra revenir... - Assurément... Il demeura un instant silencieux, perdu dans les étoiles du regard de l’Olympienne. Cela te plait-il ? - Beaucoup. Elle laissa planer quelques secondes de doute sur ce à quoi elle se référait exactement avant de continuer à propos de cette salle aux étoiles. Ce sera notre secret. - Ce sera notre secret... Répéta-t-il, avant de déposer un tendre baiser au creux de son cou. A nous... Se plut-il à ajouter. - Tu crois... Qu’on pourrait s’installer ? Ensemble je veux dire... - Je pense que je devrais pouvoir arranger ça avec le Chaman. C’est un bon ami, tu sais ? - Oh en plus on a nos petites entrées dans le beau monde ! Ce serait gâcher que de ne pas en profiter ! - Je vais te montrer, si tu veux. Elle hocha la tête, prête à suivre de nouveau Elen. Il lui tendit la main, l’entraînant vers le mur pivotant. Il écouta attentivement, l’oreille plaquée contre la pierre. Puis il actionna le mécanisme, qui leur permit de rejoindre la Tanière. Combien d’autres secrets recelait l’habitat des Loups ? Il la conduisit d’un pas rapide vers sa chambre, dans le même couloir que la pièce au firmament étoilé. Il avait déménagé toutes ses possessions, depuis la chambre qu’il partageait alors avec Nil, vers celle-ci, une nouvelle, laissant l’ancienne à la disposition de l’Elfe éconduite. Il ouvrit la porte, non verrouillée bien entendu, et ils entrèrent. La pièce, de dimension raisonnable, légèrement plus petite que les chambres des invités, comportait un lit double recouvert d’une belle couverture aux motifs en Loup Ancien, une grande armoire, un bureau quelque part sous un fouillis de parchemins et de grimoires ouverts que le Chaman semblait avoir consultés récemment, deux tables de chevet et deux chaises. Chaque meuble semblait issu de l’artisanat Loup, portant des marques ou des décorations traditionnelles. Aucune cheminée par ici : la température ne variait pas au cours de l’année. Pour toutes possessions, d’après ce que Isa pu voir, Elen n’avait que la besace qu’il transportait habituellement avec lui, quelques vêtements, un luth posé contre une armoire, ses armes et des petites statuettes de bois, qu’il confectionnait lui-même, lorsqu’il s’ennuyait. Il n’y avait aucune décoration, à l’exception des oeuvres de Elen, réparties sur divers meubles et exposées sur une étagère murale. - Voilà... Ce pourrait être notre chambre... Enfin, avec quelques arrangements et tes affaires auprès des miennes. - Ça me plaît, Elen. Mais on risque de se battre pour le bureau ! Lança-t-elle avec un petit rire. - J’en ferai amener un autre. Dit-il simplement, haussant les épaules. - Il y a vraiment toutes tes affaires ? Elen, EdL
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La décoration lui parut assez minimaliste. Elle n’osa pas s’aventurer près des étagères et se contenta de tourner sur elle-même, à peu près au milieu de la pièce, pour détailler un peu plus les lieux.
