Un sale quart d'heure ? | |
Topic visité 495 fois Dernière réponse le 17/12/2012 à 15:13 |
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La journée pénible et les ultimes révélations d’Etelion avaient assommé le groupe. N’eut été la grande aventure de Dalhia contre l’horrible monstre, ils auraient tous sombré dans leurs funestes pensées, hypnotisés par les flammes dansantes du feu de camp.
Isa prit un moment pour incinérer ce qu’il restait du traître, comme elle lui avait promis. On était aussi loin des rites des Loups que de la Tanière mais il avait choisi, par ses agissements, de s’en contenter après tout... - Bwadada ! Mwanana ! Lilei réclamait à corps et à cris sa mère, tapant frénétiquement sur les côtes de son père. Elle avait choisi son camp, et bien en plus : si on lui avait lui aussi donné voix au chapitre, il se serait volontiers rangé du côté de sa femme pour s’administrer une bonne correction. Malheureusement, la question ne lui appartenait pas. - Donne-la moi, je vais écrire un peu, tu pourras te reposer. Dit l’Olympienne au Loup lorsqu’elle revint près de lui. Malgré tout, le ton de sa voix restait frais. - Ça ira, ne lele... Ça ira... - Bawaaaaa ! Nawaaaa ! - Bon, bon... Va voir maman, si c’est ce que tu veux... Il tendit la petite à Isa, avant de prendre de nouveaux coups de sa minuscule mimine en représailles. - Doucement, Lilei, ça ne se fait pas de gigoter autant. Lui dit sa mère, les sourcils froncés. L’enfant s’agrippa fermement aux vêtements de sa mère, l’air satisfaite, adressant un sourire éclatant à Isa. Et celle-ci ne put s'empêcher de lui sourire en retour, malgré ses caprices évidents. La petite lui avait tant manqué, aujourd’hui... Elle lança un regard à son époux puis se détourna. A quoi bon lui proposer son aide pour lui passer un onguent ou lui faire un bandage; il refuserait de toute façon : Les Chamans se débrouillent tous seuls, c’est bien connu... - Allez, viens aider maman ma puce, il y a beaucoup à noter ce soir... Fit-elle tandis qu’elle regagnait leur tente. Le Chaman fixait les flammes, sans ciller, la chaleur toute proche gagnant son visage. Il se sentait misérable. Il tenait le bonheur au creux de sa main, il l’avait depuis tout ce temps et il venait de le remettre en question. Juste parce qu’il avait eu peur. Non pas qu’il ait pu douter un seul instant des capacités de sa femme : elle lui avait sauvé la vie trois fois déjà, de manière évidente, et bien plus sans doute. Mais il avait craint pour elle : cette crainte l’avait rongé. Et il l’avait blessée dans son orgueil. Pire encore : il lui avait fait subir très exactement ce que lui se refusait à ressentir. - Bin ouais. Tout Chaman que t’es, Elen, Isa te montre que t’es quand même souvent un peu crétin. Tu disais ça de celui d’avant, tu te souviens ? - Humph... Bien sûr, Evonis avait raison. D’un bout à l’autre. Mais que faire : une erreur n’en est une que parce qu’elle a été commise. Se morfondre ne changerait rien. Mais aller s'aplatir devant Isa, il le sentait, ne règlerait absolument rien. Au contraire. Ce serait jeter de l’huile sur le feu : son épouse penserait qu’il imaginait s’en tirer à bon compte juste par des excuses, avant de réitérer. Or, pour lui, il n’était plus question de recommencer de telles bêtises. Sa famille avant tout le reste. Aileen, elle, était restée dans les bras d’Evonis. Immobile, les voix d’Elen, Isa et Evonis ne lui parvenaient que vaguement, comme s’ils étaient très loin. Sa fatigue, tant mentale que physique, avant fini par avoir raison d’elle. Les cris de Lilei l’avaient tirée un instant de sa torpeur mais maintenant que la petite avait eu ce qu’elle voulait, ce n’était plus qu’une question de temps avant qu’elle ne cède de nouveau à sa fatigue. - On doit aller à Luminae. Ça va faire une trotte. Je suppose que vous ne passerez pas par les terres impériales ? Lança Isandre qui faisait l’inventaire de sa besace. Des potions manquaient, utilisées dans l’âpre combat contre les geôliers de Quatar et le dernier rituel avait ponctionné quelques ingrédients rares. Elle serait volontiers retournée à Lardanium avant de continuer la mission confiée par Son Altesse. Car se contenter de sauver sa suivante n’était qu’une petite partie de l’affaire. - Sans doute. Je ne connais pas bien la région. Isa saura mieux vous renseigner à propos de notre itinéraire. - Oh oui, quelque chose dans ses cordes de choisir entre tout droit à l’Ouest ou tout droit à l’Est... - C’est surtout de votre crochet dont elle pourra évaluer la faisabilité. La vieille dévisagea le Loup. Elle avait lancé le sujet essentiellement pour voir si Fulminor et elle continueraient avec le groupe et s’attendait à ce qu’Elen lui dise d’une façon ou d’une autre que leur collaboration touchait à sa fin. Le contraire la surprit. - A moins qu’elle ait aussi envie de revoir sa cité. Une chance, en somme, que cela ne lui manque pas plus que ça, hein ? Fit-elle avec un petit air entendu. Bien qu’Isa ne se soit pas rendue à Lardanium depuis deux années, elle ne se souvenait que d’un peu plus d’une douzaine de jours loin de sa ville de jeunesse et la nostalgie n’avait pas encore de prise sur elle. Dans le cas contraire, sa querelle récente avec Elen aurait pu l’inciter à regagner la Cité Blanche... - Ce serait son droit le plus légitime. Et personne, ici, ne s’y opposerait. Tant que cela ne les met pas en danger, elle ou Lilei. On ne renie pas ses origines. Quoi qu’il arrive. |
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Le Chaman souleva son haut, pour tâter ses côtes. Les cicatrices laissées par l’Ennemie trônaient ici. Il compta : une, deux... Pas mal, Aileen. Vraiment pas mal... Efficace. Ils étaient quittes, au moins. Il lui avait rendu sa vie d’avant, et elle... Elle lui avait rendu la vie. Les dommages lui semblaient peu importants. A part son amour propre, rien à soigner, en somme. Il avait de vagues réminiscences de ce qu’il avait vu dans les Enfers, et l’avertissement de Isa résonnait dans sa tête.
