Legends of Olympia : La Ballade des Mémoires - Comment hériter d'un nom grotesque.
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Comment hériter d'un nom grotesque.
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Dernière réponse le 28/06/2009 à 10:49

hs Par Bouffe-Laitue  le 27/06/2009 à 10:52

Saison des fruits, Année 1544 du calendrier du peuple Sauvage

Luminae occupée… Nul représentant du peuple de Gaïa n’aurait jamais imaginé si terrible situation. En tout cas, certainement pas Gylanef.
Les nouveaux membres du conseil avaient été élus à peine deux saisons plus tôt et cette élection avait entrainé des changements dans l’administration de la ville des marais. Des changements bénéfiques pour Gylanef puisqu’il s’était alors retrouvé messager du conseil, un poste oh combien ingrat, mais qui permettait de voir du pays. On parlait plus ou moins de négociations avec des Géants et Gylanef avait déjà eu à porter des messages à des invités Elfes, mais jamais encore il n’avait vu de Nains.
On en parlait beaucoup, de ces fameux Nains. Des créatures petites et hirsutes, mais endurantes et mortelles la hache à la main. Tout l’opposé du peuple sauvage en somme.

L’histoire opposant les deux peuples remontait à très loin, quand un groupe d’explorateurs Nains avait pénétré la Forêt des Ombres. Non seulement ils n’y étaient pas invités, mais en plus, leur comportement vis-à-vis de la forêt avait été intolérable, enfin s’il fallait en croire la légende. Naturellement, l’histoire s’était mal finie et depuis, ce n’était que guerres et conflits entre les deux peuples.
Les mystérieux cataclysmes de l’an 1540 n’avaient rien arrangé. Des hordes de Nains avaient déferlé sur la Forêt des Ombres pour couper du bois sans aucun respect des traditions ancestrales. Profitant du fait que les Hommes Sauvages étaient privés de magie, les nabots avaient ajouté au massacre d’arbre le massacre d’Hommes Sauvages.

Dernièrement, la situation s’était améliorée. Le retour de l’Université de magie à Luminae avait permis aux Hommes Sauvages de contre-attaquer durement et quelques citoyens harcelaient les Nains aux alentours de Radar Bek, les empêchant d’aller profaner davantage la forêt.

Apparemment, les Nains n’avaient pas apprécié. Une saison plus tôt, le conseiller Raven avait chargé Gylanef de porter un message urgent aux autres membres du conseil. N’ayant rien de mieux à faire, le porteur avait lu le message. Une armée de Nains et de Géants fondait sur Luminae. D’après la missive, la situation était loin d’être grave, mais le peuple allait encore devoir se serrer la ceinture le temps que la situation ne soit réglée.

Une semaine plus tard, Nains et Géants pénétraient dans la ville de tous cotés. Ce souvenir hanterait Gylanef pour le restant de ses jours. L’armée d’envahisseurs s’était concentrée sur le centre de la ville, laissant la plupart des citoyens s’enfuir, mais certains soldats s’étaient attardés sur les habitations. Comment oublier ça ? Les Nains étaient comme fous. Ils cassaient et détruisaient, la colère se lisait dans leur regard. Les Géants semblaient plutôt amusés, plaisantant devant les forfaits commis par les Nains.
Gylanef avait pu fuir, mais tous n’avaient pas eu cette chance.



hs Par Bouffe-Laitue  le 27/06/2009 à 10:53

Un beau jour, le conseiller Raven envoya le jeune homme porter un message de la plus haute importance au roi des Nains en personne. Le conseiller était resté très discret quand au contenu du message, mais il avait laissé entendre qu’il s’agissait d’une réponse à un odieux chantage.

Gylanef n’avait pas trainé. Il avait parcouru la forêt, puis les plaines, avant d’atteindre les contreforts de Radar Bek. Au pied des montagnes, une tente majestueuse gardée par des membres d’élites de la Garde de Pierre abritait le fameux roi Nain. L’Homme Sauvage redoutait plus que tout cette entrevue, même s’il lui suffisait de transmettre le message et de repartir. Le roi Kyp était connu pour sa haine envers le peuple de Gaia et ses expériences diaboliques entrainant fort souvent la mort des témoins.