- Tout est là. Je n’aime pas accumuler des possessions matérielles... J’ai d’autres sources de richesse... - Je vois ça. Remarque, je ne voyage guère plus chargée... Mais qui sait, j’aurai peut-être envie de m’embourgeoiser, plus tard ! - J’y compte bien ! - En attendant, je n’ai qu’une grosse pile de parchemins... Et mes affaires de voyage. Ca ira vite à ranger. - Oh oh ! Alors on peut te déménager tout de suite ! Enfin... Hum... Si tu crois que... - Je ne sais pas... Tu crois que le Chaman approuverait ? - Je pense... Enfin, si ça s’accorde avec les usages Olympiens aussi... - Tu sais... A entendre Rôde, j’en suis déjà fort loin des usages Olympiens. Alors un peu plus un peu moins... - Je suis désolé... - Non, peu importe. Allons chercher mes affaires ! Fit-elle avec un grand sourire. Le Chaman ne perdit pas un instant, se dirigeant vers les étages au pas de course, sa main toujours dans la sienne. Il ne se le ferait pas dire deux fois et il ne lui laisserait pas l’occasion de changer d’avis. Elle le suivit en riant, courant presque derrière lui. A la tête des gardes qu’ils croisèrent, le spectacle ne devait pas manquer d’être cocasse. Une fois arrivés à la chambre de Isa, il attendit ses instructions. - Et bien... Il y a donc cette pile, là. Expliqua-t-elle en la désignant du doigt. Mes vêtements de rechange et... Elle prit sa besace, son bourdon et la brassée d’affaires qui étaient pliées sur le fauteuil. - C’est tout... Si je pouvais avoir aussi une coiffeuse dans la chambre, celle-ci ou une autre, ce serait parfait ! - Dès demain. Matin. Promit-il, se chargeant les bras. Et tout ce que tu veux d’autre. Elle repasserait le lendemain, vérifier si elle n’avait rien laissé et remettre la chambre comme elle l’avait trouvée à son arrivée. A la porte, elle se retourna pour regarder la pièce. Elle avait souvent pensé qu’elle la quitterait pour retourner à Lardanium... Finalement elle n’irait que deux étages plus bas. - N’oublies pas que tu vas bientôt avoir une belle collection de robes ! Que tu n’hésiteras pas à agrandir, n’est-ce pas ? Avança-t-il, tandis qu’il transportait joyeusement les affaires de sa fiancée vers leur chambre. - Tu dis ça mais quand tu verras la ridicule petite place qu’il te restera dans l’armoire tu changeras d’avis ! - J’en ferai amener une autre, plus grande. Finalement, ils arrivèrent à la chambre de Elen. Ce dernier posa les parchemins de Isa sur le bureau et rangea les siens en formant une seconde pile qui surplombait des grimoires. Il plaça ensuite les vêtements de la jeune femme auprès des siens. Il avisa ensuite sa fiancée, les bras sur les hanches. - Eh bien... Nous voilà chez nous. Isa avait toujours sa besace en bandoulière et son bourdon. Si Elen s’était occupé de ranger ses habits, elle n’osait toujours pas se déplacer trop près des meubles. - Oui... Fit-elle, à mi-chemin entre la timidité et l’incrédulité. - Eh bien, eh bien ? Tu joues les timides ? - Non ! Mentit-elle, prise au dépourvu. Je... Je regarde où poser ça... - Je sais ce que je peux faire pour que tu te sentes chez toi ! Il se saisit de son luth et de ses statuettes en bois qui constituaient ses seules possessions à demeurer dans la chambre, et les jeta pêle-mêle sur le lit. - Le plus important, pour que tu te sentes chez toi, c’est que tu organises un peu ton environnement à ton goût. Bon... Je n’ai pas grand chose à ranger, et en attendant qu’on fasse des folies en achetant de jolies choses, je n’ai que ça... Elle sourit : l’attention était charmante. Elle cala son bâton de mage dans un angle de la pièce, comme elle faisait dans la chambre d’invité. Puis elle alla à la table de chevet la plus proche et déposa à côté sa besace. Provisoirement se dit-elle. - Je ne disais pas que ta décoration ne me plaisait pas tu sais. Elle prit presque furtivement la statuette de bois qui était le plus près du bord du lit, encore embarrassée de s’aventurer aussi loin dans “l’antre” du Loup. Elle représentait un cerf majestueux et un Elfe, la main posée sur l’animal. - Je n’ai pas dit ça... Mais je veux que tu te sentes bien... Fit-il, lorgnant un bref instant sur une autre statuette, puis reporta son attention sur elle. Elle se retourna le temps de lui sourire. Elle savait bien tous les efforts qu’il faisait et lui en était reconnaissante. Puis elle regarda d’un peu plus près la statuette, remarquant la finesse du travail qui respectait la fibre du bois et les teintes naturelles qui donnaient un beau relief sur les détails. - C’est joli ce que tu fais. - C’est pour m’occuper. J’aime le bois... C’est un matériau noble. |
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Il la laissa regarder les divers statuettes une à une et elle en fit un premier groupe qui comportait les quatre Totems qu’elle connaissait bien. Une autre représentait une Elfe accompagnée d’une guêpe gigantesque. De nombreuses légendes en faisaient mention et le clan des Loups avait longtemps fréquenté les protégées de ce Totem. Puis un grand papillon dual où l’on remarquait rapidement deux faces minutieusement sculptées : le devant montrait un papillon de nuit et l’arrière papillon diurne. Les six statuettes trouvèrent leur place sur l’étagère du milieu, bien en vue.