La potion qu’il consomma le soulagea : il constata que ses côtes, ressoudées, sans doute encore légèrement fracturées, ne le gênaient plus autant pour respirer. Restait à résorber l’oedème et les diverses contusions, mais au moins, il pourrait suivre le rythme soutenu de son épouse. Elle s’était donné du mal pour gagner en endurance, et il devait constater qu’elle avait bel et bien réussi. - Merci Isandre. La vieille, qui n’avait pas manqué de revoir avec la satisfaction d’un artisan devant son oeuvre une partie des cicatrices du Loup, manqua s’étouffer : - Bois-en une autre, on dirait que tu as de la fièvre. Il ne pouvait que délirer pour la remercier. - Non, non. Merci d’avoir poursuivi le rituel. Sans ça, ce serait elle qui l’aurait fait... - Ah ! Ça... Ne me remercie pas. Ça m’amuse beaucoup plus de risquer ta vie que celle d’Isa. Tu comprendras facilement pourquoi. - Il n’empêche... J’aime aussi autant que l’on joue avec ma vie qu’avec celle de ma femme. - Et quant à moi, j’aurais préféré qu’on ne joue avec celle de personne... Fit Aileen, que l’écoute de la conversation entre Isandre et Elen avait tenue éveillée malgré tout. Le Chaman ne devait sans doute pas considérer le rituel auquel ils avaient procédé comme un jeu mais l’emploi du mot n’était pas vraiment du goût de la Cerf. - Ça a été utile, au moins ? S’enquit-il. - …Oui, ça je dois bien le reconnaître. Répondit-elle, après une brève hésitation. Mais... Est ce que ça en valait vraiment la peine ? - Tout dépend de la nature des informations que vous aurez glanées... - Rien que nous n’aurions pu apprendre autrement... Fit Aileen en soupirant. Elle garda le silence quelques secondes puis se chargea de lui répéter ce qu’ils avaient appris. Elle ne faisait pas ça de gaieté de coeur, songer à nouveau à Etelion était loin de lui plaire... Mais Elen ne savait rien de ce qu’il s’était déroulé et mieux valait l’informer de la nouvelle direction qu’ils allaient prendre : Celle de Luminaë. - Donc vous êtes bien décidés à les poursuivre ? - On n’a pas vraiment le choix. - Depuis quand t’es devenu un froussard ? - Emmener Lilei face au danger ne me plaît pas du tout. Ici, nous n’avions pas le choix, en quelque sorte. Nous étions les premiers prévenus. Mais là, les peuples vont devoir s’agiter. Hors de question que ma femme ou ma fille fassent les frais des plans de l’Ennemie ! Ce brusque élan de sincérité arracha une grimace de douleur au Chaman. - Ouais, comme quoi, ta fille est moins froussarde que toi... - Mouaif... - Ta gamine serait à l’abri à Lardanium... - Avec les esclavagistes ? Elle ferait une prise de choix, oui. De là à la déclarer en sécurité... La vieille eut une petite moue amusée. Elle n’imaginait pas une seule seconde que le couple puisse lui confier la petite mais cela aurait été une belle aubaine, toute de même. Quoique... Elle se rappelait son premier contact avec la bâtarde où son aversion avait fait long feu. Elle serait jolie avec ça sur les bras, à devoir s’en occuper ! Sa plaisanterie perdit immédiatement tout son charme. Elen, EdL
Chaman du clan du Loup au conseil des Lunes Responsable de l'Éclat des Lunes ♥ |
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Aileen soupira, sa tête reposant de nouveau contre Evonis. Et les voilà de nouveau prêts à partir à l’autre bout du monde. Et en compagnie d’Isandre, qui plus est... Ses piques incessantes adressées à Elen n’allaient pas être faciles à supporter. Elle finit par se redresser légèrement et son regard se porta un instant sur Elen.
- Elen... Ça va, tes... Tes côtes ? Fit-elle, timidement. La première fois qu’il lui avait fallu tout faire pour sauver la vie d’un ami, l’exercice ne s’était pas déroulé sans heurts et quelques os s’étaient brisés. Cette fois, elle n’était pas sûre de ce qu’il s’était passé, trop concentrée qu’elle était sur le sauvetage du Chaman pour se préoccuper de quelques craquements incongrus... Elle espérait ne pas l’avoir trop amoché... - Ça va, Aileen. Tu as fait exactement ce qu’il fallait. Je te remercie. Et je te dois la vie. - J’aurais aimé ne pas avoir à le faire... Murmura-t-elle, baissant les yeux alors qu’elle fronçait imperceptiblement les sourcils. Ça n’était jamais amusant de savoir la vie de ses amis entre ses mains... - Je sais bien. Je suis désolé Aileen. Mais c’était ça... Ou Isa. Et la perdre... Ça... Je n’aurais... Une quinte le stoppa net, la douleur dans ses côtes l’empêchant de poursuivre plus avant. - Parce que tu crois que nous, on aurait voulu te perdre toi ?! Fit-elle, vivement. Au moins Isa avait l’air de savoir plus ou moins ce qu’elle faisait alors que toi... Tu as agi tout seul, et nous... On a fait ce qu’on pouvait pour que ça ne tourne pas à la catastrophe ! Elle avait eu de la chance qu’Elen ouvre les yeux... Et lui-même devait sans doute le savoir, que la méthode qu’elle avait utilisée pour le ranimer n’avait rien de certain et les chances que le blessé s’en tire aussi bien qu’Elen et Amhand avant lui étaient faibles... Qu’est-ce qu’on aurait fait si je n’avais pas réussi à te ranimer..? Ajouta-t-elle ensuite alors qu’elle semblait s’apaiser. Elle lui en voulait, d’avoir agi aussi stupidement... Et d’avoir failli y rester... - Je suis remplaçable, Aileen. Contrairement à Isa. Elle incarne tout ce qu’il y a de plus pur sur Olympia. Son lien avec Luwö est sans précédent. Dès qu’elle sera rassurée, tu verras, elle pourra plonger dans les transes plus profondément que n’importe lequel d’entre nous. Et c’est la mère de Lilei ! Une fille a besoin d’une mère. - Tu sais très bien que c’est pas de Luwö que je parlais... Elle lui tourna ostensiblement le dos, revenant se