Ah’Ziusudra… Pourquoi devait-il se trimbaler un nom pareil ? Avec un tel fardeau, on pourrait croire que c’est à cause de ça que notre elfe est aussi peu aimable. Mais les rares personnes à vraiment le connaître savent qu’il ne s’agit pas uniquement de cela…

La poursuite ne s’était pas aussi bien passée que prévue. Les olympiens et le géant qui poursuivaient Ah’Ziusudra depuis plusieurs jours déjà s’étaient adjoints les services d’un nain et d’un autre olympien. La troupe était parvenue plusieurs fois à coincer l’elfe des lunes et lui infliger des blessures. Ah’Ziusudra parvenait à parer la plupart des coups, mais avec la fatigue des combats et du voyage l’elfe avait fini par découvrir sa garde et désormais des plaies saignant abondamment parcouraient son corps.

Ce soir, il était parvenu à les semer. S’étant assuré qu’ils avaient pour l’instant perdu sa trace, il se fabriqua un matelas de fortune à même le sol qu’il camoufla de branchage et de mousse. Il était alors impossible pour quiconque de trouver par sa simple vue où pouvait se trouver cet étrange campeur. De plus, en étant au contact du sol Ah’Ziusudra pouvait capter les vibrations et deviner quand un être s’approchait de lui. La nuit était déjà tombée depuis longtemps, et l’elfe ressentait le besoin pressant de dormir. Après avoir couvert ses plaies d’herbes odorantes afin de ne pas attirer d’éventuels prédateurs, il sombra dans un profond sommeil au point que ses sens n’étaient plus en éveil, le livrant à tous les dangers. Cependant, le plus grand risque pour Ah’Ziusudra n’allait pas provenir de l’extérieur mais bel et bien de l’intérieur...

Musique d'ambiance
(pour tous les post à venir)

Alors qu’il avait perdu la notion du temps, et qu’il ne restait en lui que la douleur de ses blessures, Ah’Ziusudra eut l’impression de plonger en lui-même. Il se sentit comme transporté à travers des pensées se matérialisant autour de lui, prenant des formes asymétriques. Le spectacle était pour le moins inhabituel, mais l’elfe ne s’en souciait pas. Après avoir traversé ces étranges lieux, l’elfe finit par atterrir sur quelque chose de dur. Il lui était possible de marcher, mais il se rendit rapidement compte que le socle sur lequel il se trouvait ne faisait que deux ou trois mètres de large. Avant d’avoir eu le temps de se poser la moindre question, il remarqua que le décor qui l’entourait était bizarrement fissuré. En effet, ces failles semblaient se creuser dans l’air même, n’obéissait à aucune règle géométrique. Il était impossible de savoir où elles étaient exactement situées, si elles touchaient effectivement les objets se trouvant ici où si il s’agissait de fissures « volant » dans les airs.

Soudain, une secousse fit trembler l’endroit tout entier, et les fissures craquèrent dans un bruit sec. Elles s’étaient agrandies, mais il était toujours impossible de voir ce qui se trouvait derrière. Ah’Ziusudra sentit alors que quelque chose s’approchait. Cela venait d’en bas, du plus profond des ténèbres, du plus sombre recoin de son être. Et la chose n’avait pas l’air petite.
Un bruit sourd se fit alors entendre, comme si ce qui arrivait était si lourd en se déplaçant que le moindre de ses gestes faisait naturellement du bruit. C’est alors que l’être apparu. Il s’agissait d’un « être » uniquement parce que l’on pouvait décerner un semblant de tête ornée de grands yeux brillants mais vides, ainsi que deux immenses mains qui lui permettaient de se hisser au niveau du socle où se trouvait l’elfe.

La créature était d’une taille impressionnante : elle pouvait saisir Ah’Ziusudra d’une seule main si elle le désirait. L’elfe ne pouvait d’ailleurs pas voir tout le corps de cet être gigantesque, son torse ainsi qu’une partie de son ventre étaient les plus basses parties visibles, de plus de là où ce monstre venait il ne valait mieux pas chercher à l’observer tout entier. Il possédait un côté bestial, mais tenait plus du monstre que de l’animal. Enfin sa tête était sûrement la partie la plus troublante : tout d’abord ses yeux fixaient l’elfe sans le regardait vraiment, mais son crâne était orné de deux cornes distordues qui semblaient pencher vers l’arrière du corps ; cette chose semblait également ne pas avoir de bouche pourtant Ah’Ziusudra commença à entendre une voix lui parler.

Tandis qu’il entendait les râles du monstre, il vit que les fissures s’agrandissaient peu à peu. De plus, un chant était perceptible mais trop lointain pour que l’on entende d’éventuelles paroles.
La voix du monstre se fit alors entendre, elle était grave, caverneuse, et fit presque défaillir le petit être se trouvant en face de lui.

-Arrête de te reposer espèce de misérable, tu n’es rien d’autre que la souillure de ce monde et tu trouves tout de même le moyen d’aggraver ton cas ! Rappelle-toi que si tu vis, c’est uniquement parce que je l’ai bien voulu. Une quête t’attend, petit homme. Il te faut trouver ce lutin, tu dois tout mettre en œuvre pour le retrouver. Arrête de traîner, tu n’as pas été élevé pour ça. La roue a tourné, c’est à ton tour désormais de faire couler le sang. Trouve-moi ce lutin !