Sur la planche du dessus, elle répartit des personnages en couples qui dansaient, imitant une salle de bal. Et sur la plus basse finalement, divers fruits comme ceux qu’elle avaient récoltés - pommes, poires, cerises, grappe de raisins - retrouvèrent des objets courants. Il ne lui en restait plus guère à trier par genre mais elle ne s’attendait pas à trouver une statuette d’elle. En la saisissant, elle se reconnut presque immédiatement. Le Chaman semblait avoir pris bien plus de soin pour sculpter cet objet que les autres. La tenue représentée était celle qu’elle portait habituellement lors de ses voyages, son bâton de mage dans une main et sa besace à sur son flanc. Sa main libre tendue en avant, en invitation à la rejoindre ou à s’approcher. Les détails avaient été poussés à leur maximum. Elle pouvait même distinguer certaines mèches de cheveux, si fines que cela avait dû demander un réel travail de fourmi, de même que le sourire amical posé sur ses lèvres. L’expression de son regard semblait donner vie à l’objet : elle fixait probablement quelqu’un ou quelque chose et on pouvait lire dans ses yeux la compassion, la bonté et la sympathie qui transpiraient de la jeune femme. Elle devina aisément l’époque qui avait dû lui inspirer la création de l’objet : peu après leur séparation, au Pilier Nord. Elle effleura la statuette, comme Elen avait dû le faire longuement pour en sublimer les moindres détails. Il était étrange d’imaginer tout le travail qu’il avait fourni pour façonner cette représentation enjolivée d’elle, la rendant si parfaite... Cela la troubla qu’il l’imagine ainsi. - Tu m’avais fait une très forte impression, lors de notre première rencontre. Et je ne pouvais me résoudre à t’oublier, au cas où nous ne nous serions pas retrouvés à l’Arche des Songes. - Tu me faisais peur, à l’époque... Fit-elle en se souvenant comme l’Elfe de leur première rencontre à Zagnadar.Mais je ne voulais pas qu’ils s’en prennent à toi, tu avais l’air déjà tellement mal en point... - Toi tu étais loin, très loin de m’effrayer... J’ai toujours senti comme une connexion entre nous. Au départ, l’esclavage me convenait bien... Pour éloigner l’Ennemie de mes amis... Mais quand je t’ai rencontrée, j’ai compris quelle belle erreur j’avais faite. C’était viscéral : je ne supportais pas de te savoir en danger. Pourtant, je ne te connaissais même pas. - Je l’ai compris quand on est sortis des Falaises. J’ai longtemps maudit ma grand-mère de m’avoir enchaînée à toi d’une si étrange manière. ”Puissent les Dieux la bénir aujourd’hui pour cet acte de folie.” Songea-t-elle. Et pourtant tu m’as manqué dès l’instant où Nil est arrivée... J’ai cru que tout était fini. Je me trompais ! Elle lui sourit par dessus son épaule. Prenant le luth au passage, elle contourna le lit et posa la statuette sur l’autre table de chevet. L’instrument de musique finit à côté, appuyé contre le petit meuble. - Cela te convient ? - C’est parfait. Ça n’a jamais été aussi rangé ! C’est amusant, avec le peu que j’avais, de se dire que tout était placé pêle-mêle ! - Ah le vieux mythe de la touche féminine ! Si c’est une façon de me dire que le rangement me sera désormais dévolu, tu te trompes lourdement ! Fit-elle en agitant un index autoritaire, prête à éclater de rire. - Oh non, ne t’inquiète pas ! C’est juste que... Enfin quand on est