serrer contre Evonis. S’il ne voulait pas comprendre, c’était son choix... - Comme des mules... Aileen leva les yeux vers son mari, l’interrogeant du regard. - Parfaitement. Toi aussi, Ailou ! Tous les trois. Et même mamie. Vous en faites des belles de mules, campés sur vos positions. Oh, j’veux être aussi noble qu’un Noble sans en être un. Oh, j’voulais que ce soit moi qui meurs parce que je sais mieux faire que les autres. Oh bah chuis bien contente que ce soit pas la p’tite qui se soit sacrifiée, j’aime autant risquer la peau de l’autre abruti et de ses copains. Oh bah tiens, je suis belle et innocente et j’veux que tout le monde soit pareil - c’est pour ça que je t’adore, hein, ma biche ? ‘fin bon. C’que j’vois c’est que vous vous faites tous la tronche et que moi, chuis là, au milieu à vous regarder faire les pitres et vous envoyer des piques ! - Et alors ? Ça garde les méninges alertes, tu devrais pratiquer un peu plus, mon grand. - Encore une fois, Mamie, quand six-cents ans comme moi tu auras, moins en forme tu seras. Et tes idiots d’amis qui sur la gueule se foutent, bien moins tu aimeras. Vous ne savez pas la chance que vous avez d’être aussi jeune et fringante ! Aileen le fixa un instant, surprise par ses paroles. Elle ne s’attendait pas vraiment à ça. Mais il n’avait pas tort cela dit, même si elle n’estimait pas avoir voulu que tout le monde soit “pareil”... Depuis le début elle pensait que le rituel était une mauvaise idée et les évènements l’avaient plutôt confortée dans son idée. Mais elle ne dit rien et se contenta de fixer le feu d’un air morne. Tout ce qu’elle avait essayé de dire, c’était qu’elle tenait à Elen, et Isa plus encore... Dalhia lui, avait plus ou moins suivi les échanges sans vraiment comprendre de quoi il en retournait. Il avait préféré jouer avec un de ses jolis cailloux trouvés il y avait longtemps, il ne savait plus où mais il y avait un drôle de bâtiment qui ressemblait à une pyramide. Cependant le monologue d’Evonis avait plus ou moins attiré son attention. Au silence qui suivit, il crut bon d’ajouter son mot : - Euh... Et ce fut tout. Ha, non, pas vraiment : - Moi on m’a dit, je sais plus qui c’était mais c’était pas Tizi... On m’a dit que c’était pas gentil de faire aux autres quelque chose qu’on voudrait pas qu’on nous fasse à nous... Il ne savait pas si ce conseil était de circonstance parce qu’il avait du mal à vraiment cerner le sujet de la conversation, mais ça n’avait pas l’air très joyeux. A lui, en tout cas, cette phrase semblait adéquate. - Grands Dieux, gentil... Lança Isandre en se levant, la mine écoeurée. Elle devait fuir avant d’être engluée dans les bons sentiments et l’auto-flagellation où ses “compagnons” de route s’avachissaient à qui mieux mieux.Je vais me coucher, j’en ai assez entendu pour aujourd’hui. Et vous feriez mieux d’en faire autant. La route sera longue demain, et ce ne sont pas les conseils fumeux de Marguerite qui vous porteront. Dalhia regarda Isandre s’éloigner sans saisir le sens de ses paroles. Il avait dit quelque chose qui l’avait vexé ? Non, ça ne devait pas être ça, elle avait parlé de... De Marguerite. Il connaissait une vache qui s’appelait comme ça. Ou alors c’était une chèvre. En tout cas elle faisait du lait et c’était bon. Il baissa à nouveau les yeux et reprit son jeu avec son caillou. Aileen n’avait toujours rien dit mais sa colère avait disparu, en partie. Elle en voulait toujours à Elen mais après l’intervention d’Evonis, elle culpabilisait d’avoir tant persévéré dans ces querelles qui semblaient faire de la peine à son Loup. Elle aurait du s’en douter, pourtant. Elle non plus n’appréciait pas de voir ses amis se déchirer sous ses yeux. Elle comprenait ce qu’il ressentait... Pourtant, elle ne pouvait s’empêcher d’éprouver cette rancoeur à l’égard du Chaman. Elle avait voulu lui dire qu’ils avaient eu peur pour lui et tout ce qu’il trouvait à répondre, c’était que Luwö le remplacerait facilement. Mais elle s’en fichait comme d’une guigne, de Luwö, pas un instant elle n’avait pensé à lui demander son avis ! Qu’Isa soit sa préférée, qu’est ce que ça changeait, pour elle ? Elle ne voulait pas perdre ses amis, c’est tout ce qu’elle savait. De tout cela, Aileen ne dit rien, préférant couper court à la dispute par son silence. Elle se redressa et enlaça Evonis, tendrement. Dans un murmure, elle s’excusa d’être si bornée, de lui faire de la peine. Ce à quoi il répondit que c’était précisément son entêtement qui lui plaisait chez elle, en plus du reste, bien évidemment. Et puis elle se tut, restant simplement là, sa tête posée sur l’épaule de son Loup. - Tu les auras pas volées, tes côtes cassées... Fit-elle à Elen au bout d’un moment. Elle parvint même à agrémenter la plaisanterie d’un sourire. - Tu aurais pu me les broyer que j’aurai préféré la situation à... Le Chaman parut hésiter un instant, puis il se leva, sans terminer sa phrase, ponctuant par un : Laissez tomber. Aileen le regarda se lever, étonnée, et puis, alors qu’il s’en allait elle se renfrogna, reposant sa tête contre Evonis d’un air vaguement boudeur. Et si en plus il ne voulait même pas plaisanter. Tant pis. Aileen, Elfe des lunes du Clan du Cerf
Intendante bien malgré elle ! ♥ |
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Il se dirigea d’un pas hésitant vers la tente conjugale, où l’attendaient Lilei et Isa, occupées à des travaux d’écriture. Sa petite devait dormir, probablement rassasiée. A moins que l’opération ne soit encore en cours. Et Isa devait être concentrée sur les détails de la soirée qu’elle allait ou non consigner dans sa mémoire pour l’éternité à la toute fin de la saison.