En entrant dans la tente, sous le regard méfiant des gardes de chaque coté de l’entrée, Gylanef eut la surprise de découvrir un Nain pas plus impressionnant qu’un autre, étrangement jeune, et en train de se faire engueuler par une Naine toute petite à propos d’une nette diminution du stock de poudre de réserve.
Voyant l’Homme Sauvage, le roi en profita pour échapper à la furie et couru vers le messager.
- Ah, enfin ! C’est la réponse du conseil ?
- Euh… Oui, enfin je crois.
- Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’ils auront pris leur temps. Ca fait presque plus d’une saison que je leur ai soumis ma proposition de traité.
Pendant que le Nain lisait la lettre, Gylanef eut tout le loisir de détailler cet étrange personnage. Non seulement, il était jeune, mais en plus il avait la barbe soigneusement taillée, ce qui le différenciait de ses compatriotes et lui donnait un air soigné qui l’éloignait encore d’avantage des Hommes Sauvages. A coté de ça, son visage présentait des traces de brulures récentes, peut-être récoltées à la guerre.
- Qu’est-ce que c’est que cette connerie !
Sursautant, Gylanef se focalisa sur l’instant présent :
- Pardon ?
- Ce message ! Raven sait-il au moins à quoi il engage son peuple ?
- Euh… Je vous demande pardon, mais j’ignore tout du contenu de ce message.
- En gros, Raven m’annonce ici qu’il a décidé d’accepter tels quels les termes du traité écrit par moi. Remarque, je ne vais pas m’en plaindre, mais ce n’est pas ainsi que je voyais des négociations. Et c’est pour me dire ça qu’il a réfléchi une saison complète ? Et qu’est-ce que c’est que ces imitations de signatures pour Lya et Saté ? Ils sont morts ?
Gylanef était complètement pris de cours. Cet interrogatoire n’était absolument pas prévu au programme.
- Ecoutez, je ne suis qu’un messager, je ne suis nullement un ambassadeur.
- Mouais…
Le regard méprisant du roi Nain déplut souverainement au jeune homme.
- Ecoutez ! Je ne sais pas comment vous fonctionnez, mais chez nous, on ne régule pas tout avec des morceaux de papier signés, le peuple est libre et si les conseillers n’ont pas envie de débattre, rien ne les y oblige !
- Pfff, c’est bien pour ça qu’à mes yeux, vous resterez toujours de vulgaires animaux. Accessoirement, c’est à cause de ce comportement que le marais infâme que vous appelez ville est actuellement bourré de bombes prêtes à exploser à la moindre étincelle.
- Je ne vois pas en quoi le fait d’être libre…
Le roi Kyp balaya les futurs arguments d’un geste de la main.
- Tu es trop jeune, voilà tout ! Et un animal n’a pas l’intelligence requise pour comprendre ces choses-là. On va te trouver une tente où rester. Tant que ton précieux Raven n’aura pas présenté publiquement les excuses de ton peuple envers mes Ancêtres, tu resteras ici.
- Quoi ? Je vais servir d’otage ?
- Ouais, si tu veux. Mais j’aurai besoin de lui écrire après ça et tant qu’à faire, autant éviter d’envoyer un Nain patauger dans votre bourbier.



hs Par Bouffe-Laitue  le 27/06/2009 à 10:54

Gylanef n’avait pas imaginé son incarcération comme ça. Il pensait être amené dans un sombre souterrain dans lequel il serait nourri au pain sec et à l’eau, au lieu de quoi il eut droit à sa propre tente et il pouvait même en sortir à condition d’être accompagné. Le seul point noir fut le premier repas où ses geôliers eurent l’affront de lui proposer de la viande.
Le temps passa et les arbres lui manquaient terriblement, mais un beau jour, Kyp vint le voir. Les yeux plein d’espoir, le sauvage demanda :
- Ca y est ? Les excuses publiques ont été faites ?
- Toujours pas ! Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il prend son temps.
Gylanef soupira. Connaissant son peuple, c’était prévisible. Les Hommes Sauvages aimaient vivre leur vie comme ils l’entendaient, sans se préoccuper des soucis de l’existence. C’était tout autant valable pour les membres du conseil.
- Alors que me voulez-vous ?
- Figure-toi que je m’ennuie, Bouffe-Laitue !
- Et alors ?
- Et alors, comme il va bientôt falloir considérer les sauvages comme des êtres à peu près intelligents, autant en fréquenter un pour voir si ça vaut le coup ou pas. Oui, je sais, c’est une idée parfaitement stupide, mais elle vient de ma conseillère. Alors si je passe outre, j’en entendrai encore parler dans trois saisons. Comme je suis sympa, je t’autorise à m’appeler Majesté.
- D’accord. Moi, c’est…
- On s’en fout, Bouffe-Laitue ! Viens plutôt, j’ai un truc à te montrer.
- …