seul, on a tendance à se laisser aller. Au niveau de la décoration. D’autant que je ne passais pas beaucoup de temps ici... Mais j’espère que ça, ça va changer ! - Franchement, tu n’aurais pas tout jeté sur le lit, je n’aurais rien bougé du tout. Cette pièce est comme tu es, accueillante et tournée vers l’essentiel. Le reste n’est que du détail. - Mais c’est chez toi, maintenant. Il faut bien que tu retrouves ta touche en te réveillant le matin. Fit-il, s’asseyant enfin sur le bord du lit. - Tu sais... Au Havre, je n’avais rien qu’une petite table. Ensuite j’ai été sur les routes si longtemps. Au mieux à séjourner dans des auberges. Alors “ma” touche... Je la découvrirai ici. Et si tu es là au matin près de moi, je ne serai jamais perdue. Elle le rejoignit et resta debout devant lui. Ses paroles le rassurèrent, et il afficha un sourire plein de tendresse. S’éveiller à ses côtés l’avait inquiété au début : il craignait qu’elle panique en découvrant qu’ils partageaient la même couche. Mais l’assurance de la jeune femme éloigna ses peurs insignifiantes. Tout irait parfaitement bien. - Alors on remplira cet espace tous les deux, toi et moi, de souvenirs neufs. Fit-il, ouvrant ses bras, prêt à l’accueillir sur ses genoux. - Oui... Et toi, tu crois que tu arriveras à supporter d’être notre mémoire commune ? Ça ne te parait pas compliqué déjà ? Elle s’assit timidement, comme s’ils étaient finalement allés un peu vite en besogne pour s’installer, pressés par leur enthousiasme communicatif. Mais il y avait encore beaucoup de questions en suspend. - Isa... Tu as une mémoire. Particulière, bien à toi. Et je te l’ai déjà dit... Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour te retirer ce poids... Et en attendant, cela fait partie de toi, de ton caractère et de ton charme. C’est une part importante de toi-même. Et crois-moi, je rendrai chacun de tes jours de lectures aussi inoubliables que possible. Elle posa sa tête sur l’épaule du Chaman. Elle n’aurait pu souhaiter compagnon plus tendre et compréhensif. Peut-être que cela deviendrait une corvée pour lui un jour, mais en attendant pour avancer, elle devait avoir confiance en elle-même pour trouver comment le rendre heureux malgré tout. - Et tu as eu à supporter bien pire venant de moi... - Ce n’était pas ta faute. Et tout s’est résolu. - Comme tout ira bien pour toi et moi. Pour toute réponse, elle l’embrassa dans le cou, fugacement. Il l’enlaça, ses bras s’enroulant autour du corps gracile de sa fiancée. - Tout ira pour le mieux, à présent. Murmura-t-il au creux de son oreille, avec la promesse d’un avenir radieux, plein de joie et de complicité. - C’est déjà beaucoup de pouvoir en parler avec quelqu’un, tu sais ? Du moins quelqu’un qui ne me crie pas dessus toute la journée... Mais oui, tu as raison. Elle balaya ses propres considérations d’un petit geste de la main. J’arrête de t’embêter avec ça. Continuons à profiter de cette journée, elle file vite ! Elen, EdL
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Il semblait peu désireux de quitter la pièce, ou même de se relever. Il avait rarement eu l’occasion de se trouver aussi proche d’elle, que ce soit par égard pour d’autres ou pour elle. Et à présent qu’elle s’était aussi bien installée sur ses genoux... Il se pelotonna tout contre elle, déposant un baiser tendre dans sa chevelure.