Il frappa contre le bois de son bouclier, avant de demander : - Isa... C’est moi... Je peux rentrer ? - Chuuut, pas si fort ! Murmura Isa en ouvrant le pan de toile pour permettre à Elen de se faufiler dans la tente. Elle vient juste de s’endormir et ça n’a pas été une mince affaire. Il sy glissa, l’air penaud, hésitant encore sur la meilleure manière de parler de toute l’affaire à son épouse. Après un bref coup d’oeil sur Lilei, il s’installa près de Isa et tenta de passer un bras par dessus son épaule pour l’attirer contre lui. Cela ne l’empêcha pas de n’avoir aucune idée de quoi dire à sa douce pour calmer les choses. - C’est laborieux... Fit-elle en soulevant sa pile de parchemins encore peu noircis. Elle en profita pour se caler plus confortablement contre Elen. Après une journée pareille... Elle enviait sa fille qui n’avait eu qu’à hurler un bon coup, manger à satiété et s’endormir finalement comme une masse. - J’imagine... Tu noteras bien tout, ne lele. Tout. - Oui... J’ai peut-être... Parlé un peu vite, tout à l’heure. - Non. Tu as raison, ne lele... Tu as parfaitement raison. Et ça ne se reproduira plus. Plus jamais. Je ne veux pas te laisser croire que tu n’as pas ma confiance. Alors je veux que tu te souviennes de mon erreur. Pour que tu puisses réagir comme il se doit si ça devait se reproduire un jour... - Quel choix ai-je quand tu tombes raide mort ? Nous avions tout calculé, tout prévu et... Non, tu fais ce qui te chante sans crier gare. Sans que je puisse rien empêcher. Lorsque je peux réagir, Elen, c’est DÉJÀ trop tard. Cela me rend incapable de te faire tenir ta promesse. Cela doit venir de toi, prends tes responsabilités. Ou prie Luwö qu’il t’accorde autant de vies qu’un chat. Elle essayait de parler avec assurance mais la petite endormie à proximité l’obligeait à chuchoter; ce qui devait ôter, selon elle, beaucoup de conviction à son discours. L’air vaguement détaché qu’elle voulait se donner devait également pâtir des quelques frissons qu’elle ne pouvait contrôler. - J’ai... J’avais peur pour toi, Isa... Peur de te perdre... La jeune femme soupira et se redressa pour reprendre la rédaction de ses notes. - Je dois finir. Avant que la fatigue lui fasse oublier certains détails ou écrire des inexactitudes. Elen ne semblait pas vouloir comprendre. Qu’ils auraient toujours peur l’un pour l’autre, mais que c’était leur synergie qui pouvait vaincre les obstacles. Mais pas s’il l’excluait sans préavis. Que dirait-elle à sa fille quand il pousserait le bouchon un peu trop loin et qu’Isa ou leurs amis ne pourraient rien y faire ? Que papa avait été suicidaire ? Que maman avait été incapable de sauver son père ? [...] Ils passèrent la Rivière Glacée et firent une halte dans les plaines qui s’étendaient au Nord de Lardanium. Les animaux de bât semblables à de petits yaks que les Humains leur avaient confiés en remplacement de la mule et troqués aux pêcheurs de nacre qui en élevaient, commençaient à souffrir cruellement de la chaleur. Isandre serait chargée, entre autres de renouveler leur attelage, tandis qu’ils libéreraient les herbivores pressés de retourner sur les rives du Lac de Givre. Il en serait de même pour les provisions et Isa n’avait pas résisté à l’envie de commander à sa grand-mère quelques spécialités de la capitale. La vieille devrait se préparer à un véritable marathon sur ses trois pattes. Heureusement que les bras musclés de Fulminor seraient là au retour, car que deux mules n’y suffiraient pas. De la butte où ils avaient stationné on devinait, derrière de larges pans cultivés, les murs de la Cité Blanche. Isa s’assit dans l’herbe, sa fille sur les genoux et pointa du doigt vers le Sud : - Regarde, Lilei, c’est là-bas que j’ai grandi. - Tu veux l’y emmener, ne lele ? Pendant que personne ne pourra remarquer... Tu sais, que c’est notre fille. - Non ce ne serait pas prudent. Beaucoup de monde pourrait me reconnaître dans le quartier où j’ai vécu. Ils me poseraient des questions, voudraient savoir où est le père... Notre visite risque de remonter rapidement aux oreilles de Dame de Dang. Je ne lui fais pas confiance, elle a été vexée de perdre Elia. Et puis Lilei est bien trop petite pour se souvenir de quoi que ce soit. Mais nous irons tout de même en balade, si tu veux bien... Elle hésita à donner une explication puis considéra que le secret était inutile. Mes parents ont leur ferme dans les environs, j’aimerais la voir. - C’est amusant... Fit Aileen, un sourire songeur aux lèvres. Finalement, Isa, on ne vient pas d’endroits si éloignés que ça. - Pas tellement en distance non. Mais il y a un monde entre la Cité Blanche et la Foret des Ombres. J’imagine qu’arriver près de Na’helli a dû être malgré tout assez dépaysant pour tes parents et toi. - Pour moi, pas vraiment, j’étais trop petite, je ne me souviens même pas de notre arrivée. Mais mes parents m’en ont parlé un peu. Elle haussa les épaules, feignant l’indifférence. De toute façon je préfère la Forêt des Cendres. - Et la Tanière en particulier, non ? Fit Isa avec un petit rire. - Bien sûr ! Mais je pense que c’est aussi ton cas, non ? Répondit la Cerf, riant elle aussi. - Un endroit aussi confortable, on ne peut qu’avoir envie d’y retourner. Malheureusement, ça ne sera pas pour tout de suite. - Ouais. Et c’est justement pour ça qu’on va en finir vite avec cette histoire comme ça on pourra rentrer chez nous ! Fit Aileen avec ferveur. - Et vivre en paix... - J’y compte bien ! En tout cas je ne compte pas me laisser faire. La Cerf s’étira un instant et puis revint à leur premier sujet de conversation : Lilei sera sûrement contente de voir où tu es née ! - Hélas je ne pourrais lui montrer l’endroit précis, c’est quelque part à l’Ouest d’Ordenum, mais j’étais à peine née quand mes parents ont dû fuir les Lestrygons. Ils se sont installés sur ces plaines où j’ai grandi jusqu’à l’âge de huit ans. Ce n’est qu’ensuite que le Havre m’a recueillie, le seul endroit dont je garde souvenir. Ce sont les soeurs qui m’ont donné ces détails, que ma mère a dû leur dire en me laissant à elles. - Tu me le montreras aussi un jour, le Havre ? - Aucune chance, ne lele, il y a là-bas bien trop de jolies Olympiennes peu frileuses ! Fit-elle avec un petit sourire, comme si elle venait de déjouer une tentative de son mari à s’encanailler. - Mais la plus belle d’entre elles partage déjà ma vie... Non, j’aimerais beaucoup voir à quoi cela ressemble. De loin, parce que je suppose que les Elfes ne sont pas admis dans ce genre de sanctuaire... - Si tu obtenais un laisser-passer pour la Cité Blanche, je pourrais toujours me débrouiller pour te faire visiter le Havre. Messire Erkeos n’aurait probablement pas fait de difficulté, te connaissant. Mais il n’est plus Ambassadeur et personne n’a voulu le remplacer. Le Seigneur Ackron doit être moins facile à convaincre... Autant dire que nous avons le temps d’y repenser, Elen. - Je ne suis pas certain, en effet, qu’un laisser-passer de cet ordre puisse être obtenu. Et on te demanderait toujours de qui est Lilei. Et avec ton affranchi de mari à tes côtés, même les moins malins pourraient comprendre et te honnir. - C’est vrai. Mais c’était le risque. Peu importe à présent. Aileen écoutait la conversation tout en regardant ailleurs, d’un air indifférent. Aphrodite, elle n’en pensait pas que du bien après les déboires qu’elle avait eu à cause d’elle, il fallait bien l’avouer. Mais ce genre de pensées, elle préférait les garder pour elle, par égard pour Isa. - Un jour, nous irons, ne lele. Toi et moi. [...] |