L’elfe ne comprenait rien à ce que cette chose racontait. Les mots résonnaient dans sa tête mais demeuraient vides des sens. La colère, encore elle, revint telle un reflexe. Elle embrasa Ah’Ziusudra qui s’adressa alors à la créature :

- Et toi qui es-tu donc pour me donner de tels ordres ? Je ne suis pas un chien ni un pion, je ne suis soumis à personne ! Quel est cet endroit ? Que me veux-tu ? Je ne comprends rien à se qui se passe ici !
-Imbécile, tu crois qu’en ce lieu tu possèdes un quelconque pouvoir ? Ici tu n’es rien de plus que le jouet de MA volonté, rien qu’un minuscule rouage. Tu as besoin de moi, je te suis vital car il en a été décidé ainsi !
-Jamais ! Je n’appartiens à personne !

Les paroles de l’elfe étaient teintées autant par la colère que la peur. Il ne parlait plus que par instinct, pour se défendre, mais quoi qu’il aurait pu faire tout espoir était vain. Le monstre tendit alors ses deux mains en direction d’Ah’Ziusudra. Celui-ci ne pouvait pas les esquiver, la plate-forme rocheuse sur laquelle il se trouvait était trop petite. Le monstre agrippa l’elfe avec fermeté et l’étreinte fut très douloureuse lorsque les deux immenses mains se refermèrent sur lui.

Ah’Ziusudra se débattit, mais cette cage de peau et d’os ne bougeait pas, et lentement il se rapprochait du visage de son tortionnaire. Celui-ci ouvrit alors sa bouche jusqu’alors invisible. Des dents de chairs ornaient sa mâchoire, elles étaient collées à même ses lèvres, son regard devint alors encore plus oppressant, et ses traits se déformant un horrible sourire se dessina sur son visage. Ah’Ziusudra tenta alors de dévier son regard, mais il vit alors de nouveau les fissures qui l’entourait. Celles-ci étaient devenues béantes et avaient presque englouti tout l’espace. L’elfe tenta de voir se qui se trouvait au-delà de ses failles mais il ne vit qu’un flot de souffrances indescriptibles, représentation de la folie la plus extrême. Tout s’effondrait en ce lieu. Alors que l’elfe hurlait et tentait de s’échapper, il se rendit également compte que la musique, avant presque inaudible, était devenue assourdissante. Des voix s’élevaient et oppressaient les tympans de l’elfe. Les paroles étaient désormais parfaitement compréhensibles :

"Et le démon dévora le loup, la lune saigna et se fissura dans un grand fracas. Et le démon, dans ce nouveau corps, regarde, tout et toujours, avec ses yeux en flammes. Le loup est mort ! Le loup est mort ! Le démon l’a dévoré ! Et le voilà, l’impie, qui s’apprête à vous dévorer ! Ceci est, et un jour le monde baignera dans le sang comme cela a toujours été!"

La mélodie se répétait inlassablement, toujours plus forte, tandis qu’une éternité passa pour que l’elfe soit à la porté des dents immenses du démon. Alors la mâchoire se referma et Ah’Ziusudra se sentit retourné dans tous les sens, mâché, broyé. Il ne restait rien de lui si ce n’était la douleur, la douleur des plaies sur son corps. Il se réveilla alors, en sueur. Il remarqua d’abord qu’il s’était si profondément endormi qu’il en avait perdu ses sens de guetteur. Puis il sentit que ses plaies s’étaient rouvertes et saignaient avec abondance.

Il refit ses bandages et se prépara à partir. Il avait encore l’impression de sentir les dents du démon déchirant son corps. Ce n’était pas la première fois qu’il faisait ce rêve, celui se répétait déjà depuis longtemps, mais à chaque fois qu’il s’y trouvait, l’elfe agissait comme s’il ne l’avait encore jamais vécu. Il reprit la route, et entendit alors des pas pressés se diriger vers lui. Il se mit à courir, marmonnant entre ses dents :

-foutu lutin…

La course serait bientôt terminée, mais le rêve lui se répétait encore et toujours et demeurait un mystère…

Très bon récit (hormis les rares fautes et accords)!
On ressent très bien la chose, au-travers des souffrances d'un personnage inévitablement torturé! Tous ces écrits mis bout à bout, la psychologie de Ah'Ziusudra se révèle déjà plus explicite.

J'ai bien aimé l'ambiance vampirique/ténèbres à la Diablo II (oui je sais, ne possédant aucun Legacy of Kain, c'est là ma référence).
Quand à la musique...divine, comme le jeu (je te reconnais bien là, pour ce retour aux sources!).

Merci Dlaumor! J'ai pas l'habitude de faire des chroniques donc il y a effectivement des fautes et encore du boulot avant de pouvoir pondre quelque chose de vraiment prenant et construit. Tu me l'as fait remarquer et c'est une belle preuve d'objectivité, mais tu as en plus parfaitement cerné le but de ma chronique: dévoiler la raison pour laquelle Ah'Ziusudra est un sociopathe antipathique. Décidément tu es un très bon lecteur, mais j'espère que tu nous honoreras bientôt d'une de ces fameuses chronique dont tu as le secret.
Enfin je sais qu'il y a un "petit" problème de timing entre le texte et la musique, mais cette même musique représentait parfaitement, selon moi, cette impression de grand espace surnaturel, à la fois vide et en mouvement, dans lequel plongeait le personnage (et oui il s'agit bien de Soul Reaver 2, on ne peut échapper à son passé que veux-tu...)

Et également merci pour l'aide providentielle qui à corrigé le titre!