La jeune femme comprit, puisqu’Elen restait tranquillement assis au lieu de l'entraîner comme souvent au pas de course, qu’il se trouvait bien avec elle dans leurs nouveaux appartements. Alors pour continuer la visite des lieux, elle lui demanda, ayant aperçu les grimoires ouverts sur le bureau : - Tu travailles sur quelque chose de précis ? - Je traduisais des textes... Cela occupe, la nuit, quand je ne suis pas en forêt. La bibliothèque est si riche... Et si peu d’ouvrages sont accessibles aux néophytes... Répondit-il, appréciant le doux parfum que dégageait la chevelure de l’Olympienne. - Je pourrai t’aider si tu veux, cela m'entraînera par la même occasion. - Ce sera avec plaisir. J’aime te voir concentrée... Tu fais cette moue particulière... Déclara-t-il, avant de tenter de l’imiter avec un succès très modéré. - Tu te moques ! Fit-elle sur un air de reproche, avant de rire de sa mimique. Je fais vraiment cette tête-là ? - A peu près comme ça, oui... Dit-il dans un sourire, avant de renouveler sa pâle imitation de l’Olympienne, qui la fit rire de nouveau. - J’espère que je n’ai pas des mimiques comme ça pour tout ! - Non... Mais tu as des yeux très expressifs... Et un regard... Remarquable ? Incroyable ? Merveilleux ? Extraordinaire ? Éblouissant ? Il ne trouvait pas de mot pour les décrire. Lorsque ses yeux croisaient ceux de l’Olympienne, il avait chaque fois l’impression que son coeur manquait un battement. Elle possédait cet incroyable pouvoir sur lui : celui de le rendre ivre de bonheur par un simple échange de regard. - Ah ? Ses joues rosirent. Ma grand-mère me disait toujours que j’avais l’air aussi réveillée qu’une marmotte en plein Engourdissement... - Quand tu me regardes, j’ai l’impression que... Que plus rien d’autre que nous n’a d’importance. - Je ne vais plus oser te regarder alors... Elle prit la main du Loup et déposa un baiser dans sa paume, son visage dissimulé par ses mèches brunes. - Je... Non... Ce serait... Lâcha-t-il, soudain intimidé, tant par les propos que par les actes de sa compagne. Dommage... Prononça-t-il dans un souffle. - Imagine qu’on m’accuse de vouloir perturber le Chaman du Clan des Loups... On en a pendu pour moins que ça je suis sûre. - Mais... Il laissa glisser une main dans les cheveux de sa fiancée, écartant les mèches de ses yeux de miel, leur regard s’amarrant fermement l’un à l’autre. C’est ce que tu fais, Isa... Tu me... Ses doigts se glissèrent tendrement sous le menton de la jeune femme et dans un mouvement désormais familier, son visage s’approcha lentement du sien. ...Perturbes... Acheva-t-il dans un souffle, avant de la brûler de ses baisers. - Oh... Glissa-t-elle lorsqu’il le lui permit de nouveau. Comme le Loup avait tendance à tout prendre au premier degré, elle profita du petit avantage qu’elle se présumait et continua, avec une pointe d’humour :Mais... Tu me le dirais si j’abusais. Le Loup sentit la main fraîche de la jeune femme se faufiler sous son vêtement de sa taille jusqu’à son dos, comme une petite souris venue se blottir au chaud. La manœuvre pour déstabiliser un peu plus l’Elfe ne se compléta pas d’une œillade aguicheuse telle que les maîtrisaient les Sœurs du Havre, mais si le savoir-faire n’y était pas encore l’intention, par contre, se faisait nettement sentir. On ne pouvait croire qu’une servante du Temple d’Aphrodite garde une parfaite innocence quant aux Choooôôôoooses de la Vie, comme disait si poétiquement Dalhia. Avec tant d’autres bécasses de son âge, elle avait gloussé en épiant de ses yeux d’adolescente quelques ébats fort peu discrets de notables soucieux d’afficher une piété exemplaire envers Sa Grâce. La Sœur Intendante se contentait de les chasser de leurs points d’observation à grands coups de torchon pour les réexpédier à leurs corvées. Il fallait bien que jeunesse se passe... Ses pages du soir de l’époque n’en contenaient pas moins d’anecdotes à faire rougir des cariatides. - Peut-être... A moins que... Il bascula en arrière, l'entraînant avec lui sur le lit. A moins que je n’abuse en retour ! Elle se fendit d’un petit cri de surprise avant que ne s’affiche un tendre sourire