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Isandre revint le surlendemain, jour où Isa allait pouvoir réaliser son rituel. La jeune femme avait choisi de consacrer l’après-midi à la visite à la ferme familiale, du moins ce qu’elle pourrait en apercevoir de loin, et sa grand-mère serait capable de reconnaître sa fille, éventuellement.
Le second Titan passait son zénith lorsqu’on entendit des jérémiades, d’une voix bien identifiable : - Quelle idée d’avoir campé si loin ! J’ai crû que je n’arriverais jamais avant la nuit ! Si c’était pour éviter les patrouilles, c’était bien inutile ! Pas l’ombre d’un homme en armes jusqu’aux murs de la cité ! Evidemment que les brigands ont de beaux jours devant eux, tout va à vau l’eau, moi je vous le dis ! - En tout cas Grand-mère, malgré ta longue marche, tu ne manques pas de souffle, lança Isa, un brin moqueuse. Elen, sa fille qu’il venait de changer dans ses bras, avait laissé à Isa le soin de préparer son sac de voyage, le Chaman ayant déjà mis tout ce qu’il jugeait nécessaire pour la visite dans sa besace pendant que son épouse nourrissait leur fille quelques instants plus tôt. Lorsqu’elle donnait le sein à leur enfant, il trouvait son épouse extrêmement belle ; comme toujours d’ailleurs. Ce petit sourire évanescent qui flottait sur ses lèvres. Et ce regard, qu’elle échangeait avec sa fille, tout l’amour que la mère éprouvait pour la chair de sa chair, rien ne saurait être plus magnifique. Ses yeux pétillaient, exactement comme lorsqu’elle le regardait, lui. Et ces prunelles, il les adorait. Ce tableau, pour lui, représentait tout ce qu’il se trouvait de plus parfait en ce monde : sa femme, merveilleuse et belle, et leur fille, toute mignonne dans ses linges. Il fut interrompu dans ses divagations par Isandre : - Tiens, dit la vieille à Elen en lui tendant un sac léger. Avant qu’elle ne finisse cul nu, ta gamine... Mais ne comptez pas sur moi pour décharger les mules, j’en ai déjà bien trop fait ! Son regard dévisagea chacun des compagnons, à la recherche de celui qui oserait de dire le contraire et elle lâcha les rênes, désormais indifférente au sort des bêtes. Le Chaman lorgna sur le contenu du sac. - Merci Isandre. C’est... Bien aimable. Vous devriez aller voir Isa, passer du temps avec elle et la petite. Venez... - Oui, viens t’asseoir, Grand-mère, nous allons nous occuper du reste. Tu as faim ? S’enquit Isa qui donnait les derniers assaisonnements au déjeuner encore en train de cuire. - Ah ça ! J’ai dû filer à jeun ce matin, pas le temps de me mettre quoi que ce soit sous la dent avec tout ce chemin à faire ! J’espère que ce n’est pas toi qui as cuisiné, ma fille... - Non, non. C’est moi, Isandre. - Oui c’est Elen, ne t’inquiète pas, ce sera bon. Par contre j’ai préparé une tarte. Elle savait sa grand-mère au moins aussi gourmande qu’elle et celle-ci ne se ferait pas prier pour en déguster une part. - Bon et bien... Cette journée n’est donc pas si catastrophique qu’elle s’annonçait... Concéda la vieille. Elen sortit les vêtements, observant avec attention la découpe. En vérité, il cherchait un éventuelle sortilège de l’aïeule. Quelque chose qui pourrait nuire à sa fille ou à sa femme. Il trouva les petits ensembles coquets et beaux. Sans être somptueux, Isandre n’avait pas acheté parmi les tenues les plus simples, semblait-il. - C’est joli, ça, n’est-ce pas, ne lele ? Fit-il, montrant une jolie petite robe ocre avec un petit ruban à la taille. - Oh oui ! C’est ravissant ! Fit la jeune femme en relevant le nez, surprise de l’attention de sa grand-mère pour Lilei. - Il n’y avait que ça, je n’ai pas eu le choix. Coupa court la vieille. Il ne manquerait plus qu’ils croient qu’elle acceptait leur progéniture ! Et pourtant, elle en avait passé du temps dans cette boutique à l’entrée de la ville haute, s’assurant que les matières étaient douces, confortables et que la petite ne risquait pas de grignoter des boutons ou autres parures. - Oh et ça ! Poursuivit-il malgré tout, exhibant une jolie petite robe rouge à capuchon, munie de jupons de dentelle blanche. Elle ne risque pas d’attaper le mal à cause des Titans, au moins. Vous avez extrêmement bien choisi, Isandre ! - Humpf... Eut-elle comme seule réponse, alors qu’elle se disait bien malgré elle, en voyant Lilei, qu’elle serait adorable dans sa nouvelle garde-robe. - Prenez-la un peu, Isandre. Je vais appeler les autres pour le repas. Proposa-t-il, tendant l’enfant ; Isa serait la de toute manière pour veiller sur elle. La vieille haussa un sourcil et attrapa la petite comme un vase dont elle ne saurait que faire. Puis de son passé ressurgirent de lointains souvenirs, ceux où elle était elle-même jeune mère et si elle n’avait jamais vraiment aimé sa fille, au moins avait-elle eu un soupçon d’instinct maternel. Ses gestes se firent moins empruntés, presque tendres... - Faites-lui donc essayer une des tenues que vous lui avez achetées, si le coeur vous en dit. Fit le Chaman, avant de s’en aller chercher Aileen et Evonis, Dalhia rappliquant déjà, ameuté par l’odeur ! - Tu vas voir, elle va adorer jouer les princesses ! Ajouta Isa pour encourager sa grand-mère à partager un moment avec la petite qui serait de toute façon ravie de se prêter à l’exercice, curieuse de ces nouvelles couleurs et tissus qu’elle découvrirait. - Bwaaanana ! Lwa ! Sembla confirmer Lilei dans un sourire éclatant. Elen, EdL
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Elen trouva Aileen tout près de Evonis, entourée par les larges bras du Loup. Quelque chose avait changé en elle. Physiquement. Et mentalement peut-être. Pourtant, elle ne semblait pas malheureuse. Loin de là. Un peu blanche, mais épanouie, il aurait dit.