Le Roi et le jeune homme s’éloignèrent du campement jusqu’à une prairie reculée qui comportait nombre de cratères.
- C’est quoi ça ?
- C’est une sorte de terrain d’entrainement privé et temporaire. Je vais te montrer ce que savent faire les peuples civilisés, tu vas en rester sur ton cul poilu.
Le Nain posa son sac à dos et en sorti différents petits sachets. Intrigué, Gylanef s’approcha.
- De quoi s’agit-il ?
- On appelle ça de la poudre ! Ce sachet contient du salpêtre, celui-ci du souffre et là… Celui-là, je ne sais pas ce que c’est, mais on s’en fout complètement. Le but du jeu est de mélanger abondamment différentes poudres en variant les doses et de voir ce qu’il se passe une fois qu’on y met le feu. Tiens, par exemple, en prenant un peu de ce truc rouge et en le mélangeant avec le contenu de ce sachet… D’après mes souvenirs, il n’y a même pas besoin d’étincelle, ça explose au moindre choc.
Le résultat fut envoyé à toute force contre un arbre et retomba mollement sur le sol. Un peu déçu, Gylanef commenta simplement :
- Il semblerait que quelque chose n’ait pas fonctionné.
- Oui, bon, ça arrive…
Tout en bougonnant, le Nain partit rechercher son sachet. Alors qu’il était à mi-chemin, le mélange explosa, pulvérisant l’arbre et envoyant le Nain voler par-dessus son prisonnier. Il fallut que Kyp envoie trois grandes claques au jeune homme pour le calmer.
- Mais qu’est-ce que c’était que cette chose démoniaque ?
- Ca, Bouffe-Laitue, c’est l’apothéose de la recherche scientifique !
Kyp portait un grand sourire et ne semblait pas plus gêné que ça par ses habits à moitié consumés et sa barbe encore raccourcie.
- Tiens, en guise de tentative de rapprochement culturel, pourquoi n’essaierais-tu pas ?

Gylanef refusa de toucher de près ou de loin à ces trucs bizarres. Les jours passèrent et Kyp montra au sauvage différentes explosions, manquant d’ailleurs mourir plusieurs fois. Le Nain était tout content, parce que pour ces séances de « rapprochement culturel », Alema le laissait emprunter de la poudre.
Un jour, alors qu’il préparait un mélange spécial feu d’artifice, il s’en ouvrit à son invité :
- Tu sais, j’aurais jamais cru dire ça à une saloperie de bouffeur de laitue, mais je suis bien content que tu sois là. Je n’avais jamais autant fait de mélange explosif depuis mon entrée dans la Garde de Pierre ! En plus, ça m’occupe en attendant que ton conseil se bouge les fesses et fasse ces saletés d’excuses publiques. Allez, faut que ça pète !
A le voir s’amuser tout content sur son mélange, Gylanef eut un remord.
- Vous savez, quand Raven aura fait ces excuses, ça ne changera rien. Les Hommes Sauvages sont libres. Si certains d’entre nous veulent vous attaquer, personne ne les en empêchera. C’est dans notre culture. Et puis, la parole d’un conseiller n’est absolument pas la parole du peuple. Même si Raven est sincère lorsqu’il fera son discours, ça ne voudra rien dire pour le peuple.
Kyp ralentit sa préparation, puis s’arrêta complètement. Finalement, il releva la tête et regarda le jeune homme. Son regard était étrange. Apparemment, il savait déjà tout ça.
- Ecoute Bouffe-Laitue, j’en ai marre de cette guerre. J’ai toujours haï les sauvages, et pour de bonnes raisons, mais j’en ai marre. Ca fait des siècles qu’on se tape dessus et ça n’a jamais rien amené de constructif. Alors, nous avons pris votre ville, ton conseiller à la noix va faire ses excuses au nom de son peuple et on va tout oublier. Et si les sauvages ne sont pas capables de reconnaître une chance quand on la leur tend, alors ça ne pourra que très mal se terminer. Ne sous-estime pas la colère des Nains. Si l’unique solution qu'il leur reste est d’exterminer les sauvages, ils le feront.
Après un petit silence, Gylanef demanda :
- Vous donneriez vraiment un tel ordre ?
Kyp sembla vieillir de plusieurs siècles.
- S’il faut en arriver là, oui, je le ferai. Mais je ferai aussi tout mon possible pour éviter d’embarquer le peuple Nain dans une telle croisade. Tu vois, Bouffe-Laitue, avant ça m’amusait de partir en guerre, mais maintenant que c’est moi qui donne les ordres, ça devient lassant. Et puis, j’ai envie de m’installer à Kazad a Gorog, d’arrêter de voyager, de prendre une épouse…
Gylanef remarqua que le regard du Nain était tourné vers le campement. L’Homme Sauvage ne s’était pas assez promené pour remarquer s’il s’y trouvait des Naines à part la conseillère, mais ça n’avait pas vraiment d’importance. Gylanef savait que son peuple continuerait à attaquer les Nains. Par conséquent, la guerre continuerait.