sur son visage. - Le Chaman a l’air de tenir à ses prérogatives, on dirait. Pour toute réponse, elle n’eut droit qu’à un regard ardent, phoenix de l’intense instant qu’ils avaient partagé dans la salle aux étoiles. Cette force envahissante se retrouva bientôt dans ses mains avides qui caressèrent étroitement le dos de l’Olympienne tandis qu’il couvrait son visage de baisers. La sensation d’appartenir à Elen enivra la jeune femme et ses joues prirent rapidement des couleurs. Elle délaissa le jeu - qui lui correspondait bien peu au final - de tentation du Loup à coups d’artifices convenus. Il n’y avait qu’une vérité, authentique et exacerbée par leur intimité qu’elle désirait lui montrer : elle était sienne et lui faisait confiance. Dans un murmure qui laisserait carte blanche à son fiancé elle lui dit simplement, son regard brillant rivé au sien : - Je t’aime... - Ne li lelo... Murmura-t-il à son tour avant des les engager, en initiateur tendre, dans la découverte assidue de leur nouvelle complicité. [...] |
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Ils s’entre-regardèrent, blottis l’un contre l’autre, bien au chaud sous les couvertures. Un sourire tendre pour sa fiancée : le Chaman semblait plus radieux que jamais. Leurs coeurs et leurs âmes avaient chanté à l’unisson comme jamais il ne l’aurait cru possible. Et ils s’étaient abandonnés à cette spirale de douceur. Alanguie à ses côtés, Isa jouait de ses doigts sur le torse du Loup. L’idée de se réveiller chaque matin et pour une saison entière avec ce souvenir de “la veille” en tête lui était parfaitement exquise.
- Tu vois, tu cherchais des méthodes pour que je me sentes chez moi ici. Par jeu, elle lui mordilla l’épaule. Tu en as trouvé plein ! Elle n’avait aucune idée de l’heure qu’il pouvait être mais n’eut été le rituel à accomplir, elle n’en aurait eu cure. Pourtant elle serait bien obligée de quitter ce nid douillet avant la prochaine aube... - Oh ! Tu crois que les robes seront prêtes ? Fit-elle alors qu’elle y repensait soudain. - Hum ? Je crois, oui... Tu veux aller la chercher tout de suite ? Demanda-t-il, encore plongé dans un état légèrement cotonneux. - Non...Grommela-t-elle le nez fronçé, comme une enfant à qui on proposait quelque chose qui ne lui convenait pas du tout. Mais elle n’aurait pas plus de courage plus tard... Et se résigna :Si... Il se blottit davantage encore contre elle, en signe évident de protestation. - Mais... C’est qu’il faudrait se lever... Et s’habiller pour ça... Souffla-t-il, non loin de l’oreille de sa fiancée, avant d’en mordiller le lobe. Elle soupira tant la tâche lui parut ardue et Elen faisait de son mieux pour lui saper toute envie de quitter la couche conjugale. - Ah ! Tu ne m’aides pas ! Fit-elle avec un petit rire, tortillant mollement son cou pour essayer d’esquiver le Loup, sans grande réussite. Il faudra bien pourtant... - Bon, bon... Abdiqua-t-il, sans pour autant faire mine de se relever. - Reste là, si tu veux. Je reviens vite. - Hey ! Non ! Ne pars pas sans moi ! Fit-il, se redressant d’un bond. Elle éclata de rire. - D’accord d’accord ! Alors hop ! Elle voulut le pousser hors du lit avec ses jambes mais le rapport des poids n’était clairement pas en sa faveur et ce fut plutôt elle qui recula jusqu’au bord... Tu triches ! Pour se venger elle expédia sans autre forme de procès la couverture à leurs pieds et chercha sa tunique abandonnée quelque part sur le tapis. Lui profita de quelques secondes pour jeter un coup d’oeil peu subtil et discret sur sa future épouse puis il sauta à bas du lit, cherchant à son tour ses vêtements. Il se rhabilla avec célérité, de peur qu’elle ne s’échappe, trop pressée de porter ses nouveaux atours et il vint l’attendre contre la porte de la chambre, bien décidé à exiger un baiser en guise de droit de passage ! Toute pimpante et apprêtée, elle le lui concéda non sans afficher un petit air mutin. La taxe perçue serait remboursée, et au centuple, que le Loup se le dise ! Ils filèrent jusqu’à l’atelier de couture, main dans la main. Elen, EdL
Chaman du clan du Loup au conseil des Lunes Responsable de l'Éclat des Lunes ♥ |