- Ça va être le déjeuner, vous deux ! Dis donc, Aileen, tout va bien ? Tu es toute pâle ! Pour un peu, je dirais que tu as la même expression que Isa quand elle avait ses nausées, au début, avec Lilei... Evonis et Aileen échangèrent un regard, interloqués. La Cerf se demandait si Elen avait fait exprès de tomber si juste ou si ce n’était qu’un coup de chance... - Euh, non... Non, je vais bien, ne t’en fais pas ! Fit-elle, sans vraiment savoir si elle devait en dire plus ou non... Evonis lui lança un regard insistant. Cela faisait plusieurs jours qu’il négociait avec la Cerf pour qu’elle en parle avec Elen, justement. Pour qu’il l’ausculte. L’Ashka voulait être sûr que tout aille bien, évidemment. Mais Aileen n’avait jamais rien voulu dire, son état devenant pourtant évident, entre les nausées, les sautes d’humeurs et les envies étranges. Pas plus tard que la veille, elle lui avait demandé de lui dénicher des sardines à la fraise et à la crème. Impossible à trouver dans ces régions, évidemment. Par conséquent, elle lui avait fait la tête un tour entier de sablier, avait pleuré un autre avant de finalement lui sauter dessus. La suite, il l’avait plutôt appréciée. Son ventre commençait déjà à prendre quelques formes. Sans parler de sa poitrine ! Mais elle était têtue comme une mule ! Et elle n’osait pas s’adresser à Elen. La Cerf resta un instant perplexe et puis lâcha un soupir avant de s’asseoir et d’étirer ses bras. - Bon... Peut-être que t’es pas si loin de la vérité... Fit-elle finalement, sans oser porter son regard sur Elen. Elle se contentait de fixer un point devant elle. - Pardon ? - T’as bien compris. Elle est en cloque ! Déclara le Loup avec fierté, en bombant le torse. - Mais c’est merveilleux ! Félicitations tous les deux ! Depuis quand ? Il faut absolument le dire à Isa ! - Je sais pas exactement, deux saisons peut-être, mais pas plus de trois... Elle se releva et d’une bourrade amicale, repoussa Elen. Ben vas-y en premier, alors ! Ajouta-t-elle avec un rire. - Ha, non, c’est toi qui lui dis ! - Ailou, par contre, faut que tu demandes un truc à Elen ! - Mais pourquoi ? Fit-elle en se retournant vers Evonis. Ça ira, t’en fais pas ! Peut-être qu’elle se montrait trop confiante mais à vrai dire, elle se sentait un peu gênée à l’idée de se laisser ausculter par Elen... - Bon, écoute Elen. Elle ose pas de demander. J’voudrais que tu vérifies que tout va bien. Promets que tu vas pas la reluquer, sinon elle osera jamais venir te voir. - Promis. Juste le ventre, Aileen. Rien de plus. - Bon, bon... D’accord ! Finit-elle par abdiquer. C’était peut être plus raisonnable de se laisser faire... Mais alors c’est toi qui le dis à Isa ! Fit-elle à Evonis avec un sourire malicieux. - Boarf. Tu sais aussi bien que moi que t’utiliseras de bien meilleurs mots que moi. Pis c’est toi qu’as un point commun avec elle. Moi chuis comme Elen. J’peux lui parler mais pour l’instant, j’peux pas m’en occuper. Isa te donnera des conseils. Sur ces entre-faits, ils arrivèrent auprès de Isa, Lilei, Dalhia et Isandre, qui purent entendre en essence la dernière phrase de Evonis. Elen embrassa son épouse, avant de jeter un coup d’oeil sur sa fille, toujours dans les bras de Isandre. - Regarde, ne lele, une vraie poupée ! Dit l’Olympienne, l’air ravi. Des conseils ? A quel propos ? - A propos de... De... Fit la Cerf, hésitante. Annoncer la nouvelle à Isa, pourquoi pas, mais elle n’était pas seule et, allez savoir pourquoi, elle était un peu gênée. Et puis on ne lui avait même pas laissé de temps de réfléchir à ses mots ! - De son tiroir qui se remplit. Entre une qui fait des cachotteries et l’autre qui ne voit rien... Vous êtes bien partis, tous... - Toujours mieux que vous. Lâcha-t-elle, sèchement. - Grand-m... Allait s’exclamer Isa embarrassée par les propos abrupts de la vieille quand elle réalisa : Oh ! C’est vrai Aileen ? Félicitations ! - Vous avez extrêmement bien choisi ses vêtements, Isandre. Toutes les deux, arrière-grand mère et arrière-petite fille. Un portrait saisissant. Commenta le Chaman pour éviter une bataille rangée entre la Cerf et la vieille bique, tandis que Isa et Aileen échangeaient. - Oui, c’est vrai ! Répondit la jeune Elfe à Isa, dissimulant un rien d’amertume derrière son sourire. Plus le temps passait moins elle supportait Isandre. La vieille lui semblait être l’incarnation même de la méchanceté... - C’est magnifique ! Tu vas voir ! Et... Oui, si tu veux en