Il fallut longtemps avant que la déclaration de Raven ne soit enfin faite publiquement. Fidèle à sa parole, le roi Kyp annonça à Gylanef qu’il était libre de partir.
A la lisière du campement, l’Homme Sauvage se retourna vers le roi.
- Vous savez, majesté, je n’aurais jamais cru dire ça un jour, mais ça m’a fait plaisir de vous connaître. Je sais maintenant que vous n’êtes pas le fou sanguinaire dont on m’avait parlé. Enfin, vous n’êtes pas que fou sanguinaire.
- Merci Bouffe-Laitue. Au moins, j’ai découvert que certains sauvages pouvaient apprécier les belles explosions. A ce propos, j’ai quelque chose à te confier avant que tu ne partes.
- Ah oui, c’est vrai ! Vous avez un message pour le conseil de Luminae ?
- Non, on s’en fout du conseil.
Le roi se retourna et attrapa trois sachets de tissu qu’il tendit à son hôte.
- Voilà ! Comme ça, si tu t’ennuies, tu pourras faire quelques pétards. Et j’ai entendu dire que ton peuple n’arrivait pas à déminer les bâtiments. Va donc faire quelques explosions du coté de votre école de magie, ça pourra m’être utile.
- Merci, majesté. Et avant de partir, je voudrais que vous sachiez que je m’appelle Gylanef.
- C’est noté, Bouffe-Laitue !
Camouflant un sourire, Gylanef accrocha les sachets de poudre à sa ceinture et s’apprêta à partir. Juste avant de se mettre en route, il surprit un regard entre Kyp et la conseillère Alema.
Souriant pleinement, l’Homme Sauvage se mit en route et lança en guise d’adieu :
- Je vous souhaite la meilleure vie possible à tous les deux !



hs Par Bouffe-Laitue  le 27/06/2009 à 10:54

Une saison plus tard, Alema décédait dans une attaque de renégats sauvages. Le peuple de Gaïa, irrité par un traité jugé humiliant, refuse de reconnaître ce dernier et recommence ses attaques. Trois saisons après, le roi Kyp met au point l’arquebuse, arme de choix dans la lutte contre ses ennemis de toujours. Le traité est rompu. Kyp démissionne de son poste.
Quelques années plus tard, les Lestrigons attaquent Luminae. Un commando de Nains envoyé par le roi Grimbar en profite pour faire exploser les charges explosives toujours présentes. Luminae est rayée de la carte. Poséidon en colère détruit Kazag a Gorog. Kyp meurt dans l’inondation.

*****

La Grande Cuvée, an 1550 du calendrier Sauvage

Fernliae n’est pas Luminae, mais elle est tout ce qui reste désormais au peuple de Gaïa. Un jeune homme se présente aux portes de la ville. Une courte fourrure blanche, une longue queue et vêtu uniquement d’une ceinture à laquelle pendent trois sacs de tissus. Un garde arrête le nouveau venu.
- Si tu viens aider à la construction de la nouvelle cité, sache que tu es le bienvenu, mais tu dois faire enregistrer ton nom.
- Le peuple sauvage fait dans l’administratif maintenant ?
- S’adapter ou disparaître, comme on dit. Ton nom ?
Le nouveau venu réfléchit un instant, puis un sourire éclaire son visage.
- Appelez-moi juste Bouffe-Laitue.



hs Par Sachiël  le 27/06/2009 à 17:56

[HRP: Terrible ta chronique! Continue, ça promet de bien belles histoires]



geant Par Pizgup  le 28/06/2009 à 10:49

J'aime beaucoup. Chronique très sympa : continue sur cette voie