discuter, pas de problème. Elle se souvenait sa nervosité et les différents désagréments qu’une grossesse engendrait et sans les conseils de Cyan, elle ne s’en serait probablement pas si bien sortie. - Ça fera un copain ou une copine pour Lilei ! - C’est gentil Isa ! J’imagine que ça ne me ferait pas de mal d’en savoir un peu plus. Fit-elle en remerciant l’Olympienne d’un signe de tête avant d’ajouter, pour Elen : J’espère qu’ils s’entendront bien ! - On est toute belle, hein ? On est toute belle ! Dis merci à Isandre. - Balala ! Fit Lilei, gigotant dans ces nouveaux atours, en s’accrochant de ses petites mains à un pouce de Isandre. La vieille fronça les sourcils sans toutefois retirer sa main captive et sa mimique fit rire la petite aux éclats. Nalala ! Bwaaa ! - Tu viens Aileen ? On va regarder où tu en es. Fit le Chaman, invitant la jeune femme à rentrer sous sa tente. - Va avec lui, je te réserve un assiette ! Et une belle ! Et je mettrai des myrtilles dans le ragoût, comme t’as demandé ce matin ! - Oui Elen, j’arrive... Fit-elle en se levant, déposant un baiser sur la joue d’Evonis. Finalement, elle aurait préféré des framboises à la place des myrtilles mais elle ne voulait pas embêter Evonis avec ça... Aileen, Elfe des lunes du Clan du Cerf
Intendante bien malgré elle ! ♥ |
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Le Chaman posa plusieurs questions, auxquelles Aileen se plia bien volontiers. Vint alors le moment de l’examen proprement dit. Il invita la Cerf à découvrir son ventre. Elle hésita un court instant, ho, pas bien longtemps. Simplement le temps de se rappeler qu’elle ne risquait rien en présence d’Elen. Vraiment rien. Et puis elle s’exécuta prestement, confiante.
- Eh bien ! Effectivement. Il commence à montrer le bout de son nez ! Et il fallait avouer que le Chaman n’avait pas tort. Aileen n’y avait pas vraiment prêté attention jusque là, se doutant bien de ce qui allait arriver, aussi n’avait-elle pas jugé utile de surveiller au jour le jour les changements qui avaient lieu... Mais c’est vrai que la différence commençait à être visible. Bientôt, plus personne ne pourrait douter ! Il l’examina, en douceur, sachant précisément ce qui avait retenu la Cerf : - Tu m’arrêtes si ça ne va pas, d’accord ? - D’accord... Répondit-elle avec un signe de tête. Tout se déroula pour le mieux. Il essaya de ne pas la brusquer. Tout lui semblait en ordre, d’après son expérience. - Ça a l’air d’aller, Aileen. Je vais écouter, si tu veux bien. - Ecouter ? Fit-elle, un rien surprise. Il y avait déjà quelque chose à entendre ? Si tu veux... Fit-elle en haussant finalement les épaules. Il plaqua son oreille contre son ventre, attentif. Et il l’entendit battre. Mais pas régulièrement. L’enfant était-il déjà stressé ? Il fallait en avoir le coeur net. Il se détacha de Aileen. - Tu peux te recouvrir, Aileen. Je l’ai entendu. Mais il faut que je vérifie quelque chose. Rien de grave, hein ? Il l’avait déjà fait, avec Isa. La Louve olympienne avait senti la présence de Lilei. Elle le lui avait dit, et il avait essayé à son tour. Et il avait frôlé l’esprit de sa fille. Il étendit son esprit vers Aileen, puis se rapprocha de l’enfant qu’elle portait. Et il étouffa un hoquet de surprise. Instantanément il émergea, tout excité par sa découverte. - Aileen ! Il faut absolument que tu sentes ça ! C’est... C’est... Juste une transe légère. Vers... Juste... Essaye. Tu vas voir ! - Que... Qu’est-ce qu’il se passe ? C’est pas grave, j’espère ? Fit-elle, inquiète. Est-ce qu’il avait décelé un problème ? - Rien de grave ! Vas-y ! Essaye ! - ...D’accord. Fit-elle, perplexe. Qu’est ce qu’il pouvait bien y avoir ? Elen, EdL
Chaman du clan du Loup au conseil des Lunes Responsable de l'Éclat des Lunes ♥ |
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Elle ferma les yeux et se concentra, chassant les questions qui lui venaient en tête. Elen disait que ce n’était qu’un exercice de transe légère... Ça ne devait pas être si difficile, alors. Mais l’idée d’entrer en contact avec l’esprit de celui - ou celle ! - qu’elle portait... C’était un peu étrange, non ? Quoi qu’il en soit, elle se plia à l’exercice, sans savoir à quoi s’attendre. Elle mit un peu plus de temps que le Chaman à parvenir à un résultat mais elle la sentit, cette petite présence en elle. Mais quelque chose... Quelque chose n’allait pas, même si elle ignorait quoi. Qu’est-ce qu’Elen voulait qu’elle “sente” ?
A l’instant où elle se posait la question, elle réalisa ce qu’avait voulu dire le Chaman. Ce n’était pas une présence, mais deux... A son tour elle ouvrit les yeux, restant muette de stupéfaction. - Elen, c’est... C’est... Fit-elle, peinant à trouver les mots sous le coup de la surprise. - Va vite leur dire. Surtout à Evonis. Au lieu de se précipiter vers l’extérieur, elle resta plantée là, sans savoir que faire. Elle avait l’impression d’être revenue au jour où elle cherchait encore ses mots pour faire son annonce à son mari... Qu’est ce qu’il allait en penser ? - Va lui dire, il va adorer. - Tu... Tu crois ? Fit-elle, incertaine. Elle même n’était pas réellement rassurée. Elle s’était préparée à l’idée d’avoir un enfant, mais deux... - Mais oui. Passée la surprise initiale, il va se mettre en quatre pour t’aider. Tu vas voir, il va s’imaginer que tu vas avoir besoin de lui tout le jour durant. Tu n’auras plus une seconde à toi. - Je sais pas... J’espère... Fit-elle, peu rassurée mais affichant néanmoins un sourire. Elle sortit de la tente à pas lents et rejoignit le reste du groupe, sans un mot elle vint s’asseoir aux côtés de son Loup, s’accrochant à son bras alors qu’elle posait sa tête sur son épaule. Il était occupé à vider une gourde d’eau fraîche. Le Chaman, lui, rejoignit Isa à la suite de Aileen. Il embrassa son épouse au creux du cou, couvant Lilei du regard. La petite s’était endormie dans les bras de Isandre. Légèrement inquiète du silence de leur Prima-Luwä, l’Olympienne lança un regard interrogatif à Elen. Ce dernier posa une main sur la taille de Isa, l’autre glissant en une caresse le long de la joue de sa belle, avant qu’il l’embrasse avec délicatesse. La jeune femme se douta qu’Aileen devait être en pleine forme, sinon Elen aurait l’air bien plus soucieux. Néanmoins il planait une sorte de mystère depuis qu’ils avaient ressurgi de la tente... La vieille ouvrit la bouche comme si elle allait dégainer une autre de ses piques mais la petite eut un hoquet et grommela brièvement avant de replonger dans un profond sommeil. Ce qui coupa la chique à l'aïeule. Finalement, Aileen se décida à rompre le silence. Elle semblait toujours aussi peu assurée. - Bon, ben... Ça s’est plutôt bien passé, il n’y a pas de soucis... Mais on a... Enfin, Elen a découvert... Qu’on allait être plus nombreux que prévu, mon Loup... Fit-elle en levant les yeux vers lui. - De quoi ? - Oui... Souffla la Cerf. Des... Jumeaux... Il manqua de s’étouffer. - Des quoi ? - Des jumeaux, Evonis. Deux. Pas un. L’Ashka tomba à la renverse. Il se débattit un instant, agitant bras et jambes. Puis il s’immobilisa, fixant le ciel, silencieux. A ses côtés, Aileen ne savait que dire, ou que faire. Elle ne savait même pas que penser de cette réaction. Elle se contentait de fixer ses mains sans mot dire. Soudain, d’un geste vif, il attira la Cerf sur lui pour l’embrasser passionnément. - Ça va aller ? C’est pas trop dur ? C’est lourd ? Tout va bien ? Tu crois qu’ils vont s’entendre ? Faudra faire deux lits. On les mettra dans une chambre tout près de la notre, hein ? Et comment on va faire pour les vêtements ? Faudra prévoir en double. Mais pas les mêmes. Sinon on va les confondre. Et on va... S’en suivait toute une liste de choses à faire ou ne pas faire, selon lui. Aileen n’avait pu s’empêcher d’éclater de rire, soulagée qu’il ne prenne pas la chose mal. Elle, elle commençait déjà à s’inquiéter. Mais cette longue liste la confortait, au moins un peu. Il l’aiderait, son Loup. - Tu imagines, ne lele ? Deux ! C’est fou, hein ? - C’était donc ça ! Grands Dieux ! Isa ne savait plus si elle devait être admirative ou compatissante. - Comme tu dis... J’espère que nous serons tous rentrés au bercail avant la deuxième fournée. Une meute de trois monstres braillards serait tout bonnement insupportable. La vieille pria pour être retournée à Lardanium avant que cela ne se produise. - La deuxième fournée ? Je ne savais pas que vous prépariez des gâteaux... Répondit Aileen, feignant de ne pas avoir compris la pique de la vieille. Et pourtant, elle souriait. J’espère que ça se passera bien... Fit-elle après avoir décidé d’ignorer la présence d’Isandre pour la suite. - Faut que tu manges, Ailou ! Attend, assieds-toi, hein ? Je vais te servir. Une portion pour quatre, hein ? Parce que tu manges pour trois, et si les p’tits ont ton appétit, faudra au moins ça, hein ? - Mais c’est beaucoup trop ! Fit-elle avec un éclat de rire. Ils ne mangent pas encore autant, à leur âge ! Et puis il en faut pour les autres aussi ! Elle n’allait quand même pas monopoliser leurs réserves de nourriture sous prétexte qu’elle attendait des jumeaux... - Mais si, mais si, faut manger. Attends. - Lilei sera contente, j’en suis sûr. Ils vont s’adorer. Le Chaman embrassa derechef sa femme. - Et nous le serons beaucoup moins quand ils nous feront les quatre-cents coups en équipe ! - Je les aiderai ! Fit Aileen avant d’éclater de rire lorsqu’Evonis lui mit dans les mains une portion de ragoût comme elle n’en avait jamais vue... Mais c’est trop, arrête ! - Faut manger ! - Bah... Ils auront bien le droit de faire ce qu’ils veulent, les petits. Tu vois, Aileen, je te l’avais bien dit ! Elen eut un instant l’idée saugrenue d’une petite soeur ou d’un petit frère pour Lilei. Mais il était tout à fait inconvenant pour un Elfe de songer si tôt à un second enfant. Et plus encore vis à vis de Isa qui n’était pas encore certaine que Lilei n’ait pas été affectée par sa malédiction. Lui, en son for intérieur, il savait. Lilei n’avait rien. Mieux encore : elle et sa mère partageaient un lien spécial. Un lien qui aiderait Isa à affronter l’avenir au moins aussi bien que celui de l’amour qu’ils partageaient elle et lui. Et lorsqu’une fois encore il échangea un regard chargé de tendresse avec elle, il l’imagina portant leur second enfant. Sereine, cette fois-ci. Pleine de certitude. Magnifique. Radieuse. Et heureuse. Lilei tout près d’elle. Un sourire rêveur flotta sur son visage, ses yeux rivés sur le tendre regard de miel de son épouse. Le coup d’oeil éloquent du Chaman fit rougir Isa qui détourna les yeux en souriant. Aileen, Elfe des lunes du Clan du Cerf
Intendante bien malgré elle ! ♥ |